8 milliards d’habitants sur Terre ? Pourquoi il est en fait impossible de savoir combien nous sommes vraiment<!-- --> | Atlantico.fr
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Sur cette photographie prise le 31 octobre 2022, des fidèles se rassemblent pour adorer le soleil sur les rives de la rivière Yamuna lors du festival hindou de Chhath Puja à la périphérie de New Delhi.
Sur cette photographie prise le 31 octobre 2022, des fidèles se rassemblent pour adorer le soleil sur les rives de la rivière Yamuna lors du festival hindou de Chhath Puja à la périphérie de New Delhi.
©MONEY SHARMA / AFP

Population mondiale

La population mondiale s’apprête à atteindre un nouveau palier record, selon le dernier rapport du département spécialisé des Nations unies. La population mondiale continue de croître, notamment en Inde. La Terre pourrait compter plus de 10 milliards d'habitants en 2080.

Atlantico : Les Nations-Unies prédisent que la population mondiale franchira le cap des 8 milliards vers le 15 novembre. Ce constat est-il juste ?

Laurent Chalard : Il faut savoir qu’à chaque fois que l'on franchit le cadre d'un milliard d'habitants supplémentaires tous les 10-15 ans en moyenne, l'ONU fait une conférence de presse pour dire tel jour on a franchi le cap. On a vu la même chose pour les 7 milliards d'habitants et pour le cap des 8 milliards d'habitants on nous dit que cela aura lieu le 15 novembre 2022. Cependant bien évidemment tout cela repose uniquement sur les modèles de projection utilisés par l'ONU. 

Ça relève plus d'une opération de communication de la part de l'ONU, de l'institution qui s'occupe de la démographie à l'ONU que d'un réel résultat statistique. Ce qu'il faut savoir c'est que la population de la planète n’est pas connue à l'unité précise, on a une marge d'erreur de plusieurs centaines de millions d'habitants. On ne sait pas exactement parce que on a de nombreux pays pour lesquels il n'y a pas de recensement de la population. Par exemple en Afrique subsaharienne soit parce que ce sont des pays en guerre soit parce qu’il n’y a pas les moyens de faire son population. Il y a d'autres pays où le recensement de la population est trop ancien. L'exemple type c'est la République démocratique du Congo car les derniers recensements datent de 1984 donc depuis on fait des projections démographiques. Sachant que c'est un pays qui a connu plusieurs guerres civiles donc la population du la RDC c'est une extrapolation mais on ne sait pas il y a combien d'habitants. 

Un autre élément aussi c'est qu'il y a des pays où il y a des recensements réguliers et cependant les chiffres peuvent être manipulés. Ils peuvent être manipulés pour différentes raisons, soit parce qu’on aime bien afficher plus d'habitants parce que plus d'habitants rime avec plus d'aide au niveau international mais aussi parce que c'est un enjeu de répartition du pouvoir. Quand on est dans des états multiethniques on a tendance à mettre un nombre d'habitants équivalents entre chaque ethnie alors que souvent ce n’est pas le cas ce qui fait qu'il peut y avoir des surestimations de la population. Quand on prend en compte ces différents éléments par pays, ça sous-entend qu’au niveau mondial on a une marge d'erreur qui n'est pas négligeable. Dire que la population mondiale a franchi les 8 milliards d'habitants le 15 novembre 2022 n'a aucun sens c'est juste une opération de communication de l'ONU pour faire prendre conscience aux décideurs internationaux que la population mondiale continue d’augmenter.

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Avec quelle évolution des équilibres démographiques ?

La croissance démographique aujourd'hui est très différente selon les pays et selon les continents. On a un certain nombre de continents qui ont terminé leur transition démographique c'est à dire que l'indice de fécondité est aujourd'hui égal ou inférieur au seuil de remplacement des générations qui est de 2,1 enfants par femme. C'est le cas bien évidemment de l'Europe qui a été le continent précurseur dans la baisse de la fécondité. C'est le cas de l'Asie et de l'Amérique qui sont autour de ces seuils de remplacement des générations alors qu'il y a un continent qui lui reste très largement au-dessus de ce seuil de remplacement de génération qui est l'Afrique. Ça sous-entend quoi qu'en fait on a une croissance démographique qui très faible en Europe voir même avec une diminution de la population ces dernières années. On a une croissance démographique qui se ralentit fortement sur le continent américain et en Asie et puis l'Afrique ou la croissance démographique reste encore très soutenue parce que on a des indices de fécondité qui eux sont très largement supérieurs au seuil de remplacement des générations. Bien évidemment ça a un impact en termes de croissance aujourd'hui une large partie de la croissance démographique mondiale est assurée par la croissance africaine.

