La honte Air France, le goutte à goutte faiblard du CICE et le faire part de décès du capitalisme totalement prématuré envoyé par Jeremy Rifkin<!-- --> | Atlantico.fr
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Jeremy Rifkin prévoit la mort du capitalisme.
Jeremy Rifkin prévoit la mort du capitalisme.
©Reuters

Revue d'analyse financière

Dans l'œil des marchés : Jean-Jacques Netter, vice-président de l'Institut des Libertés, dresse, chaque mardi, un panorama de ce qu'écrivent les analystes financiers et politiques les plus en vue du marché.

Jean-Jacques Netter

Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est vice-président de l’Institut des Libertés, un think tank fondé avec Charles Gave en janvier 2012.

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Les pilotes d’Air France sont finalement arrivés à faire reculer leur direction sur son projet de développement de ses activités low cost en Europe.Transavia France, qui était la seule compagnie low cost européenne à perdre de l’argent, n’a donc plus aucune chance d’en gagner un jour. Tout se passe comme si le Syndicat National des Pilotes de Lignes (SNPL) préférait que les parts de marché de lignes moyen courrier qu’Air France détient encore en Europe soit abandonnées au profit de ses concurrents, car le coût au siège kilomètre d’Air France est de 10 à 12 centimes d’euro contre 5,9 pour Easyjet et  3,5 pour Ryanair !

Avant la grève, la société avait consommé 300M€ de fonds propres depuis le début de l’année, la grève aura coûté probablement autant. Air France est donc désormais bien placé pour rejoindre la longue liste des compagnies aériennes qui n’ont pas su s’adapter à temps (Alitalia, Iberia, Sabena etc…). Au total, un grand succès.

Au moment où le CICE commence à s’appliquer, on se rend compte que les restitutions de cash après 21 mois d’application n’atteignent que 5Md€, une goutte d’eau par rapport au tsunami fiscal déclenché contre les entreprises. C’est pourquoi, le patron des patrons, Pierre Gattaz, a courageusement présenté son "Livre Jaune" dans lequel il a détaillé les propositions du Medef pour lever les freins à l’embauche. Elles ont été présentées dans quatre domaines : les mesures de court terme, les mesures pour relancer le marché du travail, les mesures de compétitivité et les mesures pour l’investissement. "Nous ne voulons pas être les spectateurs d’une France qui s’enfonce", a dit Pierre Gattaz sans se faire beaucoup d’illusions.

En attendant les décisions d’un gouvernement courageux, les patrons s’inquiètent d’être de plus en plus traînés en justice. Dans un environnement de judiciarisation croissante, les chefs d’entreprise craignent de voir leur responsabilité de plus en plus engagée. Face à cette situation, la loi Taubira sur la réforme pénale vise à remplacer la prison par des peines alternatives pour tous les délinquants !

Les médecins rejettent à 95% la politique de santé de Marisol Touraine. Ils sont opposés notamment à la généralisation du tiers payant qui déresponsabilise l’ensemble de l’écosystème de la santé. Toute les professions libérales sont inscrites sur l’agenda de la colère, même les pharmaciens.

Les patrons de Chambre de Commerce ont du mal à comprendre que l’Etat ponctionne 500M€ dans leurs réserves accompagnée d’une baisse de leurs ressources fiscales allant de -17% en 2015 à -37% en 2017.

L’Etat qui annonce sans arrêt une baisse de dépenses publiques n’a de son côté toujours entrepris aucun effort significatif. Il n’a fait que désindexer partiellement la dépense sociale, alors que l’inflation avait quasiment disparu. Le modèle social français est devenu un puits sans fond qui coûte près de 800Md€ par an. L’éducation, l’hôpital, la sécurité sont dans une situation qui se révèle très anti-sociale.

Cela n’empêche pas les syndicats de fonctionnaires d’être opposés à tout débat sur l’évolution de leur statut. De nombreux pays ont supprimé depuis longtemps l’emploi à vie dans la fonction publique.

Jeremy Rifkin envoie avec un peu d’avance le faire part de décès du capitalisme

Jeremy Rifkin, économiste américain, est la vedette des médias cette semaine : entretiens dans Le Monde, Le Figaro et surtout Télérama, magazine incontournable en matière de sérieux économique !

Dans son livre "La nouvelle société du coût marginal zéro", il nous annonce l’arrivée de la troisième révolution industrielle. Il a raison, car avec la révolution digitale, tous les secteurs seront concernés et entraîneront de véritables ruptures qui mettront à mal tous les business model les plus établis. Le conflit d’Air France est à cet égard un excellent exemple.

En revanche, il en conclut un peu rapidement que cela devrait marquer la fin de l’ère capitaliste et l’avènement d’un nouveau mode d’organisation collaboratif et décentralisé fondé sur l’économie sociale et le partage des biens. Sa vision repose sur le développement de "communaux collaboratifs" qui sont des organisations fondées sur l’intérêt de la communauté plutôt que celui des individus. Pour lui, "chacun fait passer l’intérêt de la communauté avant le sien…"

L’économie de partage ou économie collaborative va tout emporter

C’est ce que voulait mettre en place Benoît Hamon, ancien ministre délégué à l'Économie sociale et solidaire et à la Consommation, qui voyait la création d’emplois principalement à partir des associations, des entreprises d’insertion, des mutuelles et des coopératives. Les consommateurs vont devenir selon Jeremy Rifkin des "prosumers", à la fois producteurs et consommateurs.

