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©LOIC VENANCE / AFP

Voie du succès

L’entreprise est l’un des bastions frappés de plein fouet par la covid-19 : les nouvelles conditions de travail obligent les chefs d’entreprise à bien des remaniements, et depuis la période de confinement, le télétravail est devenu une pratique très répandue.

Xavier  Camby

Xavier Camby

Xavier Camby est l’auteur de 48 clés pour un management durable - Bien-être et performance, publié aux éditions Yves Briend Ed. Il dirige à Genève la société Essentiel Management qui intervient en Belgique, en France, au Québec et en Suisse. Il anime également le site Essentiel Management .

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Beaucoup de réticences antérieures, tant de la part des employés que des employeurs, ont été balayées par le confinement ! Les premiers refusant d’emporter du travail chez eux, dans leur libre espace de vie privée, et les seconds redoutant d’instantanés accès de paresse et une performance en chute libre. Il est pourtant indispensable de rappeler qu’il n’en a pas toujours été ainsi : ces croyances et ces distinctions sont assez récentes. C’est le taylorisme et le mouvement de l’organisation -réputée rationnelle et scientifique- du travail qui a peu a peu imposé la distinction radicale et artificielle entre le bureau ou l’atelier, lieu du travail et le domicile, espace du repos et du travail domestique. Les artisans, les agriculteurs, par exemple savaient depuis des millénaires, concilier les 2 : travail productif et labeurs domestiques s’effectuaient sur le même lieu, « à la maison », sans déplacement inutile et en alternant ou en associant les tâches.

L’industrie horlogère naquit, dans les juras français et suisses, du travail à domicile, à la pièce, dans les fermes emmitouflées d’épaisses congères. L’industrie optique et lunetière, celles des jouets en bois, des pipes, la joaillerie… en proviennent pareillement. Les travaux domestiques domestiques et « professionnels » sont à nouveau redevenus compatibles depuis 30 ans, grâce aux incessants progrès des outils de communication.

Mais c’est la pandémie actuelle qui a vaincu les croyances nées il y a seulement 150 ans…

Comment réinventer un « esprit d’entreprise » (travail d’équipe, convivialité, projets de groupe) quand chacun est amené à travailler chez soi en autarcie ? 

Travailler à 100% seul, chez soi ou « au bureau » est contreproductif, on l’avait observé et démontré dès avant la pandémie et ses contraintes.  Mais s’isoler parfois permet aussi des gains de productivité : moins d’intrusions, parfois sympathiques mais potentiellement intempestives, plus de réflexions avant l’action, moins de routines inutiles ou idiotes… Mais nous sommes des animaux grégaires avec une intelligence sociale. : des contacts positifs (c’est-à-dire non-conflictuels) nous sont indispensables.

L’équilibre se trouve, variablement selon les métiers et les personnes, autour de 2,5 jours par semaine en home-office. Et donc de 2,5 jours en travaux collectifs (et souvent les réunions ou les séances n’ont rien de « collectives »), en gestion de projet ou de qualité, en groupe de réflexion ou de co-décision… Il est alors assez important de stimuler la convivialité : cafétéria ouverte, espace agréable pour des échanges privés. Le temps passé ensemble devient alors un temps librement choisi, donc positif à l’origine. Et non plus imposé !

Comment centraliser les informations pour garder une cohésion de groupe dans ce travail à distance ?

La cohésion d’un groupe ne vient pas de l’information partagée ! C’est une grave erreur de le croire. La cohésion, même à distance, vient de valeurs humaines partagées et du sens donné au travail communautaire. Créer ensemble un Bien Commun à partager demeure le fondement de toute équipe qui gagne,

Par quels moyens l’entreprise peut-elle garantir à ses salariés le même confort alors que les conditions de travail ont radicalement changé ? 

La question est épineuse et il n’existe pas de réponse universelle. Souvent le confort psychique est bien supérieur à la maison qu’au travail. Mais ce n’est pas systématique. Le confort matériel est aussi très variable : un petit appartement de 60 m2 où vit une famille avec 2 enfants en bas âges rendra le travail à domicile sans doute plus difficile qu’à l’extérieur. Je recommande donc à chaque manager d’en parler avec ses collaborateurs et d’adapter ses propositions à chaque situation.

Quelles limites claires faut-il poser pour bien distinguer chez soi le personnel et le professionnel 

Aucune. C’est à chacun de s’auto-organiser.  Beaucoup aiment par exemple répondre à leurs courriels le soir, une fois les enfants endormis, pour les envoyer automatiquement le matin, pendant qu’ils font un jogging ou prennent tranquillement un bon café, à leur où d’autres se bousculent dans les ascenseurs ou dans les bouchons…

Comment créer des « sas de décompression » comme il y avait naguère encore le rituel des « pause-café », lieu d’échanges collectifs ? 

Je déteste cette expression de décompression. Elle est inepte, quand utilisée dans ce sens. Comme si le travail générait automatiquement de la pression et du stress ! En fait, notre cerveau aspire à faire une pause de quelques minutes, assez régulièrement, toutes les 25 minutes environ. Nous nous donnons très souvent cette pause à nous-même, quand nous décidons des horaires de notre travail. Lorsqu’en revanche le travail est collectif, il revient à l’animateur de ces séances de veiller à maintenir un rythme productif, en ponctuant chaque réunion de micro-pause d’au maximum 10 minutes. C’est du temps et de l’intelligence gagnés…

Y a-t-il encore, de la part du chef d’entreprise, un « suivi du travail » et des « retours » sur les missions effectuées par les salariés ? 

La dictature du lieu unique de travail avait engendré la tyrannie des horaires. On rémunérait alors le temps passé et non plus la production réelle efficace. Pour maintenir ces idioties, le despotisme des objectifs - qui transforment un travailleur fier de son travail en sinistre mercenaires stipendié – fut imposé, accompagné de l’esprit du soupçon systématique, à l’origine des contrôles systémiques imposés, destructeurs de toute confiance.

Je rencontre encore chaque jour des managers et dirigeants que s’étonnent ou s’émerveillent de ce que les travailleurs à domicile travaillent autant, voire mieux, qu’au bureau…

Un phénomène nouveau s’observe aussi : lorsque les contrôles et leurs kyrielles de reportings innombrables autant que variés ne sont plus imposés, le salarié fier de sa contribution a plaisir à rendre compte de son travail ou de ses résultats. Et le fait spontanément, avec un bel esprit de droiture et de synthèse.

La crise pandémique accélère donc le retour au simple bon sens, natif, qui géra nos activités productives, domestiques ou professionnelles, pendant des siècles, bien avant notre pseudo-modernisme.

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