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Les dangers sanitaires de l'alimentation proposée par la grande distribution et l'industrie agroalimentaire
©DAMIEN MEYER / AFP

Bonnes feuilles

Périco Légasse, défenseur de la gastronomie française, et Serge Papin, ancien patron de Système U, viennent de publier "Du panier à l'assiette, alimentation, grande distribution, agriculture... Pour en finir avec la malbouffe !" aux éditions Solar. Ils reviennent notamment sur les scandales alimentaires à répétition, dévoilent les coulisses de la guerre des prix entre les grandes enseignes, évoquent la détresse des agriculteurs et retracent le déclin des hypermarchés. Les deux auteurs se demandent notamment si la grande distribution et le bien-être alimentaire sont définitivement irréconciliables. L'échange entre Périco Légasse et Serge Papin a été animé par Elodie Lepage, journaliste santé à L'Obs. Extrait 1/2

Périco Légasse

Périco Légasse

Périco Légasse est journaliste et critique gastronomique. Il est aujourd'hui rédacteur en chef de la rubrique "art de vivre" à l'hebdomadaire Marianne.

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Serge Papin

Serge Papin

Serge Papin a dirigé pendant treize ans le groupement coopératif Système U. Il est notamment l'auteur de Et maintenant, on fait quoi (Le Cherche Midi, 2014) et Pour un nouveau pacte alimentaire (Le Cherche Midi, 2012), Consommer moins, consommer mieux avec Jean Marie Pelt (éditions Autrement, 2009).

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Depuis quelques années, de plus en plus d’études alertent sur la corrélation entre alimentation ultra-transformée (AUT) et certaines pathologies : cancers, maladies neurodégénératives, obésité, diabète de type 2. La dernière en date, publiée par l’Inserm mi-février, a fait grand bruit. Le système de la grande distribution, qui a grandement encouragé le passage d’une alimentation essentiellement constituée de produits bruts à une alimentation majoritairement composée d’aliments transformés, favorise-t-il la consommation de produits nocifs ?

Serge Papin : Ce sujet demande de prendre de la hauteur. Notre alimentation a considérablement évolué ces cinquante dernières années, et cette évolution présente des aspects à la fois positifs  et négatifs. Nous consommons aujourd’hui beaucoup de produits agroalimentaires dont la qualité sanitaire n’a cessé de s’améliorer grâce aux progrès de l’industrie agroalimentaire en matière d’hygiène. Plus personne ne s’en souvient, mais les premières conserves et les premiers aliments transformés étaient beaucoup moins « sûrs » que ceux d’aujourd’hui. Les processus de stérilisation étaient moins perfectionnés, les microbes et les bactéries moins bien neutralisés, et les intoxications alimentaires beaucoup plus fréquentes. Autrefois, des gens mouraient du botulisme ; de nos jours, cette maladie a disparu. L’augmentation continue de l’espérance de vie témoigne de ces progrès, même si d’autres facteurs y contribuent. Les produits de l’industrie agroalimentaire suscitent pourtant une extrême méfiance aujourd’hui. Comment expliquer cette situation ? Le problème est qu’ils contiennent des substances dont la toxicité est désormais soit établie, soit suspectée – ce qui revient au même dans l’esprit des gens. Ces substances, le consommateur commence à les connaître, ce sont les additifs, les colorants, les conservateurs, les exhausteurs de goût, les acides gras trans… Je suis d’autant plus à l’aise pour parler de ce sujet que je me suis battu chez Système U pour les bannir des produits de notre marque de distributeur – nous en reparlerons plus tard. Pourquoi l’industrie y a-t-elle recours ? Parce que ces substances permettent de fabriquer de façon standardisée des produits de longue conservation peu onéreux et visuellement alléchants, les produits qui correspondent aux attentes des clients. Maintenant, je pose la question : à qui la faute si le consommateur, quand il rentre chez lui le soir, préfère décongeler vite fait un plat cuisiné plutôt que de se préparer un repas à base d’aliments bruts et sains ? À qui la faute s’il préfère acheter une pâte à tarte toute prête ou une soupe en brique plutôt que de faire sa propre pâte ou sa propre soupe ? À la grande distribution ? À l’industrie agroalimentaire ? Qui est coupable dans tout ça ?

Périco Légasse : Serge vient de soulever des questions fondamentales. Mais je tiens, au risque de le contrarier, à préciser une chose avant de continuer : la malbouffe n’a jamais autant tué.

Les dégâts sanitaires qu’elle provoque sont considérables. L’espérance de vie a d’ailleurs cessé d’augmenter dans les pays occidentaux ces deux dernières années. Quant à l’espérance de vie en bonne santé, elle est de plus en plus basse. Serge a pourtant raison sur un point, la qualité purement sanitaire des produits alimentaires a fait des progrès énormes ces dernières décennies. Nous pouvons même considérer que la connaissance scientifique des processus d’hygiène alimentaire a atteint un niveau de quasi-perfection. Où le bât blesse-t-il alors ? Chimiquement modifiée, bourrée de pesticides, trop grasse, trop sucrée, trop salée, l’alimentation moderne, ultra-transformée, nous empoisonne à petit feu, favorisant l’expansion continue, dans les pays occidentaux, de maladies comme l’obésité, le diabète de type 2, la maladie du soda ou la « NASH » (stéatose hépatique non alcoolique), cette pathologie du foie précisément surnommée « maladie de la malbouffe ». L’homme de ce début de xxie siècle meurt de manger les aliments ultra-transformés dont le gave l’industrie agroalimentaire depuis trente ans ! Rappelons que 88 % des Français se nourrissent exclusivement en grande surface, et que les cancérologues – je cite là des estimations du professeur Khayat – considèrent que 60 % des cancers sont d’origine environnementale, et parmi eux, 80 % d’origine alimentaire.

Extrait de "Du panier à l'assiette, alimentation, grande distribution, agriculture... Pour en finir avec la malbouffe !", de Serge Papin et Périco Légasse, aux éditions Solar

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