Il fait penser à Paul Samuel, cet économiste américain que tout étudiant en économie a du obligatoirement lire à l’époque pendant ses études. Sa grande prévision était que l’Union Soviétique dépasserait l’économie américaine autour de 1984 !

L’économiste américain, il en est fier, est conseiller de la région Nord-Pas-de-Calais présidée par Martine Aubry, inventeur des 35 heures, qui ont fait considérablement reculer la compétitivité de la France en cassant l’état d’esprit par rapport au travail.

Pour elle, en 2000, comme elle avait passé 6 mois chez Péchiney, elle en avait conclu que comme les services représentaient 75% du PIB, c’était la preuve qu’on était dans le post industriel, post travail.

Jeremy Rifkin ne voit pas à quel point les politiques de l’Etat Providence sont anti-sociale. Faute de rendre le droit du travail plus flexible dans l’intérêt de ceux qui n’ont pas d’emploi, on pratique des politiques d’argent à taux quasi nul, qui encourage à acheter des robots et supprimer encore plus d’emplois.

Il ne voit pas non plus que toutes les sociétés leader de la révolution digitale sont le résultat du fonctionnement du capitalisme : Google et Amazon ont été des pionniers, suivis dans les médias sociaux par Facebook, Twitter, Snapchat, WhatsApp et Instagram.

L’économie collaborative de sociétés comme Netflix, Uber, AirBnB ne fonctionne pas du tout selon le schéma de Jeremy Rifkin. Elles font partie intégrante du système capitaliste qui aime prendre des risques en finançant les sociétés innovantes. On est cette fois dans la destruction créatrice de Schumpeter, pas dans le monde de "bisounours" des coopératives ouvrières… Pour sa dernière levée de fonds, Uber, la société qui offre un service de taxis innovant, a levé 1,2Md$ ce qui valorise la société autour de 17Md$ !

Le capitalisme, n’en déplaise à Jeremy Rifkin, à la capacité de corriger ses défauts, contrairement au socialisme et au communisme. Si c’était le cas, dans le sillage de l’Union Soviétique, des pays comme Cuba ou le Venezuela seraient de grands succès économiques.

Il est regrettable que pour une grande partie de la  gauche française, la lutte des classes reste encore l’alpha et l’oméga de toute analyse politique. Ils vont donc s’acharner à bloquer toute réforme de l’Etat, des systèmes sociaux et de l’économie tant ils sont persuadés qu’elles ne seront faites qu’au profit de leurs "ennemis de classe", les "patrons". Comme le disait Marat à l'époque : "Périsse le Peuple plutôt que mes idées".                                                                                                                                                                                                                                                                

Le "Peer to peer" est une menace très forte contre les banques traditionnelles

Parmi les nombreux exemples de ruptures qui sont en train de se produire sous nos yeux, il y a celle du "Peer to Peer Lending". C’est l’organisation d’un face à face entre un prêteur et un emprunteur sans l’aide d’une banque.

L’annonce par Apple de ApplePay a fait peser une première menace sur l’activité de paiement classique. La prochaine introduction en bourse de Lending Club permet de comprendre ce qui se passe dans le secteur de la banque.

Aux Etats-Unis, Renaud Laplanche, un français, est le fondateur de Lending Club, première société de la "Fintech" menaçant sérieusement le quasi monopole des banques. Il a su attirer dès le début des investisseurs prestigieux comme John Mack, ex-patron de Morgan Stanley, T Rowe Price, Wellington, BlackRock. Aujourd’hui, 70% des prêts de sa plateforme sont consentis par des institutions qui obtiennent une rémunération bien supérieure à celle des marchés obligataires.

Prosper est le n°2. Elle a aussi Blackrock comme actionnaire et se concentre plus sur les crédits aux particuliers. Eaglewood Capital est un hedge Fund basé à New York qui restructure des paquets de crédit P2P. CircleBack Lending en fait autant. Suivent de nombreux autres acteurs comme OnDeck, Kabbage, SOFI  et CommonBond (prêts aux étudiants).

En Grande-Bretagne, il y a aussi des initiatives intéressantes comme TransferWise pour les paiements internationaux (Richard Branson et Index Ventures en sont actionnaires),GoCardless, Zopa, RateSetter, Funding Circle. En Suède, Klarna propose des solutions de paiement directe et à l’intention de se développer dans le monde entier. En Chine,  la croissance du P2P est spectaculaire : les acteurs chinois,  Ease, Lufax et Dianrong devraient rapidement rattraper leur retard sur Lending Club.

Le paiement mobile, le crowdfunding, les cryptodevises sont les autres ruptures qui menacent aussi la banque traditionnelle.

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