38 millions de Français vont toucher l’argent magique, celui qui a « cramé » la caisse<!-- --> | Atlantico.fr
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Bruno Le Maire, Jean Castex et Olivier Véran en conférence de presse lors de la crise du Covid-19. Les aides financières vont être versées face à la hausse du prix de l'énergie.
Bruno Le Maire, Jean Castex et Olivier Véran en conférence de presse lors de la crise du Covid-19. Les aides financières vont être versées face à la hausse du prix de l'énergie.
©Ludovic MARIN / POOL / AFP

Atlantico Business

L’argent des aides exceptionnelles de l’Etat va être versé aux Français pour compenser la hausse des prix de l’énergie et l’inflation. Pour le gouvernement, il fallait compenser la baisse du pouvoir d’achat, mais pour l’opposition, c’est l’argent magique, celui qui a cramé la caisse.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Ce qui devait être une juste compensation des baisses de pouvoir d’achat laminé par l’augmentation généralisée des prix et notamment ceux de l’énergie, est devenu, dans ce début de campagne présidentielle, le symbole de l’argent magique distribué sans beaucoup de discernement pour calmer des colères qui pouvaient se propager. Il faut dire que les chèques envoyés hier s’ajoutent aux indemnités, qui visent à raboter le prix du gaz et de l’électricité à partir de l'année prochaine. Au total, plus de 10 milliards d’euros qui portent la hausse des dépenses de soutien à 21 milliards d‘euros en 2022.

Voilà en quelques chiffres comment l’Etat a cramé la caisse, selon l’expression violente de Valérie Pécresse. On ne reproche pas à l’Etat le fameux « quoi qu’il en coute » décidé au début de la pandémie qui a permis de soutenir les actifs de production et de relancer l’activité dès que le virus a pris du recul. Cet argent a permis de garder les actifs en état de fonctionnement, avec des résultats qui sont positifs, mais ce qu’on reproche à l’Etat et surtout au président de la République, c’est de ne pas avoir débranché assez vite « le quoi qu'il en coute », en cédant très rapidement aux revendications face à la pression des prix de l’énergie et de l’inflation.

Donc, entre les chèques qui tombent actuellement dans les boites aux lettres et ceux qui vont arriver en début d’année prochaine, on peut estimer que plus de 38 millions de Français auront été "arrosés" par des prestations exceptionnelles. En période électorale, ce n’est évidemment pas neutre. Et en période normale, ça revient à renforcer le caractère assisté de la société française. Avec quel argent demande l’opposition ? Avec de l‘argent emprunté et que décemment, on aura beaucoup de mal à rembourser.

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Au début du troisième trimestre, le gouvernement avait donc mis en place deux aides financières à destination des Français les plus modestes. L'une pour faire face à l'inflation, l'autre pour amortir la hausse des prix de l'énergie. Il fallait en urgence répondre à la grogne qui montait.

Pour payer les factures de gaz et d’électricité, le gouvernement avais annoncé à la mi-septembre une aide exceptionnelle de 100 euros à destination des 5,8 millions de ménages bénéficiant du chèque énergie. L’aide est donc en cours d’expédition aux bénéficiaires par la Poste ou alors directement par leur fournisseur.

Le chèque énergie est attribué en fonction des revenus et de la composition du ménage. Il permet de payer des factures d'énergie (électricité, gaz), d'acheter des combustibles (fioul, bois...) et de financer des travaux de rénovation énergétique. Un mois plus tard, alors que les prix du carburant atteignaient des sommets, une indemnité inflation a été promise à quelques 38 millions de Français gagnant moins de 2.000 euros nets par mois.

Cette aide-là, qui est, elle aussi, en cours de versement est destinée à tous : salariés, demandeurs d'emplois, étudiants boursiers, étudiants non boursiers bénéficiaires des aides au logement, retraités, bénéficiaires de minimas sociaux, etc.

Plus de 38 millions de bénéficiaires pour un total de 10,2 milliards de dépenses supplémentaires.  

Mais ce n’est pas tout. Ces opérations exceptionnelles s’ajoutent à toutes celles qui avaient été inscrites au budget 2022 et notamment : le cout du plafonnement du tarif de l’électricité, l’indemnité versée aux sociétés gazières pénalisées par le blocage des prix du gaz jusqu'à la fin 2022. Les sociétés gazières achètent plus cher le gaz à la Russie ou à l’Algérie mais ne peuvent pas se rattraper à la vente. D‘où l’intervention de l’Etat.

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En plus de toutes les mesures qui doivent protéger le pouvoir d’achat s’ajoutent les 3 milliards de crédit dédiés au plan d’investissement France 2030 pour financer les filières d’avenir et 1,2 milliard pour le plan compétences.

Pour beaucoup d’économistes, cet argent est inscrit au déficit budgétaire, lequel est financé par de la dette qu‘il faudra bien rembourser. D’où les sorties violentes des membres de l'opposition à Emmanuel Macron.

A Bercy, dans l’entourage de Bruno Le Maire, on ne s’inquiète pas outre mesure. La croissance est très forte et la reprise est beaucoup plus violente et rapide que ce que beaucoup avaient prédit et c’est vrai. On terminera l’année 2021 avec une croissance proche de 7 % et une prévision 2022 au même niveau.

En fait, pour beaucoup d’économistes, cette croissance est le meilleur moyen de rembourser l’emprunt, surtout quand cet emprunt a été signé à taux zéro ou presque. Ce raisonnement est celui que font beaucoup d’experts, à commencer par Jean Tirole, le prix Nobel d’économie.

Le stock de dette diminue de la différence entre ce que coute la dette (taux zéro) et ce que rapporte l’investissement financé par la dette, en l’occurrence le taux de croissance. En 2021, alors que le stock de dette a augmenté de 100 milliards, la part de l’endettement par rapport au PIB a baissé de 120% à 111%. Donc, la solvabilité de la maison France s’est améliorée, en même temps que des investissements ont été réalisés.

Ce raisonnement a évidemment du mal à être compris lors d’une campagne électorale. Le problème, c’est que ce logiciel ne peut fonctionner que si et seulement si le stock de dettes est figé. Il ne faut donc pas augmenter les dépenses de fonctionnement plus que les recettes. Or, sur 2021, on est encore loin du compte.

Enfin, ce type de raisonnement autorise le gouvernement à ne pas surveiller ses dépenses publiques et sociales et à donner le sentiment que l’ensemble de la population ou presque peut vivre avec des revenus de redistribution. Bref, cet « argent magique » donne l’impression de pouvoir vivre dans l’assistance généralisée. Tout se passe un peu comme si le pays était, avec la complicité de l’Etat, un peuple de rentiers, des bénéficiaires d‘une sorte de rente publique. Ce type de rente n’est évidemment ni perpétuelle, ni gratuite.

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