L'antisionisme est la marque des pires régimes totalitaires<!-- --> | Atlantico.fr
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Un immeuble dont la façade est recouverte d'étoiles de David peintes pendant la nuit, dans le quartier d'Alésia à Paris, le 31 octobre 2023
Un immeuble dont la façade est recouverte d'étoiles de David peintes pendant la nuit, dans le quartier d'Alésia à Paris, le 31 octobre 2023
©Geoffroy VAN DER HASSELT / AFP

Hier comme aujourd'hui

C'est de toute évidence Staline qui instaura l'« antisionisme » comme une doctrine politique, lui qui avait pourtant soutenu en 1948 la refondation d'un État juif sur le sol ancestral du peuple d'Israël mais, il faut le dire, pour des raisons stratégiques inhérentes aux prémices de la Guerre froide.

Frédéric Sroussi

Frédéric Sroussi

Frédéric Sroussi est journaliste et essayiste.
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Le problème survint lorsque le dictateur soviétique s'aperçut que les Juifs de son pays n'avaient pas oublié leurs vibrantes racines religieuses et culturelles revitalisées par la renaissance d'un État hébreu sur la terre biblique d'Israël. L'enthousiasme suscité chez les Juifs soviétiques par l'arrivée de Golda Meir, en 1948, au poste de première ambassadrice d'Israël finit de convaincre Staline que ses efforts de déjudaïsation forcée des communautés juives de son empire n'avaient pas encore abouti à l'ethnocide programmé par son régime. L'antisémitisme stalinien s'était déjà constitué en machine de mort puisque Staline fit assassiner entre 1948 et 1952 une vingtaine de membres du Comité antifasciste juif (composé d'artistes et d'intellectuels). Mais c'est en 1952, lors du « procès Slánský », comme le rappelle Pierre-André Taguieff -  que l'accusation de « complot sioniste » vit le jour pour la première fois (onze des quatorze accusés à tort étaient comme par hasard Juifs et furent exécutés). Dès 1963, l'abjecte équivalence : sionisme = racisme, fascisme et nazisme, vit le jour dans la littérature officielle de l'URSS.
Par la suite, après la défaite cuisante des armées coalisées arabes soutenues par Moscou lors de la Guerre des six jours (1967), l'URSS, humiliée, décida de répandre avec encore plus d'outrance sa propagande antisioniste/antisémite grâce à la puissance de sa néfaste diplomatie et du KGB. Il est particulièrement intéressant de noter ce que Victor Fay (homme politique de gauche, journaliste et résistant) écrivit en septembre 1967 dans Le Monde diplomatique au sujet de l'antisionisme/antisémitisme en U.R.S.S.  L'article de Fay est d'une incroyable actualité, il est intitulé Le problème juif en Union soviétique, il dit : « La violente campagne que mènent la presse et la radio soviétiques contre l'Etat d'Israël a, par la force des choses, attiré l'attention de l'opinion publique mondiale sur la situation des Juifs en U.R.S.S. Il est vrai que jamais les juifs, en tant que tels, n'ont été nommément attaqués dans ce pays [...]. Mais certains dessins, certains articles, de caractère anti-israélien et antisioniste, par leurs excès mêmes (accusation de génocide, comparaison avec les nazis), prêtent à confusion et permettent un facile transfert de l'Israélien -  « agresseur des pays arabes » et « agent de l'impérialisme américain » au juif qui manifeste sa solidarité et son soutien à l'Etat d'Israël. » 
Édifiant ! Le recyclage de la rance et datée propagande soviétique par les Jean-Luc Mélenchon, Fabien Roussel, Vladimir Poutine, Mahmoud Abbas et consorts, pourrait prêter à rire si la situation n'était pas aussi grave pour les Juifs du monde entier et pour les démocraties occidentales. 
L'acmé de cette politique antisioniste/antisémite de Moscou fut atteinte lorsqu'en 1975 l'URSS orchestra l'infâme vote qui mena à la résolution 3379 de l'assemblée générale de l'ONU (déjà elle !) qui classa le sionisme parmi les « racismes » .
Mais, ce dont on parle bien moins est l'antisionisme nazi. Évidemment, le fait que l'État d'Israël fut refondé trois ans après la fin du pire régime que l'humanité ait produit explique pourquoi l'histoire s'est beaucoup moins intéressée à cet aspect de l'antisionisme/antisémitisme. Il n'empêche ! L'idée d'un retour du Peuple juif sur sa terre a été copieusement moquée par l'idéologue en chef du Troisième Reich, le tristement célèbre Alfred Rosenberg. Ce qui est intéressant de noter c'est que Rosenberg exécrait le sionisme pour la raison totalement inverse à la détestation absolue qu'ont les wokistes vis-à-vis du sionisme aujourd'hui .En effet, ces derniers « accusent », avec une ignorance crasse , les «sionistes»(donc les Juifs) d'être «des colonialistes blancs venus d'Europe» alors que Rosenberg - à la suite du célèbre philosophe antisémite allemand Eugen Dühring - déplorait quant à lui que les Juifs et donc les sionistes étaient originaires d'Asie (ce qui est vrai !) ;  il écrivit : « Le sionisme n'est qu'un aspect du Panasiatisme » (« Zionismus sei nur ein Teilgedanke des Panasiatisme ») » (A. Rosenberg; Le Mythe du XXe siècle, 1935). 
Il faut ajouter que le terme «Panasiatisme» ne repose sur aucune réalité politique ou culturelle. Voici ce que dit encore le chef de la propagande nazie concernant le sionisme : « Du sionisme [...] en même temps une liaison spirituelle et politique conduit à l'idée du bolchevisme rouge. Le sioniste Holitscher a vécu à Moscou le parallèle intérieur entre Moscou et Sion, et le sioniste F. Kohn déclare qu'une seule ligne conduit des Pères fondateurs jusqu'à Karl Marx, à Rosa Luxemburg et à tous les bolcheviks juifs qui ont servi «la cause dans la liberté ». 
Quand on sait que les antisionistes, depuis la fin des années 1960 jusqu'à aujourd'hui, s'appuient sur le marxisme pour « dénoncer » le sionisme, c'est un peu fort de café ! Nous pouvons dire que le « sionisme » équivaut à la définition de la phobie dans la nosologie lacanienne : « un signifiant à tout faire » ! 
Rosenberg ajoute au sujet du sionisme  qu'il est « une tentative (des Juifs) pour construire une communauté organique de paysans, de philosophes, de guerriers et d'hommes d'État juifs contredit tous les instincts de cette anti-race et elle est à priori condamnée à l'effondrement ».
Le philosophe et écrivain Jean-Pierre Faye écrivit à ce sujet en 1974  : « Par la description qu'il (Rosenberg) en donne (du sionisme), on peut même voir de quelle façon dans l'apocalypse hitlérienne, un certain délire «antisioniste» alimente la démence antisémite.» (Migrations du récit; Sur le Peuple juif).
C'est ainsi qu'il en va du sionisme, il a toujours été honni par les pires totalitarismes : de l'hitlérisme au stalinisme sans oublier évidemment l'islamisme. 
L'antisionisme est donc le révélateur - au sens photographique du terme - de la nature d'un régime politique, d'un parti politique mais aussi de la morale individuelle.

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