Dans sa campagne pour les primaires des Républicains, Alain Juppé a présenté son plan de réforme de l&#39;éducation. Rien de bien étonnant. Il propose de réévaluer la rémunération des enseignants (probablement en échange d&#39;une réduction de masse salariale), d&#39;avoir plus d&#39;enseignants en primaire et plus d&#39;autonomie dans les établissements scolaires.Mais il s&#39;agit bien de préciser que cette autonomie n&#39;est pas une réelle autonomie. Les établissements pourront changer un peu leur emploi du temps, rajouter des options, et ainsi de suite.Mais, fondamentalement, l&#39;école ne changera pas.Pour comprendre le problème de l&#39;école aujourd&#39;hui, imaginons le cas suivant : imaginons un chirurgien de 1890 arrivant dans un bloc opératoire de 2015. Il serait complètement perdu. Il ne saurait pas quoi faire, ou comment. Il en reconnaîtrait presque aucun des ustensiles.Maintenant, imaginons un enseignant de 1890 entrant dans une salle de classe de 2015. Il n&#39;aurait aucun problème à se lancer. Il serait peut être surpris que les élèves ne se lèvent pas en entrant dans la salle, et par leurs vêtements. Le contenu des livres serait différent, mais la manière dont il ferait son travail serait pareil : des rangées de tables et de chaises, des cahiers et des crayons, un tableau noir, un instituteur qui lit dans un livre.Pourtant, nous sommes au 21ème siècle. De nombreux modèles d&#39;enseignement ont été élaborés depuis la fin du 19ème siècle, où l&#39;école actuelle a été conçue, sur le modèle de la société industrielle de l&#39;époque.Il y a eu les méthodes Montessori, qui dans de nombreuses études ont montré des résultats formidables. Une enseignante de l&#39;Education nationale, Céline Alvarez, a été mise à pied pour avoir tenté de les appliquer dans une école en ZEP.Il y a eu la révolution informatique, avec tout ce qu&#39;elle peut supposer de changements dans notre manière d&#39;apprendre, comme il y a eu tant de changements dans notre manière de communiquer ou de travailler.Il y a l&#39;école Alexandre Dumas, qui tente de créer de l&#39;intégration dans des zones sensibles avec un mode d&#39;éducation plus traditionnel.En somme, il y a des milliers de manières de penser l&#39;école. En France, on en a une.Laquelle est la meilleure ? J&#39;ai mes opinions là-dessus, mais elles ne sont pas le sujet de cette chronique.Car le vrai problème, en France, est justement que chacun considère qu&#39;il y a une bonne et vraie manière d&#39;éduquer tout le monde et qu&#39;il suffirait que les bonnes méthodes soient appliquées à travers tout le territoire pour régler le problème. C&#39;est le point commun des &ldquo;conservateurs&rdquo; qui veulent remettre les &ldquo;fondamentaux&rdquo; à jour et des &ldquo;pédagogistes&rdquo; et de leurs méthodes dites &ldquo;douces.&rdquo; La proposition d&#39;Alain Juppé de pouvoir changer un peu l&#39;emploi du temps à l&#39;école n&#39;y change, au fond, rien.Le fait est que le monde urbain est différent du monde rural, et plus profondément que tous les enfants sont différents. J&#39;ai, comme tout le monde, mes opinions sur l&#39;éducation. Mais ce que je voudrais, ce n&#39;est pas tant qu&#39;on applique mes idées plutôt qu&#39;on permette à des milliers d&#39;approches différentes de fleurir, afin non seulement que nos enfants puissent apprendre, mais que nous puissions apprendre par l&#39;expérience ce qui marche.Cela demanderait de l&#39;humilité de la part de nos responsables. Ce qui n&#39;a jamais été le fort d&#39;Alain Juppé, ni du reste de notre classe politique.

Le problème central de l'éducation à la française

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Le problème central de l'éducation à la française (à côté duquel passe Alain Juppé)

