Portrait robot de ce que doit être une voiture française pour se vendre<!-- --> | Atlantico.fr
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"La demande française est et restera durablement centrée vers les petites voitures des gammes de prix relativement basses."
"La demande française est et restera durablement centrée vers les petites voitures des gammes de prix relativement basses."
©Reuters

Twingo power

Selon le Comité des constructeurs français d'automobiles, au mois de mai en France, les immatriculations de voitures neuves ont baissé de 10,3% par rapport à mai 2012 pour atteindre 148 554 unités.

Bernard Jullien et Christophe Benavent

Bernard Jullien et Christophe Benavent

Bernard Jullien est économiste.

Il est directeur général du réseau international Gerpisa (Groupe d’étude et de recherche permanent sur l’industrie et les salariés de l’Automobile).

Christophe Benavent est professeur à Paris Ouest. Il enseigne la stratégie et le marketing et dirige le Master Marketing opérationnel international l. Il assure aussi la responsabilité de la rubrique "Digital" de la revue Décision Marketing.

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Atlantico : Selon le Comité des constructeurs français d'automobiles, au mois de mai en France, les immatriculations de voitures neuves ont baissé de 10,3% par rapport à mai 2012 pour atteindre 148 554 unités. A quoi devrait ressembler une voiture "made in France" pour qu'elle rencontre un succès commercial ? Quel est le modèle type de la voiture qui se vend en France ? 

Bernard Jullien : La demande française est et restera durablement centrée vers les petites voitures des gammes de prix relativement basses. Le problème étant que cette voiture type ne peut pas vraiment être produite en France puisqu'on ne peut produire que des véhicules plus chers : cela réduit donc la part de la demande française qui peut être satisfaite par la production française. Ce phénomène amorcé en 2004 a été très marqué jusqu'en 2009 : la production française a diminué de près de 20 millions d'unités, principalement pour cette raison-là. Aujourd'hui, ce phénomène s'est stabilisé, et il y a même des relocalisations notamment chez Renault, ce qui est un signe encourageant. 

Comment peut-on l'expliquer ? 

Aujourd'hui, les challengers des constructeurs français sont davantage les Coréens qui arrivent à se positionner en terme de prix très avantageusement avec des modèles tels que la Kia Rio. Concernant les marques françaises, elles vont devoir revoir leur gamme : on atteint des niveaux de prix pour des modèles de base difficilement acceptables pour les consommateurs. Il y a un réel déphasage entre ce que les clients de petite voiture sont prêts à payer et l'offre des firmes françaises : par exemple, on ne trouve pas un véhicule de type Clio à moins de 15 000 euros actuellement. Vouloir concurrencer les Allemands a conduit à une dérive en termes d'exigences techniques sur certains modèles : on assiste à un phénomène de "sur-qualité", qui fait que l'on ne trouve pas chez les clients le consentement à payer pour la qualité qu'on lui offre. On met l'automobile sur un piédestal alors que les consommateurs ont cessé depuis longtemps de mettre autant d'argent qu'avant dans leur voiture. Il faut rompre avec cette course du "toujours plus" et se méfier du discours sur le futur de l'automobile française qui serait celui de la nécessité de monter en gamme. Le cœur du problème est de savoir fabriquer dans des pays à haut coût des véhicules peu chers. 

Et à quoi ressemble la voiture de production française qui se vend à l'étranger ? 

Les modèles de production française qui se vendent à l'étranger sont essentiellement des modèles de PSA, notamment la 3008, mais qui restent en deçà des marques allemandes. Il n'y a pas réellement de modèles qui ont un vrai succès à l'international et qui sont intégralement produits en France.

Les marques françaises ont-elles les compétences et les moyens pour produire des modèles à succès ou faut-il davantage compter sur des constructeurs étrangers ?  

Il n'y a pas vraiment de constructeur qui puisse repositionner les caractéristiques de l'offre par rapport à ceux de la demande : les seuls qui ont un projet qui va dans ce sens sont Renault et Dacia, ou bien encore PSA qui a annoncé produire un nouveau modèle en Espagne. Il faut surtout arrêter avec le cliché qui consisterait à dire que les Français sont mauvais dans le secteur automobile : les Américains sont dans une position bien plus dramatique que les marques françaises, et le Japon avec Toyota souffre également beaucoup en Europe. Ce ne sont pas chez les constructeurs non-français que le renouveau du dynamisme du secteur va se retrouver - et encore moins chez les Allemands dont on vante pourtant si souvent les mérites.

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