Zones à faibles émissions : petites précisions critiques sur l’argument massue qui les « justifie » <!-- --> | Atlantico.fr
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Des agents de la ville de Lyon installent un dispositif de limitation de la circulation à 30 km/h dans une zone à faibles émissions.
Des agents de la ville de Lyon installent un dispositif de limitation de la circulation à 30 km/h dans une zone à faibles émissions.
©NICOLAS LIPONNE / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Particules fines

Un chiffre revient notamment le plus souvent dans les argumentaires pro interdiction des véhicules polluants, celui des 40 000 morts par an dus à la pollution de l’air.

Loïk Le Floch-Prigent

Loïk Le Floch-Prigent

Loïk Le Floch-Prigent est ancien dirigeant de Elf Aquitaine et Gaz de France, et spécialiste des questions d'énergie. Il est président de la branche industrie du mouvement ETHIC.

 

Ingénieur à l'Institut polytechnique de Grenoble, puis directeur de cabinet du ministre de l'Industrie Pierre Dreyfus (1981-1982), il devient successivement PDG de Rhône-Poulenc (1982-1986), de Elf Aquitaine (1989-1993), de Gaz de France (1993-1996), puis de la SNCF avant de se reconvertir en consultant international spécialisé dans les questions d'énergie (1997-2003).

Dernière publication : Il ne faut pas se tromper, aux Editions Elytel.

Son nom est apparu dans l'affaire Elf en 2003. Il est l'auteur de La bataille de l'industrie aux éditions Jacques-Marie Laffont.

En 2017, il a publié Carnets de route d'un africain.

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Atlantico : Selon une étude de Santé publique France, près de 40.000 décès sont liés chaque année à une trop forte exposition aux particules fines et 7000 au dioxyde d'azote. La méthodologie de Santé publique France est-elle suffisamment fiable et validée pour justifier ce décompte de morts, et donc l’application de mesures drastiques comme les zones à faibles émissions pour limiter les véhicules les plus polluants dans les grandes villes ?

Loïk Le Floch-Prigent : Nous sommes nombreux à interroger la méthodologie de Santé Publique France et nous n’obtenons jamais de réponses. Les statistiques sur les causes de mortalité sont très longues à venir et nous sommes toujours sur celles de 2016, avant Covid, ce qui nous parait plus raisonnable. Sur 579 230 décès les maladies respiratoires comptent pour 31 526 (cancers) et 11 156 (maladies chroniques), tandis que le tabagisme est considéré comme le responsable essentiel de 75 000 disparitions. On a beau fouiller dans les données et dans les causes on n’arrive jamais à justifier les 40 000 ou 48 000 décès dus aux particules fines énoncés par certains avec l’autorité de la vérité indiscutable. La Commission Européenne énonce elle un chiffre de 50 000 décès par an en Europe tout entière dus à ces particules fines, ce qui contredit donc le chiffre français, et la plupart des publications médicales sérieuses considèrent que l’influence des particules fines est à la fois mal connue et indiscutable, elles chiffrent non les décès mais les mois perdus sur la vie, de l’ordre de 8 mois. A défaut de certitude, on le voit, c’est donc le flou ! 

La deuxième question c’est celle de l’origine des particules fines : pour moitié, en Europe, c’est la combustion du bois, du charbon et du fioul ! Les seuls chiffres concernant les moteurs diesel souvent désignés comme les coupables essentiels portent sur 8,4% du total. En effet, dans une ville comme Paris, la plus grande concentration de particules fines est dans les couloirs et les voitures du métro souterrain, ceci du au freinage des véhicules. C’est ce même freinage des véhicules électriques individuels, plus lourds que les véhicules thermiques, qui pourraient rendre contestables la nécessité pour cause de particules fines de changer dans les villes lemode de propulsion. 

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On le voit donc l’argument « particules fines » pour caractériser une modification drastique de nos modes de vie en ville ne tient pas, et, par exemple, la multiplication des centrales électriques à charbon en Allemagne nous envoyant par vent d’Est les particules fines serait une préoccupation beaucoup plus sérieuse que celle qui donne lieu aux interdictions actuelles qui vont peser sur la vie quotidienne des français, la justification des mesures décidées sont donc hasardeuses et mal motivées en ce qui concerne ces particules fines ! 

Les chiffres sont-ils instrumentalisés ? Ne pensez-vous pas que, même s’ils sont incertains, le principe de précaution impose d’en tenir compte ?