Les résultats du Bac viennent de tomber. Bonne occasion de prendre la température de cette institution si française. Car le Bac, c&#39;est un peu une exception française.Le Bac, c&#39;est une exception française d&#39;abord parce qu&#39;il combine une égalité de façade avec une inégalité de réalité, et ça c&#39;est très français. Egalité de façade : le Bac, tout le monde le passe, tout le monde est logé à la même enseigne. Examen national, à la sortie : mérite.La réalité, tout le monde la connaît : en fait, le Bac accentue les inégalités. D&#39;abord, parce qu&#39;il n&#39;y a pas un Bac, mais une multitude de Bacs. Le Bac général, d&#39;un côté, qui est celui dont on parle le plus (avec le marronnier du commentaire de l&#39;épreuve de philo chaque année), et les Bacs techno et pro, dont on parle moins, alors qu&#39;ils concernent autant d&#39;élèves.Cette distinction qui incarne la hiérarchie si française entre la théorie et la pratique : d&#39;un côté, le &ldquo;général&rdquo;, c&#39;est-à-dire le théorique (épreuves star : philo et maths, les matières les plus théoriques), et de l&#39;autre le &ldquo;pro&rdquo; et le &ldquo;techno&rdquo;, c&#39;est-à-dire le pratique, mais en pratique, le relégué. En théorie, on devrait être &ldquo;pro&rdquo; ou &ldquo;techno&rdquo; parce qu&#39;on a une vocation à un apprentissage ou un métier particulier ; en pratique, on parque les élèves dans les filières &ldquo;pro&rdquo; ou &ldquo;techno&rdquo; parce qu&#39;ils ne sont pas assez &ldquo;bons&rdquo; pour être &ldquo;généraux.&rdquo; Le &ldquo;bon&rdquo;, c&#39;est celui qui manie le &ldquo;général&rdquo;, c&#39;est celui qui n&#39;a une expertise particulière dans aucun domaine pratique, mais peut tout voir depuis 5000 mètres d&#39;altitude. Le Bac produit des français qui, selon la blague anglo-saxonne, demandent &ldquo;D&#39;accord, ça marche en pratique, mais est-ce que ça marche en théorie?&rdquo;La fameuse épreuve de philosophie du Bac n&#39;est d&#39;ailleurs aucunement une épreuve de philosophie ; c&#39;est une épreuve de dissertation. La dissertation, cet exercice purement formel et si français, si parfaitement rigide. Il est parfaitement possible de faire une très bonne dissertation de philo sans jamais avoir fait de philo, et il est parfaitement possible de produire un très bon papier de philo qui sera noté 0 à une épreuve de dissertation de philo. A part ceux qui sont passés par le système français, aucun des grands philosophes que nos lycéens étudient n&#39;auraient pu faire une dissertation de philo.Inégalités sociales, bien sûr, dans le sens où beaucoup arrivent mieux préparés au Bac que d&#39;autres, et que la société française fait en sorte que les mieux préparés soient ceux dont les parents ont le plus de capital, qu&#39;il s&#39;agisse de capital financier ou de capital humain et social (enfants de profs, notamment). Et même à l&#39;intérieur des filières &ldquo;générales&rdquo;, &ldquo;pro&rdquo; et &ldquo;techno&rdquo;, il y a des sous-filières, souvent cachées. On sait quelles options mènent aux meilleures prépas ou aux meilleurs cursusInégalité dans le nivellement par le bas pour un diplôme qui, chacun le sait, est tout simplement donné à toute une classe d&#39;âge, ce qui ne fait que renforcer les autres inégalités : le critère déterminant devient sa mention, ou son