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Et si la personnalité politique souhaitée par les Français pour les gouverner était un certain Edouard Macron (ou Emmanuel Philippe...?)
©PHILIPPE WOJAZER / AFP / POOL

Dans la tête des Français

Dans la lignée de la séquence POP2017, Bruno Cautrès accompagne BVA pour suivre le quinquennat. Nous vous proposons de découvrir le billet de cette semaine.

Bruno Cautrès

Bruno Cautrès est chercheur CNRS et a rejoint le CEVIPOF en janvier 2006. Ses recherches portent sur l’analyse des comportements et des attitudes politiques. Au cours des années récentes, il a participé à différentes recherches françaises ou européennes portant sur la participation politique, le vote et les élections. Il a développé d’autres directions de recherche mettant en évidence les clivages sociaux et politiques liés à l’Europe et à l’intégration européenne dans les électorats et les opinions publiques. Il est notamment l'auteur de Les européens aiment-ils (toujours) l'Europe ? (éditions de La Documentation Française, 2014) et Histoire d’une révolution électorale (2015-2018) avec Anne Muxel (Classiques Garnier, 2019).

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La dernière livraison de l’Observatoire de la politique nationale (octobre 2018) réalisé par BVA pour Orange-RTL-La Tribune marque une nouvelle chute de popularité pour Emmanuel Macron (seulement 29% à présent). Plus encore que cette popularité très basse, c’est l’écart avec celle du Premier ministre, Edouard Philippe, qui est marquante : le Premier ministre distance le Président de plus de 10 points de popularité (40%). Ce cas de figure n’est pas dominant sous la Vème République mais il s’est déjà produit à plusieurs reprises (François Hollande moins populaire que Manuel Valls, François Fillon plus populaire que Nicolas Sarkozy). Mais ce n’est pas seulement l’écart qui est important entre Edouard Philippe et Emmanuel Macron : l’analyse des questions ouvertes qui ont été posées montre que le Premier ministre dispose non seulement d’un solde d’image positive plus important mais aussi plus riche en qualités qui lui sont prêtées : son sérieux, son calme, son absence d’emphase sont autant loués que sa loyauté à Emmanuel Macron par ceux qui ont de lui une image positive.

Cet écart quantitatif et qualitatif dans la perception des deux têtes de l’exécutif nous permet de revenir sur le couple exécutif formé par nos institutions. En plaçant le Président en position de pivot, en lui conférant le pouvoir de nomination du Premier ministre (parmi les nombreux pouvoirs exécutifs conférés au Président), et plus encore en lui donnant l’onction du suffrage universel en 1962, nos institutions ont créé un duo exécutif asymétrique.  
Cette règle d’or présidentielle de la Vème République est impitoyable ; elle transforme la relation entre le Président et le Premier ministre en une relation de domination du premier sur le second ; dans les périodes favorables il s’agit d’intérêts bien compris, dans les périodes défavorables cela peut tourner à la rivalité potentielle, au-delà de toute entente et loyauté réciproque qui peut exister. Le Premier ministre (qui le sait) ne peut sur une longue durée être nettement plus populaire que le Président, sans lui porter ombrage ; s’il devient beaucoup plus impopulaire que celui qui l’a nommé, il sait que ses jours sont comptés aussi... Sur l’échiquier des rapports politiques comme des rapports humains, les deux têtes de l’exécutif jouent une drôle de partie d’échec, dont les institutions plantent le décor.
En créant un exécutif à deux têtes, la Vème République a introduit dans son fonctionnement, comme dans nos perceptions, une incroyable combinatoire des possibles. Le Premier ministre « dirige l'action du Gouvernement » (article 21 de la Constitution) et ce dernier « conduit la politique de la nation » (article 20) mais de fait ils appliquent le programme du Président. La dualité du pouvoir exécutif permet au Président d’incarner la figure mythologique de Janus, à la fois arbitre, garant de l’intégrité de la nation toute entière, mais en fait vrai patron de la majorité car c’est de lui que tout procède. Dans le cas d’Emmanuel Macron, cette figure mythologique capte de nombreuses facettes de son exercice du pouvoir mais permet aussi de rendre compte d’une autre dualité, peut-être plus spécifique d’Emmanuel Macron que son rôle présidentiel.
Entre « Dr. Jupiter » et « Mister Contact » une faille est apparue, quelque chose ne fonctionne plus très bien depuis quelques mois. Dans la mythologie romaine Janus est doté de deux têtes signifiant qu’il peut voir à la fois devant et derrière lui. Il tient un bâton dans la main droite, afin de montrer la voie et une clé dans la main gauche, afin d’ouvrir les portes. C’est assez métaphorique de la dualité qu’Emmanuel Macron nous montre : ce n’est pas seulement « et de gauche et de droite », mais aussi « et vertical et au contact », « l’Europe et le rêve de grandeur française ». Message politique complexe et riche mais qui perd en route des segments plus nombreux de l’électorat qu’au début, de nombreux Français n’apprécient plus du tout l’interprétation de ce rôle.
Tout se complique encore plus si l’image du Premier ministre dans l’opinion devient un anti-portrait en creux du Président. Le différentiel de popularité des deux têtes de l’exécutif pose alors une importante question : est-ce que ce sont leur style personnel, leur incarnation de leur fonction ou des différences de méthodes et de choix politiques que les Français perçoivent ? L’enquête BVA montre que le style et l’image générale des deux hommes jouent un rôle important.
Lorsque l’on passe les opinions des Français au tamis des questions ouvertes, apparait alors le portrait d’une personnalité politique qui pourrait obtenir des scores de popularité intéressants : un certain Edouard Macron... ! Savoir quand, où et comment cet être hybride sortira du bois est une autre histoire. Il devra alors compter avec le fait que Janus et/ou Jupiter ne s’en laissent pas compter facilement…. Mais Edouard Macron est une personnalité à suivre….

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