On voit donc que les chiffres sont incertains et manifestement faux. Ils ont donc servi à demander l’éradication des véhicules à moteur thermique hors des villes pour des raisons de santé publique. Il y a donc eu manipulation. Il y a d’une part la pollution des villes et là on peut concevoir que les véhicules électriques possèdent un avantage, et, d’autre part, la santé des populations urbaines où les mesures prises ne répondent aucunement aux soucis des asthmatiques, par exemple, qui devraient s’éloigner de toutes les combustions de bois et de charbon ! Enfin, en ce qui concerne le bilan carbone dont les édiles locaux nous parlent abondamment, si l’électricité provient du charbon ou du gaz il n’est pas bon, contrairement à celui de l’électricité issue du nucléaire ou de l’hydraulique. La précaution serait donc essentiellement de se prémunir des vents d’Est qui nous envoient les particules fines des pays consommant du charbon ! 

Les ZFE (pour zones à faibles émissions) visent à limiter la pollution automobile dans les grandes agglomérations et sont en cours de mise en place, ou déjà en vigueur. Ces dispositifs sont critiqués pour être socialement injustes car ils privent des conducteurs – bien souvent les plus pauvres – de leur moyen de transport principal. Face à cela, l’Etat a mis en place une prime à la conversion pouvant monter jusqu’à 6000€ et censée encourager l’achat d’un véhicule moins polluant. Sommes-nous devant une usine à gaz ou un nouvel exemple de l’écologie punitive ?

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Les Zones à faible émission sont des créations d’enfants gâtés urbains qui n’ont pas envie d’être mêlés à une plèbe qui n’obéit pas à leur religion : la marche à pieds et le vélo. Il y a donc une exigence implicite d’un entre soi rassurant de ceux qui ont compris comment on doit se comporter pour « sauver la planète ». Basée, comme on l’a vu, sur des chiffres et des données erronées, les ZFE vont servir d’exemples à une population arriérée de ce que doit être l’avenir de l’humanité ! C’est incontestablement une ségrégation entre ceux qui ont les moyens de s’offrir un véhicule neuf et ceux qui ne peuvent que prolonger la vie de celui qu’ils possèdent, mais le poids de la nouvelle religion est tellement fort que leurs adeptes ne s’en rendent même pas compte. La plupart des familles ne croient toujours pas pouvoir partir en vacances sans difficultés avec un véhicule électrique, elles ne voient pas une multiplication des bornes de recharge, elles constatent des temps de recharge incompatibles avec la sérénité des parcours, elles estiment donc que cette évolution est un caprice de riche, ce que leurs regards sur les Teslas ne peuvent queconforter. 

Nous sommes d’abord en plein drame industriel avec une industrie du moteur thermique décimée en quelques années, sous traitants et garagistes, ensuite en pleine incompréhension d’une population habituée à l’achat de véhicules d’occasions destinés aux déplacements domicile travail sans alternatives, et enfin désormais avec des interdictions nouvelles de venir troubler la vie des nantis dans leurs cités ! On peut donc dire que les apôtres du « vivre ensemble » ont tout faux, l’idéologie des métropoles est en train de briser la collectivité nationale tout en accélérant la désindustrialisation du pays sous prétexte de préparer un avenir radieux. C’est le comble de l’écologie punitive qui pour un bien illusoire sème le désastre partout. 

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En l’état actuel des choses, les véhicules électriques (Crit’Air 0) souvent très onéreux, sont-ils une réponse face à ces nouvelles normes ? Comment l’industrie automobile va-t-elle pouvoir s’adapter face à ces nouvelles mesures et aux ZFE ?

Les choix techniques ne sont pas du domaine du politique ou des politiques. Le fait de vouloir éradiquer le véhicule à moteur thermique et de promouvoir le véhicule électrique a comme origine un dogme, une croyance, une religion, un totalitarisme qui a fait fi des réalités, qui a manipulé des données et qui continue à le faire. Le mensonge technique ne résiste jamais très longtemps , mais celui-ci peut conduire à un vrai désastre pour l’industrie européenne età un cataclysme social. La montée des violences dans nos pays est incontestable, une récession est très probable et c’est le moment choisi pour modifier de façon brutale et autoritaire les modes de vie d’une majorité de la population. Dire que l’on joue aux apprentis sorciers est un propos poli pour exprimer la situation réelle. Nous sommes devant un mur désormais infranchissable sans un retour en arrière sur les mesures décidées. En ce qui concerne l’industrie, cela va nécessiter un financement des Etats énorme dont ils auront du mal à se remettre, mais dans cette ambiance inflationniste où les fermetures et les faillites s’accélèrent tout donne à penser que le pire est à venir, les constructeurs automobiles nous le disent depuis des années, mais les ETI, PMI et PME du secteur ne s’expriment pas encore, nous allons les entendre rapidement désormais. La marche arrière est difficile car l’essentiel des dégâts a déjà commencé. L’industrie automobile est déjà partie , mais tous ses serviteurs sont toujours là ! La fuite en avant que l’on constate aujourd’hui chez tous les élus persuadés de « faire le bien » est d’autant plus hasardeuse que, comme on l’a dit, les données sur lesquelles repose la politique imposée sont erronées et ne pourront pas résister longtemps à l’observation des conséquences fâcheuses des prochains mois. 

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