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La pandémie pourrait provoquer des démissions en série en France.
La pandémie pourrait provoquer des démissions en série en France.
©Ludovic MARIN / AFP

Post confinement

Aux Etats-Unis, ils sont ainsi 4 millions à avoir démissionné de leur emploi rien que sur le mois d’avril. Allons-nous vers une explosion des ruptures conventionnelles en France ?

Xavier  Camby

Xavier Camby

Xavier Camby est l’auteur de 48 clés pour un management durable - Bien-être et performance, publié aux éditions Yves Briend Ed. Il dirige à Genève la société Essentiel Management qui intervient en Belgique, en France, au Québec et en Suisse. Il anime également le site Essentiel Management .

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Atlantico : La pandémie a provoqué aux Etats-Unis une vague de démissions. Ils seraient ainsi 4 millions à avoir démissionné de leur emploi rien que sur le mois d’avril. S’est-il produit la même chose de ce côté-ci de l’Atlantique ?

Xavier Camby : L'expérience montre qu'il est toujours judicieux de se méfier de ces chiffres à fort effet d'annonce comme des ratios impressionnants. Ou encore de ces corrélations d'apparence, pourtant improuvées ou insuffisamment analysées... Ces manques de recul ou de hauteur de vue nous égarent sur le chemin des vessies en forme de lanternes : celles de ces croyances, redoutables et imbéciles raccourcis en forme de prêt-à-penser, qui nient la vérité. 

La pandémie n'a fait qu'accélérer ou souligner un phénomène mondial antérieurement à celle-ci et déjà très sensible comme puissant : le nomadisme salarial. Né du constat d'un profond déséquilibre entre la loyauté ou l'engagement exigés de l'employé par son employeur et la réalité du comportement réel de celui-ci. Se sentant devenu comme une seule variable d'ajustement économique ou financier, le salarié de talent sait désormais qu'il ne peut plus guère compter sur la compréhension de la valeur ajoutée qu'il apporte, face aux cost-killing imposés ou décrétés par les actionnaires ou leurs représentants.

Ce nomadisme semble être devenu planétaire et irréversible : le confinement imposé a démontré que nous pouvions utilement travailler depuis notre foyer ; qu'une collaboration asynchrone est non seulement possible mais aussi vertueuse - économique comme écologique. Et plus encore, que la pression entretenue par les managers-ne-sachant-pas-manager est radicalement contre-productive. Et ce à tous les niveaux d'une hiérarchie.

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Dans les Ateliers que nous n'avons jamais cessé d'organiser pour les cadres dirigeants de toutes cultures, c'est désormais plus de 40 % d'entre eux qui se déclarent démissionnaires. Lassés des dysfonctionnements empruntés, au sein d'organisations qui ne cessent de bafouer les valeurs humaines les plus essentielles, ils acceptent la précarité et l'aventure plutôt que la détresse émotionnelle et la soumission craintive, voire servile.

Ces démissions, considérées comme saines dans un contexte économique florissant, le sont-elles toujours en temps de pandémie ? Qu’est-ce qui a vraiment poussé ces gens à démissionner ?

Pour un véritable et bon employeur, la démission d'un collaborateur ne peut manquer de susciter une sérieuse et profonde interrogation. S'agit-il d'un bon turn-over, c'est-à-dire le départ d'un collaborateur qu'on souhaitait et qu'on accepte donc comme un soulagement ? La question se pose alors du discernement et du courage de notre management ! Ou bien s'agit-il d'un mauvais turn-over, le départ d'un collaborateur qu'on regrettera ? Et la question devient aussi essentielle : pourquoi n'avons-nous pas su entreprendre de le retenir ? Pandémie ou pas, on peut observer toujours davantage, depuis une décennie, de mauvais turn-over : le départ de ceux qu'on aimerait garder. Ainsi, de très nombreux employeurs se retrouvent, sauf d'un management adapté et bientraitant, sans pouvoir garder les meilleurs (pour eux) et empêtrés de la présence de ceux que l'on pourrait souhaiter voir exercer leurs talents ailleurs.

La prise de conscience de la liberté qu'apporte la valeur ajoutée réellement apportée par les meilleurs des collaborateurs est à l'origine de cette accélération des démissions. Parachutistes, le plus souvent, car sans autre engagement ni contrat de travail !

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En France, où la culture de la démission à l’anglo-saxonne est moins ancrée, peut-on s’attendre à une explosion des ruptures conventionnelles ?

Au-delà de nos tropismes nationaux, des cultures variées comme de leurs étranges et parfois bien inutiles judiciarisations - de plus en plus inconsistantes, malgré leurs contingences ou encore les fermetures de nos frontières - une nouvelle forme de travail est en train de s'imposer. Loin de l'obsolète organisation réputée scientifique ou rationnelle du travail - subordonné et morcelé - s'invente actuellement une nouvelle façon de contribuer et de créer de la valeur ajoutée, qu'ensuite on a plaisir à partager. Le confinement au bureau ou à l'atelier, contraints ou emprisonnés au sein de toujours plus étroites définitions de fonction, au gré d'horaires obligés ou imposés, est en train de disparaître. Et je crois que nul ne peut cesser de grandement s'en réjouir, comme annonçant l'avènement d'un monde nouveau. Autant que meilleur.

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