Pourquoi l’apprentissage pourrait sauver la jeunesse… et les seniors !<!-- --> | Atlantico.fr
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Au hit parade de ceux qui font briller la France, plus d’apprentis que d’énarques. Franck Provost, numéro 2 mondial de la coiffure (derrière un fonds d’investissement), 22 000 salariés dans le monde à travers son réseau complet.
Au hit parade de ceux qui font briller la France, plus d’apprentis que d’énarques. Franck Provost, numéro 2 mondial de la coiffure (derrière un fonds d’investissement), 22 000 salariés dans le monde à travers son réseau complet.
©Reuters

Les entrepreneurs parlent aux Français

Le digital va détruire des emplois. Sûrement. Il va en créer. Sûrement. Dans quelle proportion ? Mystère. Les prophètes partagent les 2 faces d’une boule de cristal, qu’aucun d’entre eux ne peut totalement étayer.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Le digital occupe tout l’espace. Le mot est devenu incontournable, quasi insupportable d’ailleurs. Mais c’est quoi le digital ? Pourquoi serait-ce une fin en soi plutôt qu’un outil ? A écouter les rubriques et commentaires foisonnants de la presse, des incubateurs et investisseurs, ce serait une fin en soi, une obligation, un devoir ! Digitalise- vous ou mourrez ! Si vous n’êtes pas virtuels, vous n’êtes plus réel. Si vous n’avez pas la dose de digital nécessaire au bonheur de l’investisseur, qui aiment plus souvent les mots affichés que les contenus avérés, vous appartenez au passé. Le digital serait ce qui sépare le néanderthalien de l’être humain moderne. Pour ceux qui aime le mimétisme, le "moutonisme" et le prêt-à-penser, la petite musique digitale est belle à entendre. Et pourtant. Comme tout prêt-à-porter il ne doit pour autant pas être endossé sans réfléchir et sans partage.

Le digital va détruire des emplois. Sûrement. Il va en créer. Sûrement. Dans quelle proportion ? Mystère. Les prophètes, délicieusement perchés par trop d’optimisme, ou « baudelairiens » par le spleen qu’ils dégagent, partagent les 2 faces d’une boule de cristal, qu’aucun d’entre eux ne peut totalement étayer. Seulement l’argumenter. Ils voudraient écrire leur histoire, mais nul ne maîtrise l’avenir.

C’est pourquoi j’aimerais vous parler d’un avenir facile à écrire et d’une histoire magnifique à raconter. Celle des apprentis. Celle de ces exclus des adorateurs de l’école de l’élite, ces arrogants, pour qui ces jeunes, sortis prématurément de l’école, sont le symbole de l’échec, les représentants de l’absence neuronale, une masse à peine utile à boucher les trous des « jobs d’en bas ». Et pourtant ces jeunes sont l’avenir de la nation, et le digital n’est pour eux ni une fin en soi, ni une religion, car pour eux le contenu et l’excellence, la preuve par le travail et la motivation, passent avant les outils pour en convoyer l’existence.

Les apprentis sont les abandonnés de la République. Mais la République existe t-elle encore ? Quand elle a oublié, par aveuglement, la plupart des siens. Laissés K.O., sur le bord du ring, assommés par une élite qui s’estime être la seule vraiment indispensable et des gouvernants qui ignorent la réalité de la vie professionnelle. Des apprentis dont les mains parlent bien mieux que nombre de nos soit disant cerveaux. Des apprentis qui rient des discours de ces marionnettes de l'UNEF, pour qui pouvoir travailler de façon exceptionnelle 45H dans une semaine, est une insulte à l’être humain et un retour à Germinal (qu’ils n’ont lu qu’en bande dessinée, au mieux). Des apprentis qui font rayonner la France bien plus que n’importe quel Rafale, centrale nucléaire ou produits cosmétiques. Leur excellence est remise en cause chaque jour et exige d’eux de remettre leur rente éphémère sur l’établi. En permanence. Ils ne peuvent jamais être rentiers et ne prétendent pas à l’être. Et ils n’ont pas peur de perdre leur emploi, car l’excellence et le travail paient. Ils le savent. Ils le vivent.