option, ou son lycée d&#39;origine.Epreuve très française, donc, parce que malgré la réalité toujours mieux constatée de l&#39;inégalité concrète, on préfère l&#39;égalité théorique. Et souvent pour des raisons émotionnelles et nostalgiques, dans ce pays explicitement re-fondé sur les bases des idéaux des Lumières et de la Modernité, mais si conservateur en pratique. Le Bac, ça rappelle de bons souvenirs aux sexagénaires qui contrôlent notre pays, le Bac a toujours été dans le paysage, donc on ne peut pas toucher au Bac.Est-ce que ce discours persiste à cause d&#39;une simple illusion, d&#39;une simple absence d&#39;un regard en face des faits, ou est-ce que chacun sait, au moins dans un petit fond bien caché de leur esprit, que ce discours est faux, mais que ceux qui tiennent les rênes de notre pays le maintiennent en place parce qu&#39;ils veulent les inégalités qu&#39;il produit ? Selon les jours et mon degré de cynicisme, j&#39;oscille entre ces deux explications.Comment pourrions-nous, alors, réformer le Bac pour le 21ème siècle ?Je dis du mal de l&#39;épreuve de philo, mais j&#39;estime beaucoup la philo. L&#39;instinct qui sous-tend la canonisation de l&#39;épreuve de philo est sain : dans une démocratie, il faut donner aux étudiants une éducation qui puisse faire d&#39;eux des citoyens éclairés, aptes à participer à la vie de la cité.Le problème n&#39;est pas cette idée-là. Le problème est que nous n&#39;enseignons pas la philo, nous préparons à une épreuve de philo. Il faudrait faire des cours de philo des cours sur la base des grands textes de la philosophie - et pas de manuels qui simplifient et maquillent à outrance - et, surtout, il faut que ces cours ne soient pas notés. Pas d&#39;épreuve à la fin. Un contrôle de connaissances, peut-être, mais pas d&#39;examen avec des notes. L&#39;objectif du cours de philo est de former des citoyens, pas de mesurer des bêtes de concours.Et pour les autres matières ? Là, il y aurait une révolution encore plus importante à faire : évaluer des compétences, et non des connaissances formelles. Chacun étudierait les matières de son choix, à son rythme, grâce à des plates-formes d&#39;enseignement de nouvelle génération, et pourrait être évalué à son rythme sur des connaissances et des compétences bien précises. &ldquo;15/20 en physique&rdquo; ne veut rien dire, si ce n&#39;est une vague corrélation avec le QI et la capacité de travail. &ldquo;Je connais les vecteurs, la physique des fluides à tel niveau, les principes de l&#39;électricité, etc.&rdquo; donne ces informations, mais également beaucoup plus. Et ca prépare des élèves à découvrir ce qu&#39;ils aiment, et donc à découvrir ce vers quoi ils vont s&#39;orienter plus tard. Le Baccalauréat, qui ne serait plus qu&#39;un recensement de ces épreuves de compétences passées au cours du cursus du lycée, deviendrait une vraie &ldquo;fiche d&#39;identitié&rdquo;, un espèce d&#39;instantané fiable des connaissances, compétences, goûts et aptitudes de chaque élève, un vrai pas vers l&#39;avenir.Le seul problème c&#39;est que nous ne serions plus des numéros. Impossible de comparer un élève à un autre juste en regardant leur moyenne. Il faudra traiter les élèves comme des êtres humains, et pas comme des rouages dans une grande machine.En France, ça serait une révolution.&nbsp;&nbsp;&nbsp;