On voit néanmoins que le taux de fertilité baisse depuis 1960 et donc la natalité baisse. Allons-nous vers un inversement de la courbe démographique ? Si oui, à quel horizon ? 

La grande inconnue aujourd'hui c'est jusqu'à quel niveau la fécondité mondiale va baisser. Il faut savoir qu'aujourd'hui on est sur une fécondité mondiale qui est proche du seuil de remplacement de génération -peut-être déjà d'ailleurs au même niveau-. Il faut bien garder en tête que les données que l'on a ont toujours un décalage temporel par rapport à la situation actuelle. Il y a beaucoup de pays où les données de fécondité qui sont appliquées dans les modèles sont des données de fécondité du milieu des années 2010. Or entre-temps là fécondité a pu diminuer de manière. Officiellement on est encore au-dessus du seuil de remplacement génération autour de de 2,3 enfants par femme mais peut-être qu'en fait on est déjà à 2,1 enfants par femme au niveau mondial. 

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La seule certitude c'est qu'il diminue régulièrement et l'interrogation c'est de savoir jusqu'à quelle niveau la fécondité va diminuer au niveau mondial. Est-ce qu’une fois qu'on sera arrivé autour de 2,1 enfants par femme on va avoir une stabilisation de ce niveau de fécondité au niveau mondial ? Où est-ce qu'on va avoir une baisse très largement en dessous sur le modèle de ce qui se passe dans la plupart des pays développés de la planète ou on a des taux de fécondité qui peuvent être très largement inférieurs aux 1,5 enfants par femme. 

En fonction de l'évolution du niveau de fécondité on peut avoir des scénarios très différents d’évolutions de la population mondiale. Selon les dernières projection démographique 2022 suivant si vous retenez l'hypothèse de fécondité à plus ou moins 0,5 enfant par rapport au niveau de fécondité actuel -c’est peu probable- on aurait une population mondiale qui serait supérieure à 14 milliards d'habitants. Mais inversement si on est à 0,5 enfants par femme en dessous de ce qu'on a actuellement on aurait une population mondiale qui serait autour de 6 milliards d'habitants. À plus ou moins 0 50 fois par femme vous êtes dans une population qui varie du simple au double, entre 6 milliards et 14 milliards. Suivant le scénario retenu la population mondiale peut continuer à augmenter ou elle peut diminuer. 

Qu’est-ce qu’impliquerait une baisse de la démographie dans le monde, les conséquences qui en découleront seront-elles plutôt positives ou négatives ?

Il faut bien comprendre que selon le scénario moyen la population mondiale donc de l'ONU devrait continuer de croître jusqu'à approcher des 10 milliards d'habitants et commencerait à légèrement diminuer vers la fin du 21e siècle vers 2090 suivant le scénario médiant. En revanche selon des scénarios de baisse plus rapide, la population mondiale pourrait diminuer dès 2060 voire 2050. Ça veut dire qu’aujourd’hui la diminution de la population mondiale c'est une perspective qui à long terme parait crédible ce qui n’était pas le cas encore il y a une trentaine d'années. 

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Oui évidemment ça serait une bonne nouvelle parce qu'on sait très bien que la très forte croissance démographique de la planète a énormément pesé sur comment sur les ressources naturelles de la planète qui sont limitées. La planète ne peut pas non plus supporter une croissance exponentielle de la population donc à ce niveau-là c'est une première. 

Une deuxième bonne nouvelle parce que qui dit moins d'habitants dit une moyenne d'habitants plus riche. On sait très bien que quand on a une croissance très importante ça empêche l'augmentation du niveau de vie de la population puisque le même gâteau doit être partagé par plus de personnes. On sait très bien que si la population se met à baisser ça devrait conduire à l'augmentation du niveau de vie en particulier des populations les plus pauvres à l'échelle mondiale. 

Après à l'échelle des continents c'est très différent parce que on n'aurait pas du tout des évolutions semblables selon les continents. On aurait une baisse très importante dans les pays ou la fécondité est déjà très faible comme l'Europe où l'Asie orientale. Et inversement une hausse une population continuait d'augmenter sensiblement en Afrique. Au niveau des continents la baisse ne s’interprèterait pas forcément de la même manière et pour être considérée comme problématique dans des pays où il n’y a rien à un affaissement trop important de la fécondité ce qui entraînerait des problèmes de manque de main-d'œuvre. Ce que connais bien évidemment l'Europe mais ce que pour reconnaître aussi à terme la Chine. 

Localement il faudra bien mesurer l'impact de de ces évolutions qui dans un second temps pourrait s'avérer négatif.

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