COVID-19 : il pèse sur les États-Unis et fait monter l’euro. Et que se passe-t-il en Allemagne ?<!-- --> | Atlantico.fr
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©KENA BETANCUR / AFP

Impact de la pandémie

Jean-Paul Betbeze décrypte et analyse les conséquences de la pandémie sur l'économie, sur les marchés financiers et sur les principales devises. Le coronavirus menace l'emploi et la reprise notamment aux Etats-Unis.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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1 – La montée de l’euro est explicable du fait de l’effet psychologique du COVID, qui est plus fort aux États-Unis qu’en zone euro : il y pèse plus vite et fort sur l’emploi et menace la reprise. On compte ainsi 245 000 nouveaux emplois en novembre aux États-Unis, bien au-dessous des 610 000 d’octobre et des 469 000 attendus et, en même temps, 235 000 nouveaux cas de COVID-19 le 4 décembre. La juxtaposition de ces chiffres montre l’effet de l’inquiétude qui demeure dans la consommation, les services, les magasins, les bars, le tourisme. Les emplois publics baissent de 99 000 de leur côté, mais l’industrie résiste (+27 000 emplois) et surtout la construction et les transports (+145 000 emploi). C’est le chômage des services atteints par le COVID-19 qui est, ici, présent. L’inquiétude détruit l’emploi bien plus vite qu’il ne s’en recrée, dans d’autres domaines des services et surtout avec plus de formation.

États-Unis : 245 000 nouveaux emplois mensuels en novembre

États-Unis : 235 000 nouveaux cas de COVID-19 le 4 décembre

2 – La montée de l’euro est explicable aussi par la politique de soutien extrême à l’activité que mènent et mèneront les États-Unis, à la suite de la politique de surchauffe de Trump, celle d’avant le COVID, qui se poursuivra, pour en réduire désormais les effets ! La politique américaine ne nous aide évidemment pas.C’est en effet dangereux pour la zone euro :l’euro est à 1,21 dollar, poursuivant sa hausse depuis son plus bas de mi-mai, où il était à 1,06 : + 14% ! Il a ainsi gagné 5% depuis janvier, certes un peu moins que le franc suisse (+8,2%) et le yuan (+6,5%). Pour les marchés, les États-Unis devraient donc repartir plus vite que la zone euro. L’OCDE vient de calculer que la contraction du PIB américain en 2020 devrait être de 3,7% (seulement) suivie d’une remontée de 3,3% en 2021 puis de 3,2% en 2022 : c’est mieux que la récession de -7,5% en 2020, suivie des timides reprises de +3,6 et de +3,3% en 2021 puis en 2022, en zone euro.

La baisse du dollar par rapport à l’euro vient de la poursuite acharnée de la politique des doubles déficits américains : déficit budgétaire : -15,4% du PIB en 2020, puis -11,6% en 2021 et -8,3% en 2022, contre -8,6%, - 8,5% et – 4,1% en zone euro, et surtout du déficit de la balance des comptes courants (respectivement : -3,4%, - 4% et -4,1%), alors que la zone euro est en excédent extérieur : 3%, 3,4% et 3,5%, du fait des exportations allemandes. Les États-Unis font jouer à leur déficit budgétaire et à l’acceptation de leur monnaie un rôle essentiel, contre euro et contre yuan, pour sortir au plus vite et au mieux de la crise du COVID-19.

3 - Les bourses valident cette politique américaine, et suivent. Bien sûr, tout ceci est risqué, car les valorisations sont déjà élevées ! Mais, a priori, les soutiens budgétaires vont continuer, même si un Sénat pro-Trump pourrait faire des difficultés devant de nouveaux programmes, mais il n’y a rien à craindre du côté de la Fed : elle achètera les bons du trésor. Les bourses américaines se disent donc que tout sera fait pour soutenir la croissance : à l’obsession « trumpienne » du Dow Jones succède celle, « bidenienne », du chômage, mais c’est pareil pour elles ! Donc les autres bourses remontent. En Allemagne elles se retrouvent au niveau de janvier, et réduisent leur retard pour le CAC 40, où la reprise économique est à la traîne. Seule la bourse anglaise est plus en difficulté, avec une croissance qui peine à repartir (4% en 2021 et 2022 après -11% en 2020), avec un déficit budgétaire de 17% du PIB en 2020, puis de 13 et de 9% et des déficits courants entre 2 et 3%.

4 - Les liquidités émises par les Banques Centrales des pays industrialisés permettent le financement sans problème de ces déficits budgétaires croissants. Le cas le plus complexe est celui de l’Italie, dont le coût nominal des emprunts continue de baisser, même si l’activité est en panne et la déflation menace, ceci du fait du soutien assuré de la BCE qui veut soutenir ce pays bien sûr, ce qui veut dire ses banques. Le processus durera des années, passant par l’Union Bancaire. Le cas le plus intéressant est celui de la Chine, à suivre, où les taux nominaux des prochaines émissions vont baisser. Le cas le plus problématique est celui des États-Unis, où la baisse du dollar fait monter l’inflation importée, donc les taux nominaux, sachant que le déficit budgétaire ne cesse de se creuser. Le risque majeur est celui de la montée des taux longs américains, avec l’effet conjoint du COVID-19 et des politiques économiques de ce pays.                         

5 - La venue du vaccin est moins favorable à l’or refuge, tandis que la croissance chinoise fait toujours monter le soja. Le Brent, même s’il essaie de stabiliser son niveau à l’OPEP, peut difficilement remonter, du fait du niveau faible de la reprise mondiale qui retrouverait en 2022 son niveau de 2019 et des politiques d’économies d’énergie et de recherches d’énergies renouvelables.

6 - La question majeure pour la France est celle de sa reprise, comparée à celle de l’Allemagne. Elle reste plus affectée par le virus, mais a moins de cas ces derniers jours – une surprise dont on ne parle pas ! L’Allemagne, en effet, a été moins touchée par le COVID-19 et devrait mieux repartir, notamment par l’exportation, que la France, toujours handicapée en termes de compétitivité. L’étonnante nouveauté est en effet la baisse des cas de virus en France comparée à sa remontée en Allemagne. Pourquoi ? Avec quelles mesures et quels effets pour la faire baisser ?

France : autour de 11 000 nouveaux cas quotidiens (Worldometer)

Allemagne : autour de 22 000 nouveaux cas quotidiens (Worldometer)

Les marchés financiers traitent trop classiquement cette pandémie, à soigner avec des déficits budgétaires et des soutiens monétaires : ils passent à côté des restructurations qu’elle implique, dans la production et dans la consommation. En effet, ils ne traitent pas le contexte géopolitique actuel et moins encore les nouveaux comportements d’investissement, de production et d’achat qui peuvent en venir. Le post-COVID n’existe pas…encore : on ne sait à quoi il ressemblera !

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