Budget France : Déficit moins élevé, dette publique moins lourde que prévue. Les trois raisons pour lesquelles l’endettement public n’est pas dangereux<!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron et le ministre de l'Economie Bruno Le Maire visitent une usine du fabricant Valeo, le 26 mai 2020.
Emmanuel Macron et le ministre de l'Economie Bruno Le Maire visitent une usine du fabricant Valeo, le 26 mai 2020.
©Ludovic MARIN / AFP

Atlantico Business

Dénoncer l’endettement public est devenu le sport à la mode des opposants à Emmanuel Macron. Or, les chiffres de l’endettement sont moins graves que ce que l’on a dit et surtout, il existe de bonnes raisons de penser que cet endettement n’a rien d’explosif.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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A écouter les candidats à la présidentielle en cette veille du premier tour, on a l’impression que la seule idée qui leur reste pour émouvoir l’opinion est de dénoncer le « gouffre du déficit public » et la montagne des dettes souscrites par l’Etat. A droite comme à gauche, l’erreur la plus grave qu’aurait faite Emmanuel Macron aurait été de payer son quinquennat à crédit. A croire qu’ils ont tous retrouvé le logiciel de la rigueur que Raymond Barre utilisait pour sortir le pays de la crise pétrolière ou celui d’Édouard Balladur pour nous guérir du laxisme de François Mitterrand ou même celui que François Fillon proposait quand il a été candidat à la présidentielle contre François Hollande.

Bref, le déficit public fait peur et la dette inquiète. Rapportée à ce qu‘il était au début du quinquennat, les chiffres sont bien sûr inquiétants et marquent un dérapage assez peu contrôlé. Sauf qu’on oublie deux choses.

On oublie très vite qu‘une grande partie de ces dettes nous ont permis de nous sortir de la crise des gilets jaunes. Et surtout des effets de la pandémie. Pendant le Covid, l’Etat a choisi de protéger les actifs de production et les contrats de travail pour conserver la capacité du système de production de rebondir à la sortie. Et ça a marché parce qu’il existe peu de responsables politiques qui considèrent aujourd'hui que « le quoi qu’il en coute », mis en musique par Bruno Le Maire à Bercy, aura été un poison mortel.  En revanche, ils pensent que le financement du poison administré avec des doses de cheval s’avèrera très dangereux. Donc on verra, mais « les malades de la crise », gavés de dettes, ne sont pas à l’article de la mort.

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Sauf qu'on a découvert hier, que les comptes publics ont beaucoup mieux résisté à la crise sanitaire l’an dernier que ce qu’on avait prévu. On s’attendait, y compris dans les sphères officielles - Bercy et Banque de France - à un déficit public de 9,4 % en 2021, puis vers septembre à 8%. Or, l’année budgétaire s’est terminée à 6,5 %. Quant à l’endettement global, tout le monde se faisait peur avec une toise à 120% du PIB, une catastrophe comme le prédisait Madame Pécresse, la réalité est que l’endettement s’est calmé à hauteur de 112,9 %.

Nous ne sommes pas, pour autant, au creux du lit d’un grand fleuve tranquille. 2022, avec la guerre en Ukraine, peut détériorer cette mécanique d’assainissement, mais les chiffres qui viennent de sortir présentent assez peu de danger. Et cela pour trois raisons.

La première, c’est que cette amélioration traduit la puissance de la reprise économique l’année dernière, dès que le virus a eu le dos tourné puisque les recettes fiscales et parafiscales ont progressé plus vite que la croissance. Les recettes ont augmenté de 8,4% alors que la croissance du PIB a été de 7,9%. Ce qui prouve, qu‘en dépit de tous ses défauts, que le système économique français a non seulement une grande résilience, mais qu’il a aussi une grande productivité fiscale, alors que les impôts de production ont été rabotés et la taxe d’habitation supprimée. Du côté des cotisations sociales, les recettes ont été abondantes grâce à l’emploi. Le paradoxe, dans cette affaire, c’est qu’en dépit des baisses de taux d‘imposition, la productivité fiscale globale fait que le taux des prélèvements obligatoires n’a pas baissé. Ça veut dire qu’il a y encore des marges de baisses de taux d’imposition.

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La deuxième raison, pour rester zen sur le risque de l’endettement public, est de savoir que ces dettes ont été contractées à taux d’intérêt zéro (et moins) pour une maturité de 10 à 15 ans, parfois plus. Alors une entreprise qui a l’occasion de se financer à taux zéro pendant aussi longtemps ferait une grave erreur de s’en priver. D’abord, parce que ça n’est pas cher et ensuite, parce que la croissance sera en moyenne bien supérieure à zéro ou alors c’est la fin du monde. Si la croissance économique est de 2 % par an en moyenne, il faut savoir que mécaniquement le stock de dettes se réduit de 2% avec un taux d’emprunt contracté à Zéro.  

Ces conditions sont fondamentalement différentes de ce qu’elles étaient avec Raymond Barre, Édouard Balladur ou même François Fillon.

La troisième raison sera plus difficile à vérifier. Le modèle actuel de gestion de la dette publique ne peut fonctionner que si les taux restent bas, si la croissance reste forte et si les dépenses publiques courantes n’obligent pas l’Etat à s’endetter davantage.

Les taux resteront bas si on réussit à générer des gains de productivité qui existent actuellement (grâce au digital), si l’Allemagne confirme son changement de politique économique amorcé avec la guerre d’Ukraine, avec plus de dépenses publiques et moins de compétitivité liée à une énergie plus chère. Les taux resteront bas, si on a la sagesse de protéger Me Lagarde à la présidence de la BCE car son remplacement, par un Hollandais par exemple, ne nous garantit pas le maintien d’une politique monétaire aussi accommodante.

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La croissance restera forte si on réussit à sortir de la guerre d’Ukraine sans trop de blessures, c’est à dire avec une Europe plus solidaire sur tous les plans.  Il va falloir gérer la transition énergétique de façon responsable, c’est à dire avec un mix énergétique à dominante nucléaire, ce qui est projeté.

Mais le plus difficile pour se protéger d’une éventuelle hausse des taux sera de s’empêcher des endettements pour couvrir les dépenses courantes c’est à dire, les dépenses sociales et les dépenses de fonctionnement de l’administration (essentiellement les rémunérations de fonctionnaires).

La botte secrète pour se protéger d’un endettement insupportable est à ce niveau.

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