Aération et purification de l’air des écoles, transports et entreprises : l’angle mort des autorités françaises face au Covid-19<!-- --> | Atlantico.fr
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Des messages sur les gestes barrières et les précautions à respecter face à la Covid-19 sont affichés sur la porte d'une salle de classe dans un établissement scolaire en Allemagne.
Des messages sur les gestes barrières et les précautions à respecter face à la Covid-19 sont affichés sur la porte d'une salle de classe dans un établissement scolaire en Allemagne.
©INA FASSBENDER / AFP

Moyens pour lutter contre la pandémie

Le Sénat de Berlin a adopté des mesures pour doter les écoles berlinoises de 1200 appareils mobiles d’épuration d'air grâce à une aide de 4,5 millions d’euros. De tels investissements semblent inexistants en France alors que la rentrée scolaire approche.

Charles Reviens

Charles Reviens

Charles Reviens est ancien haut fonctionnaire, spécialiste de la comparaison internationale des politiques publiques.

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Atlantico : Le Sénat de Berlin va doter les écoles berlinoises de 1200 appareils mobiles d’épuration d'air grâce à une aide de 4,5 millions d’euros et l'Allemagne, de manière générale, recommande d'aérer les espaces clos très réguliérement. Une méthode peu suivie en France. Pourquoi l'aération est-elle importante ?

Charles Reviens : La transmission du SARS-CoV-2 via des particules aérosols contenant le virus est désormais considérée par la plupart des scientifiques comme une importante modalité d’infection à la covid-19, par exemple par les personnes contaminantes lorsqu’elles parlent.

L’enjeu de la qualité de l’air et donc de sa purification peut donc constituer un enjeu légitime de santé publique. Cet enjeu semble pris très au sérieux en Allemagne : une précédente contribution avait évoqué un programme fédéral d’amélioration de la ventilation des bâtiments publics et le financement budgétaire associé (500 millions d’euros).

Le Sénat de la ville-Etat de Berlin pour sa part a décidé le 3 novembre dernier une autre initiative, consistant à mettre à disposition des écoles de Berlin 1 200 dispositifs mobiles de purification de l’air. Ce programme s’insère dans un dispositif complet de protection des enseignants et des élèves avec l’objectif clair de pouvoir laisser les écoles ouvertes en dépit de la crise sanitaire qui monte également en Allemagne, en dépit de résultats sanitaires à date beaucoup plus probants qu’en France (13 morts pour 100 000 habitants en Allemagne contre 59 en France).

La seule initiative comparable identifiée en France à date est celle de la Région Auvergne Rhône Alpes qui a décidé de déployer dans les 565 lycées de la Région de dispositifs de purification de l’air utilisant trois technologies différentes (ozone, photocatalyse, rayonnement UVC). Le budget alloué est de dix millions d’euros.

Qu'en pense Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Education nationale ?

Le ministre de l’éducation nationale s’est effectivement sur le sujet exprimé le 2 novembre dernier sur France Inter quand il était interrogé sur le risque sanitaire posé par des classes pleines et questionné sur son sentiment concernant les programmes allemands. Le ministre a remis en cause l’opportunité de recours à des purificateurs d’aire en s’appuyant sur les conclusions non probantes d’une étude scientifique à sa disposition.

Cette position appelle deux remarques. En premier lieu, les pouvoirs publics français semblent faire une application radicale de la règle posée par Georges Clémenceau selon laquelle « la vérité d'aujourd'hui peut avoir été l'erreur d'hier et peut devenir, par l'accroissement de la connaissance, l'erreur de demain ». Tout le monde a en mémoire la question du port des masques de protection que tous les membres du gouvernement présentaient unanimement comme inutiles au printemps, alors même que le non-respect du port du masque dans la plupart des espaces publics est passible d’une amende de 135€ depuis le 1er septembre.

L’usage dans la communication politique de l’argument scientifique est également très intéressant. La référence à une « étude scientifique » est devenu un label de qualité et d’authenticité et constitue un argument d’autorité ayant vocation - du point de vue de celui qui l’utilise - à arrêter le débat. Mais dans le domaine de la science il y a à la fois des champs de consensus (cf. les modalités de transmission du virus évoqués plus haut) mais également d’autres où perdurent de profondes divergences d’opinion. Il n’a donc pas systématiquement de vérité scientifique immanente donnant une justification définitive à des décisions politiques.

Concernant la question de la pureté de l’air, on peut noter d’ailleurs que le conseil scientifique covid-19 évoque dans sa note du 26 octobre différentes mesures complémentaires à discuter en lien avec la communauté éducative en France, dont l’aération des locaux qui doit être organisée de façon très systématique, tout en entamant une réflexion sur des mesures alternatives type purificateurs d’air comme le préconisent les Allemands.

Il semble y avoir enfin une différence d’appréciation entre le ministère de l’éducation nationale concernant l’ouverture ou la fermeture des établissements scolaires : « fermeture non à l’ordre du jour » évoqué par Jean-Michel Blanquer dans le même entretien du 2 novembre sur France Inter, fermeture des lycées « possible » selon Olivier Véran dans le JDD de la veill.

Pourquoi le sujet de l'aération et de la ventilation, pourtant crucial, est-il toujours délaissé par le gouvernement ?

Le sujet de la limitation de la transmission du virus par voie aérienne n’a de façon évidente pas en France l’importance qu’il a en Allemagne. Pour s’en convaincre il suffit de lire la fiche grand public disponible sur le site du ministère de la santé qui n’évoque pas le sujet lors de sa mention des mesures barrière. Seuls trois gestes barrière sont rappelés : lavage des mains, distance entre individus, ports du masque.

Le seul responsable politique qui s’est saisi du sujet est Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne Rhône Alpes qui déploie justement un programme pour les lycées de sa région. « Il y a un angle mort complet dans cette épidémie en France, c'est l'absence d'attention à l'un des coefficients majeurs de transmission : l'air », a-t-il récemment indiqué.

En tout état de cause et dans le cadre d’une gestion rationnelle de la pandémie, la question de la purification et de la ventilation de l’air dans les espaces publics fermés doit faire partie d’un dispositif complet et cohérent de mesures visant à limiter la propagation de la pandémie sans détruire plus avant l’économie. Il faut donc juger l’importance de cette mesure au regard de priorités d’ensemble pour maîtriser la situation.

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