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Toutes ces choses qui pourraient empêcher le retour de Sarkozy
©Reuters

Le retour du Sarko

Prendre la tête d'un fonds d'investissement qatari ou revenir en politique : selon Jean-Pierre Raffarin, Nicolas Sarkozy devra faire un choix. Rien de confirmé pour l'instant mais les rumeurs vont bon train sur un éventuel come-back qui est loin d'être gagné.

Philippe Braud

Philippe Braud

Philippe Braud est un politologue français, spécialiste de sociologie politique. Il est Visiting Professor à l'Université de Princeton et professeur émérite à Sciences-Po Paris.

Il est notamment l'auteur de Petit traité des émotions, sentiments et passions politiques, (Armand Colin, 2007) et du Dictionnaire de de Gaulle (Le grand livre du mois, 2006).

 

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Atlantico : Jean-Pierre Raffarin a jugé lundi dernier qu’il serait difficile pour Nicolas Sarkozy de poursuivre une carrière politique s’il venait à prendre la tête d’un fonds d’investissement qatari, information que l’ancien chef de l’État n’a pas confirmé :  pourquoi le retour en politique de l’ancien président est soumis à moult spéculations de ce genre ? Peut-on parler de pressions supplémentaires pour mettre à mal un éventuel retour ?

Philippe Braud : Quelles que soient les arrière-pensées éventuelles de Jean-Pierre Raffarin, l’ancien Premier ministre ne fait qu’exprimer un jugement de bon sens. Le candidat Sarkozy à la présidentielle de 2017 serait certainement plombé par son passage à la tête d’un fonds d’investissement qatari. Nicolas Sarkozy a beaucoup souffert de son image "bling-bling" qui s’est installée dès les premiers mois de son mandat présidentiel. Rien de mieux (ou de pire) pour la renforcer encore, que d’accepter ce type de responsabilité, compte-tenu de l’idée que les Français se font de la finance internationale en général, et de l’odeur des pétrodollars du Golfe en particulier.

Des récents sondages montrent que Nicolas Sarkozy est largement plébiscité pour revenir,  une influence majeure que l’on retrouve bien entendu au sein de son parti, l’UMP. Un retour qui gênerait l’ambition présidentielle de François Fillon et Jean-François Copé : pourrait-il y  avoir une alliance entre les deux hommes  pour neutraliser son retour ? Quelle forme prendrait-elle et surtout serait-elle viable ?

Actuellement personne au sein de l’UMP ne pourrait s’opposer utilement au retour de Nicolas Sarkozy s’il s’y décide. Une alliance Fillon Copé est non seulement impensable compte-tenu de "l’amitié" mutuelle qu’ils se portent, mais surtout elle est vouée à l’inefficacité. Ils feront plutôt assaut de "loyauté", surtout Jean-François Copé. Seules pourraient changer la donne des erreurs grossières de communication ou de comportement commises par l’ancien Président. Le fait par exemple de sembler hésiter à choisir entre la certitude de revenus juteux et les aléas d’une course présidentielle nécessairement incertaine.

La majorité dit ne pas être hantée par ce potentiel retour, les commentaires sont plutôt détachés voire neutres et même moqueurs : le PS est-il aussi détaché qu’il le dit ? N’a-t-il vraiment rien à craindre de ce retour  sur le devant de la scène ou prépare-t-il une stratégie en sous-marin pour contrecarrer les plans de Nicolas Sarkozy? 

A ce stade, le PS n’a aucune raison de s’émouvoir d’un éventuel retour de Nicolas Sarkozy dans le jeu politique. Dans l’immédiat, cela ajoute un élément supplémentaire d’incertitude dans le camp de l’UMP, ce qui ne peut déplaire à l’actuelle majorité et, de toute façon, l’échéance présidentielle est encore bien loin. Plus important encore, le retour éventuel de Nicolas Sarkozy dans le jeu présidentiel peut être considéré comme une fausse bonne carte pour son camp. Sans doute aurait-il pour effet de faire rentrer dans le rang ceux qui se voient en héritiers présomptifs, apaisant donc les luttes internes au sein de l’UMP. Mais, contrairement à ce que peuvent laisser croire les actuels sondages, Nicolas Sarkozy n’est probablement pas le meilleur candidat de la droite pour 2017. Son mandat présidentiel  de cinq ans a usé son style de gouvernement, et légué dans l’opinion publique une puissante sarkophobie qu’il sera facile pour ses adversaires de réveiller le moment venu, lors de la campagne électorale. Les scores de popularité d’un ex-président, dont l’heureux challenger a depuis profondément déçu, ne sont en rien prédictifs des scores futurs d’un candidat déclaré, désireux de se refaire une virginité politique. Un slogan du type : ATTENTION, IL REVIENT !, risque, dans son simplisme même, de se révéler redoutablement efficace.

Le récent entretien avec Nicolas Sarkozy publié dans le dernier numéro de Valeurs actuelles a créé une polémique. Il y multiplie maladresses politiques et propos condescendants : malgré les tentatives de ses proches de dédramatiser, l’ancien président pourrait-il être encore une fois victime d’une campagne de communication douteuse qui mettrait à mal son avenir politique?

Les déclarations à Valeurs actuelles rappellent en effet une des vulnérabilités principales de Nicolas Sarkozy : son tempérament impulsif et brouillon. Mais de toute façon son avenir politique est rien moins qu’assuré car il vit sur un paradoxe. Avoir été écarté du pouvoir lui redonne mécaniquement une certaine aura grâce à l’usure qui affecte prématurément François Hollande. Mais lorsqu’il s’en rapprochera (ou s’il doit s’en rapprocher), alors les vieux griefs et les vieilles antipathies se réveilleront ; la sarkophobie reprendra des couleurs, y compris dans ses aspects les plus injustes. C’est pourquoi, contrairement aux apparences, Nicolas Sarkozy n’est probablement pas l’avenir de la droite.

Propos recueillis par Valérie Meret

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