Alors que le gouvernement veut privilégier le télétravail, beaucoup de patrons sont encore réticents et les salariés ont envie de revenir au bureau<!-- --> | Atlantico.fr
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©LOIC VENANCE / AFP

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41% des dirigeants sont encore réticents au télétravail... Quant aux salariés qui ont « adoré le travail à domicile », certains en ont marre et veulent retrouver le bureau ou alors leurs voisins de bureau.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les nouvelles réalités du travail risquent de surprendre tous ceux qui nous annonçaient le triomphe du télétravail comme nouvelle forme d’organisation. Pendant le confinement et encore après, le télétravail a provoqué une forme d’euphorie chez les cadres et les employés mais cet enthousiasme est quand même retombé.

Alors que le gouvernement a appelé hier à « intensifier » le télétravail en zone d'alerte maximale, que Elisabeth Borne, la ministre du travail, martèle sur toutes les ondes que ce mode d'organisation doit être privilégié « tant que la situation sanitaire l’exigera » et « autant que possible », cette forme d’organisation a quand même beaucoup moins de succès qu’avant l’été. Il n’y a qu’à voir le taux de remplissage des métros et des RER désormais proche de 90 % aux heures de pointes pour s’apercevoir que la mode est peut-être démodée. 

Et c’est vrai, beaucoup d’enquêtes réalisées ces jours derniers auprès des patrons, des DRH, et des salariés prouvent que l’engouement n’est plus le même. 

Selon une enquête réalisée par Willis Towers Watson, 41 % des employeurs sont réticents au développement du télétravail.  Cette enquête a été réalisée du 7 au 11 septembre 2020 auprès de 106 DRH d’entreprises françaises et révèle que tout le monde se pose des questions sur la possible pérennité du télétravail. Tout le monde : employeurs, salariés, syndicats s’interrogent sur les règles à mettre en place dans ce contexte de crise sanitaire qui se prolonge, et surtout sur l’organisation de modes de travail hybrides dans le futur.

Parmi les principaux enseignements, il ressort que :

• 94% des DRH déclarent que les salariés en télétravail réalisent leurs missions dans de bonnes conditions
• 61% n’ont pas encore ajusté leurs règles en matière de télétravail pour l’avenir
• 41% des dirigeants sont encore réticents sur le développement du télétravail 
• 89% pensent que le télétravail permet un meilleur équilibre vie pro / vie perso.

Pour aller plus loin, on dénote plusieurs points :

1er point : Alors que les salariés avaient déjà largement manifesté leur engouement pour cette pratique, l’étude révèle que les entreprises partagent ce sentiment. En effet, 94% des interrogés ont le sentiment que les salariés en télétravail sont en capacité de réaliser l’ensemble de leurs tâches dans de bonnes conditions, pour des salariés qui étaient pour 75% d’entre eux en télétravail pendant le confinement. Les entreprises ont largement été séduites par le télétravail et ont même changé la perception qu’elles en avaient.  

2e point : Avec une pandémie qui n’en finit pas, la crainte d’une deuxième vague et les nouvelles mesures gouvernementales, la rentrée des entreprises se révèle plus compliquée. Si les 2/3 d’entre elles avaient mis en place des quotas pour limiter le nombre de salariés en présentiel et organiser le retour au bureau en septembre, on remarque qu’aucune tendance générale ne se dégage. 
Chaque entreprise s’organise comme elle le peut – et à cette date, 61% d’entre elles n’ont pas encore ajusté ou transformé leurs règles en matière de télétravail pour l’avenir. Les décisions sont repoussées dans l’attente d’un éclaircissement du paysage sanitaire. 

3e point : on prend cependant du recul par rapport au télétravail. Une très forte majorité a d’ores et déjà décidé de faire évoluer ses pratiques en matière de travail à distance - seules 19% des entreprises n’ont pas prévu de nouvel accord. Et l’été a vu les lignes bouger quant au nombre de jours de télétravail envisagés : plus de la moitié des employeurs (56%) pensent proposer 2 jours de télétravail par semaine, et déjà 20% souhaitent pousser jusqu’à 3 jours ! 

Les entreprises imaginant ne proposer qu’une seule journée par semaine sont devenues minoritaires (21% seulement). 

4e point : Le beau consensus a disparu. Entre les salariés, les managers (qui plébiscitent cette solution à 69%) et les entreprises concernant les bienfaits du travail à distance, l’accord n’est plus parfait. Il est terni par un enthousiasme modéré des leaders : seuls 58% seraient favorables vis-à-vis de ces nouveaux modes de travail, pendant que 41% se montrent réticents.  
Or, la culture de la confiance, préalable indispensable à la réussite de cette révolution culturelle, ne se fera pas sans une adhésion sincère de ces derniers… ni sans associer les salariés à la définition des modalités de ces nouveaux modes de travail. 

D’après les retours d’expérience des derniers mois, le sentiment majoritaire (89%) est que le télétravail favorise l’équilibre vie privée / vie professionnelle pour les salariés. 
Toutefois, plus de la moitié (54%) des DRH interrogés ont tout de même prévu des actions pour favoriser le bien-être de leurs collaborateurs à distance et surtout pour prévenir les risques psychosociaux. 

5e point : Le télétravail va être compliqué à organiser sur le long terme. Il faudra mettre en place des actions pour favoriser la cohésion d’équipe, avec des communications digitales très régulières, des réunions d'équipes en présentiel dans un lieu autre que le bureau pour maintenir le contact et la sensibilisation des managers à ces risques. 

Il faudra aussi équiper les télétravailleurs, veiller à ce qu‘ils soient installés correctement dans leur domicile. 

Si la performance de l’entreprise est liée à la motivation des salariés, la première préoccupation des DRH est de garder des salariés engagés (58%) durant cette période.  Pour près de la moitié d’entre eux (47%), l’accompagnement du changement et la réorganisation du mode de travail reste un défi majeur. 

Enfin, l’étude révèle que deux tiers des employeurs (67%) n’ont pas prévu d’indemniser les salariés pour compenser la non-prise en charge des indemnités déjeuner, l’absence de salles de sport, le remboursement d’une part des abonnements de transports en commun.

Pour Sébastien Biesse Directeur de l’Activité Talent de Willis Towers Watson France.  «, on voit que le chemin à parcourir est encore long. La question étant moins de savoir le nombre de jours à cadrer, que de s’interroger sur la transformation culturelle provoquée, et notamment sur la confiance que les dirigeants et managers ont en leur salariés, et réciproquement ! », 

6e point : le syndrome de la machine a café est de plus en plus fort. Le besoin de convivialité ne s’exprime pas clairement, mais, dans toutes les enquêtes réalisées auprès des salariés, on enregistre une certaine lassitude d’avoir à gérer le partage du temps et de l'espace entre la vie privée et familiale et la vie professionnelle. En bref, le besoin de revoir les voisins de bureau et les voisines, cette envie de sortir de son univers et profiter d’une liberté que donne la vie professionnelle se fait sentir. Les DRH appellent ça le syndrome de la machine à café ou de la pause-café.  

Analyse réalisée, à partir des travaux de  Willis Towers Watson
Willis Towers Watson est l’un des plus grands cabinets de conseil, de courtage et de solutions logicielles au monde qui aide les clients internationaux à faire du risque un vecteur de croissance. Willis Towers Watson, dont les origines remontent à 1828, compte 45 000 collaborateurs dans plus de 140 pays et marchés. 

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