Ecoutes Sarkozy : et si l’arrêt de la Cour de cassation redonnait du tonus à l’ancien chef de l’Etat pour la présidentielle ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Nicolas Sarkozy alias Paul Bismuth.
Nicolas Sarkozy alias Paul Bismuth.
©Reuters

Dos au mur

L’arrêt de la Cour de cassation qui valide les écoutes visant Nicolas Sarkozy est un revers pour l’ancien président de la République. A moins d’un coup de théâtre, il pourrait être renvoyé devant un Tribunal pour corruption et trafic d’influence. Mais l’homme est un battant qui adore l’adversité. Est-ce à dire qu’il va repartir de plus belle pour la primaire de novembre 2016 ?

Gilles Gaetner

Gilles Gaetner

Journaliste à l’Express pendant 25 ans, après être passé par Les Echos et Le Point, Gilles Gaetner est un spécialiste des affaires politico-financières. Il a consacré un ouvrage remarqué au président de la République, Les 100 jours de Macron (Fauves –Editions). Il est également l’auteur d’une quinzaine de livres parmi lesquels L’Argent facile, dictionnaire de la corruption en France (Stock), Le roman d’un séducteur, les secrets de Roland Dumas (Jean-Claude Lattès), La République des imposteurs (L’Archipel), Pilleurs d’Afrique (Editions du Cerf).

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Juppé. Fillon. Copé. Le Maire. Et les autres. A coup sûr, ces derniers ne sont sans doute pas mécontents de l’arrêt de la Cour de cassation de ce 22 mars qui valide le placement sous écoutes de Nicolas Sarkozy, son avocat, Me Thierry Herzog et l’ancien haut magistrat Gilbert Azibert. Sans doute, ces candidats à la primaire de novembre 2016 se fendront-ils, là d’un communiqué, ici d’un coup de fil affectueux à Nicolas… Lequel ne sera pas dupe d’une façon de faire assez courante en politique. Surtout lorsqu’on est membre du même parti. En revanche, la réaction du bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris, Frédéric Sicard, est sans ambiguïté, lui qui déclare au Monde : "A vouloir courir à tout prix derrière Nicolas Sarkozy, les juges ne se rendent pas compte qu’ils portent atteinte à la démocratie". De quoi donner un peu de baume au cœur à son illustre confrère, mais à mettre de l’huile sur le feu et irriter les hauts magistrats.

Quoiqu’il en soit, voici l’instruction des juges Claire Thépaut et Patricia Simon, "ces deux dames", comme les avait appelées l’ancien chef de l’Etat, totalement validée. Tout comme est validé l’arrêt de la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris du 7 mai 2015.

Ainsi donc, la chambre criminelle de la Cour de cassation a estimé que les fameuses écoutes, étalées entre fin janvier et début février 2014, où l’on entendait Me Herzog dire notamment à Azibert que Nicolas Sarkozy allait s’occuper de lui pour lui trouver un poste au conseil d’Etat à Monaco ne devaient pas être annulées. Ce poste constituait une sorte de bonne manière faite au magistrat qui, de son côté, s’activait pour savoir où en était la procédure à la Cour de cassation visant à la restitution des carnets Bettencourt. Une restitution à laquelle tenait Nicolas Sarkozy… Las ! Les juges Serge Tournaire et René Grouman, qui enquêtaient depuis 2013 sur le financement présumé par la Libye de la campagne présidentielle de Sarkozy de 2007, avaient mis sur écoutes Sarkozy et son avocat… Et ils sont tombés, tout naturellement, sur ces échanges téléphoniques destinés à demeurer secrets. A preuve, cette découverte qui avait intrigué les enquêteurs : pour éviter d’être identifié, Sarkozy avait loué un portable au nom de Paul Bismuth… qui n’était autre que le nom d’un copain de lycée de Thierry Herzog. Me Patrice Spinosi, l’avocat de Nicolas Sarkozy, a eu beau soutenir lors de l’audience à la chambre criminelle de la Cour de cassation que la chambre de l’instruction de Paris, dans son arrêt du 7 mai 2015, donnait "des réponses brouillonnes, souvent erronées, régulièrement contradictoires" [sur ces écoutes], il n’a finalement pas été entendu. La haute juridiction a en effet estimé que "le contenu des écoutes révèle des indices de participation à des faits susceptibles de qualification pénale". Il est clair que cette décision du 22 mars est embêtante pour Nicolas Sarkozy. Car, à moins d’un coup de théâtre, son renvoi devant un tribunal correctionnel semble inévitable. Il est clair aussi que sa mise en examen le 1er juillet pour corruption et trafic d’influence a une connotation particulièrement forte…Il risque, s’il est renvoyé devant le Tribunal, jusqu’à dix ans de prison. Sans oublier une peine d’inéligibilité, ce qui serait gênant si le procès survenait en 2017. Encore qu’il serait pour le moins discourtois et inédit que l’audience se tienne lors de l’année présidentielle.

Bref, cette affaire n’a rien à voir avec un recel d’abus de biens sociaux ou un financement politique illicite, comme c’est le cas dans l’affaire Bygmalion. Nicolas Sarkozy, qui est avocat, ne l’oublions pas, ne l’ignore pas. Cette nouvelle épreuve est celle qu’il ne devait pas avoir à subir. Surtout après son non-lieu dans l’affaire Bettencourt ou dans le dossier de l’amende liée au dépassement de sa campagne présidentielle. Reste évidemment l’histoire du financement présumé de Sarkozy par la Libye, origine indirecte de sa nouvelle déconvenue. Pourtant, celle-ci, partie comme une fusée entre les deux tours de la présidentielle de 2012 - avec la révélation par Mediapart d’un document signé de l’ancien chef des services secrets de Kadhafi affirmant que Sarkozy avait perçu 50 millions d’euros - semble se hâter lentement. Ultime question : l’arrêt de la Cour de cassation va-t-elle freiner les ardeurs de l’ancien président de la République dans sa course à la primaire ? L’ancien maire de Neuilly n’est jamais aussi tenace que quand il subit un revers. Alors, MM. Juppé, Le Maire, Fillon et Copé, ne l’oubliez pas.

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