Guillaume Klossa : Il y a clairement une ambiguïté chez Marine Le Pen. Elle a évité le plus possible d’aborder le sujet européen car tout montre depuis 10 ans que l’UE a changé profondément pour s’adapter aux besoins des citoyens européens. Or tout son argumentaire est sur la nécessité de transformer l’Europe en une Alliance de nations ne disposant pas d’un droit commun s’imposant à tous, c’est-à-dire de règles communes. Elle est entrée dans une stratégie d’évitement. Elle dit donc ne plus vouloir sortir la France de l’Europe mais elle veut miner l’Europe de l’intérieur. La conséquence sera de créer une dynamique d’affaiblissement de l’Union au moment où cette dernière à besoin de s’affirmer comme puissance mondiale. Ce que propose Marine Le Pen, c’est donc un Frexit rampant. Ce n’est pas la sortie de la France de l’Union européenne, mais la denonciation progressive de tous les principes qui font la force de l’Union (règles communes, contribution financière solidaire, politiques communes dans des domaines ou l’efficacité des politiques nationales est limitée …), alors que la France a été au cœur de toutes les actions de renforcement de l’Union européenne depuis 70 ans et que l’intégration européenne est au cœur de l’identité politique du pays depuis 70 ans.

Pour Emmanuel Macron :

Guillaume Klossa : Emmanuel Macron ne s’est jamais présenté comme un fédéraliste européen. Il a en revanche défendu une vision consistant à dire que si la France veut peser, elle a intérêt à renforcer l’Union européenne car le monde change de manière rapide et brutale avec le renforcement des super puissances continent qui s’incarne dans la concurrence entre la Chine et les Etats-Unis. Durant son mandat, il a expérimenté les limites d’une action unilatérale de la France : au Liban, dans sa relation avec Trump, avec Poutine. Il a su aussi contribuer à mobiliser l’Union pour limiter les effets économiques et sociaux potentiellement désastreux de la crise du Covid grâce au plan européen de relance et mettre en œuvre une stratégie de production et de distribution de vaccins anti-covid efficace.

Le programme européen d’Emmanuel Macron est cohérent. Le grand sujet qui mériterait plus d’ambition, c’est la question de la démocratie européenne. Emmanuel Macron a évoqué le sujet lors de la présentation des priorités de la présidence française du Conseil de l’Union européenne en décembre. La conférence sur l’avenir de l’Europe doit faire des propositions concrètes le 9 mai prochain sur ce sujet, le président pourrait alors se les approprier s’il est réélu.