Le végan comme défenseur de la cause animale ? <!-- --> | Atlantico.fr
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De la nourriture végane est proposée lors d'une réception.
De la nourriture végane est proposée lors d'une réception.
©Matt Winkelmeyer / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Bonnes feuilles

Louise Kahors a publié « Le livre noir du véganisme: Peut-on être absolument éthique ? » aux éditions Kiwi. Du flexitarisme au véganisme, l'alimentation dans les pays industrialisés se met depuis quelques décennies à la mode de l'exclusion. Impact environnemental, défense de la cause animale, préservation de la santé ; les adeptes de ces différents modes d'alimentation avancent plusieurs arguments pour justifier leur choix individuel. Extrait 2/2.

Louise Kahors

Louise Kahors

Louise Kahors est journaliste environnementale, mais depuis 2013 elle choisit de se consacrer pleinement à l’information médicale et scientifique, à la fois pour le grand public et les professionnels de santé. Elle collabore ainsi avec différentes structures, publiques et privées, toujours dans le but d’apporter des informations claires et transparentes sur tous les domaines qui touchent à la santé.

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Au-delà de la dimension environnementale que s’octroie le véganisme, la revendication la plus affichée, partagée par l’ensemble des végans, est sans aucun doute la défense de la cause animale.

LE VÉGANISME INTIMEMENT LIÉ AUX ASSOCIATIONS DE DÉFENSE DES ANIMAUX

Cette principale motivation fait du véganisme un mouvement d’opinion à la fois défendu et revendiqué par de puissantes associations de défense de la cause animale, parmi lesquelles l’association L214 éthique et animaux ou l’association PETA (People for the Ethical Treatment of Animals). Selon ces associations, un végan choisit de modifier son mode de vie pour ne plus impacter ni les animaux, ni les autres, ni l’environnement. Au-delà de l’information qu’elles distillent sur le véganisme, ces associations jouent le rôle d’influenceurs, en associant clairement le mode de vie végan à la défense de la cause animale. Le discours peut vite devenir moralisateur, voire culpabilisant. Les omnivores sont clairement montrés du doigt et les végans mis en exergue.

Ces associations de défense des animaux sont très puissantes et tentent d’agir sur l’opinion par le biais de campagnes de communication choc, mettant en scène les pires dérives que l’élevage et l’exploitation animale puissent livrer, même si ces scènes ne sont pas forcément représentatives de la condition animale en général. Parallèlement, ces acteurs font la promotion ouverte du véganisme, proposé comme solution idéale face aux faits qu’ils dénoncent. Concrètement, selon ces acteurs, toute personne qui ne devient pas végane peut être considérée comme en accord avec la maltraitance animale. Le rapprochement est difficile à accepter… Que dire de tous les consommateurs d’œufs ou de viande biologique, élevée dans des conditions respectueuses de l’animal ? Ces mouvements assimilent tous les consommateurs de viande à ceux qui maltraitent les animaux. L’amalgame est flagrant.

En pratique, le refus de toute exploitation animale par les végans impose de multiples aménagements de la vie quotidienne, non seulement pour se nourrir, mais aussi pour se laver, s’habiller, se maquiller, se loger, nettoyer sa maison, etc. Les alternatives aux produits animaux existent dans chacun des aspects de la vie quotidienne. Mais si demain, plus aucun homme n’utilise ces produits, que vont-ils devenir ? Et que vont devenir les animaux qui les produisent ? Nous avons choisi quelques exemples, qui suffisent à illustrer que la suppression de tout produit d’origine animale pourrait finalement faire plus de mal que de bien au règne animal.

DES MOUTONS NON TONDUS, QUI FINISSENT ÉTOUFFÉS PAR LEUR PROPRE LAINE

Il y a quelque temps, une association australienne de protection des animaux a recueilli un mouton, qui semblait errer seul dans la nature depuis plusieurs années, sans doute au moins cinq années, compte tenu de l’épaisse toison qui le recouvrait. Les végans auraient pu se réjouir d’une telle découverte. Enfin un mouton ayant retrouvé l’état sauvage, loin de l’homme et qui aurait échappé à la tonte mise en place par les êtres humains pour exploiter sa laine. Malheureusement, ce mouton constitue un triste contre-exemple. Il s’agissait d’un mouton mérinos, une race d’origine espagnole connue pour la qualité de sa laine. Sans tonte régulière, le mouton est exposé à de graves problèmes de santé :

• une augmentation de sa température corporelle ;

• un risque d’infection ;

• des difficultés pour se déplacer ;

• la mort.

Au moment de sa découverte, ce mouton était recouvert d’une toison dont le poids total était d’environ 40  kg. Le mouton ne pouvait plus bouger et disparaissait totalement sous l’épaisseur de sa toison. Heureusement, un professionnel de la tonte est parvenu à tondre l’animal pour lui permettre de survivre à sa mésaventure. En temps normal, les moutons à laine – car il existe des espèces de moutons sans laine – sont tondus une fois par an, ce qui permet de prévenir les problèmes de santé liés à une toison trop importante.