Nous devons avoir honte, et particulièrement ces politiques qui nous cuisinent le mot de République à toutes les sauces, y compris les plus âpres, d’avoir fait des 98% des élèves qui n’intègrent pas les écoles élitistes françaises, des cancres, des fantômes de l’éducation, des déshérités du quotient intellectuel. Il ne faut en aucun cas remettre en cause les écoles élitistes, mais valoriser ce type de réussite n’aurait pas dû se faire en dévalorisant les autres. Chacun a un rôle à jouer dans notre société, et les résultats de nos meilleurs apprentis ont certainement moins à rougir que ceux de nos cancres politiques.

Au hit parade de ceux qui font briller la France, nous comptons plus d’apprentis que d’énarques. Philippe Starck, autodidacte. Franck Provost, numéro 2 mondial de la coiffure (derrière un fonds d’investissement), 22 000 salariés dans le monde à travers son réseau complet. Christian Dior. J’adore ! Apprenti lui aussi. Thierry Marx, Alain Ducasse et tous les autres grands chefs. Eric Kayser, le papa Holder, fondateur de Paul. La liste pourrait recouvrir la totalité de ce site internet ! Ils font rêver les pays du monde qui rêve de France à travers eux. Combien d’énarques et d’X à mettre en face de ce score sans appel ?

L’apprentissage est une ressource à emplois. Qualifiés et de qualité. Tous ces « enfants » qui empruntent notamment les chemins des Compagnons du Devoir, sont la fierté de ce pays, et les 10 000 compagnons formés chaque année pourraient être 3 fois plus nombreux, qu'ils trouveraient tous un emploi. En quelques minutes. Alors pourquoi nous priver de ce bonheur. A eux seuls, ils peuvent redresser et magnifier n'importe quelle courbe. Du chômage ou plutôt de l'emploi.

Ils incarnent les valeurs qui manquent aux pantins des manifs étudiantes, ces pauvres marionnettes dont la vie est dictée par des préoccupations aussi inutiles que pitoyables. Le travail. La motivation. L’ambition. La fierté du travail bien fait. Ces valeurs ne sont pas celles de la jeunesse, qui défile contre l’avenir. L'UNEF représente le monde d’avant, l’histoire. Ces jeunes sont notre avenir, notre potentiel de rebond.

Pour revaloriser ces métiers, il faut que chacun d’entre nous, à notre niveau, leur donne une chance. Mais surtout, le respect. Il faut cesser de leur faire penser qu’intégrer l’apprentissage est synonyme d’échec. Au contraire. Il faut que les stars du secteur s’'engagent et mettent leur succès au service du rêve de cette génération. Il faut que chaque jeune de ce pays se mette à hésiter entre HEC, l'X, l'ENA et l'apprentissage. Il faut que chaque jeune qui souhaite pouvoir être libre, compétent, entrepreneur de sa vie, fier de ses mains et de son œuvre, pour qui le travail, la responsabilité et l'excellence signifie quelque chose, n'hésite plus une seule minute. Et que l'état, l'Education nationale, les parents, le monde, s'extasient de ce talent nouveau qui sera un diamant de plus sur le diadème français.

Pour ces talents, le digital sera un outil de rayonnement et non un objectif. Ce n'est pas le digital qui fera la meilleure pâtisserie, le plus bel ouvrage, la meilleure coiffure, il ne fera que permettre à l’artisan de le sublimer et de le vendre ! Et nos investisseurs qui, à force d'être obsédés par miser sur l’idée de demain, et ignorent les valeurs sûres d'aujourd'hui, devraient réserver une large partie de leur cagnotte à ces jeunes qui ont les pieds sur terre et la tête dans les étoile. Et pas seulement dans « la toile ». L'avenir est dans l'apprentissage, misons vite sur les bonnes cases au lieu de les éviter ou de les mépriser.

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