Comment faire entrer le Baccalauréat dans le 21ème siècle

Nous préoccupons-nous encore de l&#39;avenir ?Le terme qui qualifie sans doute le mieux l&#39;activité de nos dirigeans - politiques, bien sûr, mais aussi d&#39;entreprises et dans d&#39;autres secteurs - est sans doute celui de &quot;gestionnaires.&quot;Il est évident que depuis vingt ans nos hommes politiques ont une vision purement gestionnaire de leur exercice du pouvoir. Dans les années 80, il y a eu deux tentatives de politique ambitieuse en France : l&#39;aventure socialiste de 1981, et l&#39;aventure libérale de 1986. Et chacune a été considérée, pour des raisons différentes, comme un échec. Et chacun des directeurs de ces aventures - François Mitterrand et Jacques Chirac - en ont tiré la même réponse : dorénavant, le leader politique doit être gestionnaire. L&#39;idée qu&#39;il y ait un but précis - qu&#39;il s&#39;agisse d&#39;une utopie socialiste ou d&#39;une utopie libérale - et que nous avons les moyens de l&#39;atteindre est révolue.Les dirigeants du secteur économique ont la même perspective. Quelle est la principale initiative complètement nouvelle envisagée par une grande entreprise du CAC 40 ? Vous pourrez attendre longtemps la réponse à la question. Les grands projets industriels de notre époque sont des redites, en plus gros, du même principe. L&#39;A380 est une prouesse technologique et industrielle, mais conceptuellement, c&#39;est une version plus grosse de ce qui a été fait avant. Le avion à deux étages, le Boeing 747, a fait son premier vol en...1969. Il y a quarante ans, l&#39;ancêtre d&#39;Airbus faisait le Concorde, qui était vraiment différent des autres avions. L&#39;EPR d&#39;Areva, qui n&#39;arrive jamais, est dans son principe le même type de réacteur nucléaire que nous avons déjà, mais plus gros et plus performant, alors que ces mêmes réacteurs étaient réellement une innovation dans les années 1960.Le milliardaire américain Peter Thiel est principalement connu pour avoir été un des fondateurs de PayPal et le premier investisseur extérieur de Facebook, mais il est principalement un intellectuel. Une de ses principales préoccupations est d&#39;examiner quelle vision les sociétés ont de l&#39;avenir.Il propose une grille de lecture selon deux axes : d&#39;un côté, on peut penser que l&#39;avenir sera meilleur que le passé, ou qu&#39;il sera pire, on est optimiste ou pessimiste ; de l&#39;autre, on peut penser que l&#39;avenir est déterminé ou indéterminé.Pour Thiel, l&#39;Occident après la Seconde guerre mondiale avait une mentalité optimiste-déterministe. Non seulement l&#39;avenir serait radieux - les Trentes glorieuses - mais il y avait une vision précise de ce à quoi il ressemblerait. Les Etats-Unis créeaint le Programme Apollo, avec un objectif à la fois ambitieux et précis : poser un homme sur la Lune et le ramener vivant sur Terre. La France de de Gaulle se lançait dans le nucléaire, créait le Concorde, posait les bases d&#39;un programme spatial européen.A contrario, selon lui, aujourd&#39;hui les Etats-Unis ont une mentalité optimiste-indéterministe. Les américains sont connus pour leur optimisme indécrottable, mais aujourd&#39;hui ils n&#39;ont plus de vision concrète de cet avenir. C&#39;est ce qui pour lui explique la montée de la finance : pour faire de la finance, il faut être optimiste - aucun sens d&#39;investir si on ne pense pas qu&#39;on va gagner de l&#39;argent - mais l&#39;objectif du financier est de diversifier son portefeuille, au lieu de parier sur un secteur ou une entreprise en particulier. C&#39;est aussi la raison de la répétition de bulles financières : si l&#39;avenir doit être radieux, mais que personne ne sait comment on va y arriver, à chaque fois que quelque chose a l&#39;air prometteur, on mise tout sur le nouveau cheval. L&#39;élite américaine actuelle est constituée de Baby Boomers, c&#39;est-à-dire de gens pour qui l&#39;expérience dominante des vingt premières années de leur vie était un progrès constant - pour lequel ils n&#39;avaient jamais à travailler.Pour Thiel, l&#39;exemple principal de pessimisme-déterminisme, aujourd&#39;hui, c&#39;est la Chine. Le monde entier a peur de la Chine, mais la Chine a peur d&#39;elle-même. Les dirigeants chinois savent très bien que le rythme effréné de leur croissance crée des dislocations environementales et sociales dramatiques, et qu&#39;à un moment la machine cassera. On parle des chinois milliardaires, on parle beaucoup moins du fait que tous les chinois riches n&#39;ont qu&#39;une préoccupation : sortir leurs actifs du pays. Ceux qui n&#39;ont pas cette possibilité épargnent le plus possible - la Chine a un des taux d&#39;épargne les plus élevés au monde - malgré une inflation qui rogne leur épargne, car ils ont peur de l&#39;avenir. Pour la Chine, le scénario catastrophe est très clair.&nbsp;Et l&#39;Europe ? Pour Thiel, l&#39;Europe est pessimiste-indéterministe, et je pense qu&#39;il a raison. Nous avons peur de l&#39;avenir, mais nous ne savons pas à quelle sauce nous allons être mangés. La gestion de la crise de l&#39;euro prend comme donné une vision du monde où la croissance sera toujours plus faible, mais il n&#39;y a aucune idée pour en sortir, ou même pour se préparer. Nous ne savons pas s&#39;il y aura une catastrophe ou juste un long déclin. Nous savons juste qu&#39;un ciel bas et lourd qui pèse comme un couvercle recouvre l&#39;Europe.La position pessimiste-indéterministe est évidemment un cercle vicieux : si tout va mal se passer, à quoi bon essayer d&#39;y faire quelque chose ; si on ne sait même pas ce qui va se passer, comment élaborer un plan de sortie. Le cercle vicieux est aussi prophétie auto-réalisatrice.Comment pourrons-nous en sortir, alors ? Peut-être, Thiel suggère, devrions-nous commencer par réfléchir à l&#39;avenir. Personne n&#39;y pense. Personne n&#39;en parle. Aucun candidat à une élection présidentielle n&#39;ose dessiner un portrait de la France dans 30 ans. L&#39;idée d<a href="http://www.atlantico.fr/decryptage/avenir-interesse-inventaire-mesures-folles-necessaires-sauver-france-pascal-emmanuel-gobry-350013.html">&#39;un programme national audacieux d&#39;inventions</a> est remplacé par des <a href="http://www.atlantico.fr/rdv/nettoyeur/concours-innovation-anne-lauvergeon-ou-comment-mal-concretiser-bonne-idee-pascal-emmanuel-gobry-918873.html">gestes symboliques sans intérêt</a>. Si le président d&#39;Airbus voulait dévouer plusieurs milliards d&#39;euros à un projet audacieux d&#39;avion spatial, il serait étripé par les marchés financiers.C&#39;est un problème. Parlons-en.