Les végans refusent tout vêtement en laine. Souhaitent-ils voir l’ensemble des moutons de la planète errer dans la nature avec des dizaines de kg de laine sur le dos, sans plus être capables de se déplacer ou de se nourrir et finir par mourir ainsi étouffés par leur propre laine ? Sous prétexte de ne pas se vêtir de vêtements en laine, il faudrait laisser les moutons dépérir et mourir. Cette situation semble bien loin d’une revendication de défense de la cause animale.

DE LA LAINE DES MOUTONS AU CUIR DES VACHES

Élever des animaux, surtout de manière intensive et dans des conditions irrespectueuses, uniquement pour les tuer, récupérer leur fourrure et fabriquer des vêtements considérés comme luxueux n’apparaît pas seulement choquant pour les végans. Inutile de devenir végan pour s’insurger contre ces pratiques et supprimer de sa garde-robe tous les vêtements à fourrure. Mais peut-on considérer que les Inuits, qui chassent les animaux de la banquise pour se nourrir, se vêtir et se chauffer sont des monstres ? Quelle solution les végans choisiraient-ils, isolés sur une banquise gelée ? Dans des contrées où la culture de toute plante est tout simplement impossible…

Parallèlement, les animaux, même en liberté et libérés du joug humain, finissent par mourir, laissant leur peau et leurs os à la disposition du reste de l’écosystème. À l’origine, il ne faut pas oublier que l’homme n’a utilisé le cuir, les peaux et les fourrures qu’à partir des animaux qu’il était obligé de tuer pour se nourrir.

DES OPPOSANTS RADICAUX AU LAIT DE VACHE

Un sujet souvent brûlant pour les végans est l’utilisation du lait de vache, définie comme un exemple type de maltraitance animale. Le véganisme considère que ce lait devrait être réservé aux veaux et que les vaches sont exploitées pour produire de plus en plus de lait. Dans l’absolu, cette vision des choses est juste. Mais renoncer aujourd’hui au lait de vache est-il vraiment une position en faveur du bien-être animal ? Il est possible d’en douter et pour plusieurs raisons.

La traite des vaches par l’homme ne date pas d’hier, mais d’environ 10  000  ans, des siècles d’histoire et d’évolution communes entre l’homme et l’animal. Aujourd’hui, la France produit chaque année 25 milliards de litres de lait, dont 90 % sont transformés en fromages, en poudre de lait et en lait infantile. Si les adultes peuvent tout à fait se passer de boire du lait, ou même de consommer des produits laitiers, les nourrissons et les jeunes enfants ont besoin des nutriments présents dans le lait de vache. Aujourd’hui, le lait de vache est à la base de la quasi-totalité des laits infantiles disponibles. Les laits sans lait de vache, comme les laits 100 % végétaux, utilisés par les végans, ne sont pas considérés comme nutritionnellement suffisants par les autorités de santé publique. Et pas qu’en France.

L’Italie a, par exemple, l’intention de promulguer une loi condamnant pour maltraitance les parents qui nourrissent leurs enfants avec des laits infantiles végans. Les besoins mondiaux en laits infantiles impliquent un maintien de l’élevage des vaches et de l’industrie laitière. Les laits 100 % végétaux ne sont pas capables de couvrir les besoins nutritionnels des nourrissons, surtout au cours de la première année de vie.

L’allaitement est une solution toute trouvée par les végans pour s’affranchir du lait de vache et fuir toutes les critiques sur les laits végétaux. Mais que se passe-t-il pour les femmes incapables d’allaiter ? Aujourd’hui, les lactariums sont seulement capables d’assurer les besoins en lait pour les enfants nés prématurément. Si une femme ne peut pas allaiter, par exemple pour des raisons majeures de santé, quelle alternative lui reste-t-il ? De même, une femme qui ne souhaiterait pas allaiter n’aurait pas d’autre choix qu’un lait 100 % végétal, incapable de nourrir correctement son nourrisson. Enfin, n’oublions pas que les laits infantiles, fournis par les ONG (Organisations Non Gouvernementales), constituent un apport alimentaire capital dans les pays où sévissent la famine, les guerres ou les épidémies.

Selon de nombreux experts, la production laitière reste encore aujourd’hui une nécessité absolue pour nourrir la population mondiale. Admettons enfin qu’à l’avenir, un substitut de lait de vache, probablement synthétique, soit mis au point, restera tout de même la question cruciale du devenir des vaches. Que deviendront-elles ?

A lire aussi : L’alimentation végane en pratique : loin d’être 100% naturelle

Extrait de l’ouvrage de Louise Kahors, « Le livre noir du véganisme : Peut-on être absolument éthique ? », publié aux éditions Kiwi.

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