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Ces visions de l'avenir dont nos dirigeants manquent cruellement

Politique

Les auteurs de ce quinquennat ont donc décidé qu&#39;ils auraient deux grandes réformes. La première : le mélange étrange d&#39;austérité et du pacte de responsabilité, c&#39;est-à-dire une baisse des charges sociales (dont l&#39;impact sur l&#39;emploi sera rendu nul par la politique d&#39;austérité). La seconde, une nouvelle vague de décentralisation.Que dire ?Tout d&#39;abord, il est significatif qu&#39;aucune de ces deux politiques n&#39;aura d&#39;impact sur l&#39;emploi, qui est la première préoccupation des français ; la politique d&#39;austérité est délétère pour le pouvoir d&#39;achat des Français, qui est leur deuxième préoccupation. A une époque où le pays est non seulement en crise économique, mais en crise politique profonde de confiance en ses élites et ses dirigeants, il est frappant de constater cela.Mais sur la régionalisation, il y a beaucoup de choses à dire.La première, que personne ne signale, est qu&#39;il s&#39;agira d&#39;un chaos énorme. Fusionner de grandes organisations n&#39;est pas une pratique simple. En théorie c&#39;est simple, et en pratique c&#39;est très compliqué, car il s&#39;agit de fusionner non seulement des structures juridiques mais énormément de cultures et de processus non écrits qui font la vie des organisations. Même dans le monde de l&#39;entreprise, où la flexibilité est beaucoup plus important et le leadership souvent plus fort, la plupart des fusions échouent. Dans le domaine du service public, surtout en France, le bilan est souvent désastreux. Par exemple, de nombreuses années après sa création après amalgamation de nombreuses autres structures, le RSI continue à ne pas fonctionner. De même avec Pôle emploi. En pratique, on constate souvent que les fusions censées créer plus d&#39;efficacité et d&#39;économies ont l&#39;effet quasiment inverse. Encore une fois, c&#39;est même souvent le cas dans le secteur privé. C&#39;est sans doute à cause de cela, que les théories nient mais que le bon sens indique, que les Français sont très dubitatifs face aux idées de fusions de collectivités, comme on l&#39;a vu avec le référendum de fusion des collectivités en Alsace, appuyé par toutes les formations politiques et rejeté par les alsaciens.La deuxième est que cette régionalisation va précisément dans le sens inverse qui est celui de l&#39;histoire : au lieu de rapprocher les lieux de décisions des Français, elle les en éloigne. Elle remonte les compétences des départements aux régions, et elle fusionne les régions. A noter que c&#39;est aller à l&#39;encontre de la tradition et de l&#39;histoire de la Nation française, qui s&#39;est justement construite en opposition au fédéralisme ou quasi-fédéralisme qui est la règle chez nos voisins.Mais c&#39;est surtout un symptôme de cette fascination si française et si étrange pour la centralisation, le dirigisme, et le colbertisme. Lorsque la décentralisation a été entreprise il y a déjà plus de 30 ans avec les lois Defferre, l&#39;objectif était bien de... décentraliser. Après ces lois tout le monde s&#39;est rendu compte que le travail n&#39;était pas fini et qu&#39;il fallait le continuer et chacun a donné ses propositions. Mais presque toutes ces propositions reviennent à une nouvelle centralisation. Le génie français : même lorsqu&#39;on essaye de décentraliser, on recentralise. La vertu de la décentralisation c&#39;était de tenter de saper le syndrome de Paris et du désert français, le syndrome d&#39;un pays où rien ne peut se faire sans décision central. Mais au lieu de guérir le syndrome, on l&#39;aggrave en créant une douzaine de mini-Paris.La décentralisation qui va à la fois dans le sens de la culture et de la nation française, et dans le sens de l&#39;avenir, c&#39;est une décentralisation qui au contraire supprime les régions et renforce au contraire deux échelons primordiaux : l&#39;agglomération, d&#39;abord, parce que le 21ème siècle sera urbain, et le département, ensuite (avec coopération entre les départements si besoin est), parce que c&#39;est l&#39;échelon le plus historique et le plus proche des français.La réforme proposée va précisément dans le sens inverse.

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Le problème central de l'éducation à la française (à côté duquel passe Alain Juppé)

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Même quand la France essaye de décentraliser, elle centralise