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Jean-Luc Mélenchon est engagé dans la campagne des législatives avec le projet de la Nupes.
Jean-Luc Mélenchon est engagé dans la campagne des législatives avec le projet de la Nupes.
©STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Nupes

Tous les efforts de la NUPES vont consister à piocher le plus possible dans la poche des "méchants" via la fiscalité, les réglementations et les nationalisations, afin de redonner aux "braves gens" la dignité humaine foulée aux pieds depuis trop longtemps par les premiers.

Nathalie MP Meyer

Nathalie MP Meyer

Nathalie MP Meyer est née en 1962. Elle est diplômée de l’ESSEC et a travaillé dans le secteur de la banque et l’assurance. Depuis 2015, elle tient Le Blog de Nathalie MP avec l’objectif de faire connaître le libéralisme et d’expliquer en quoi il constituerait une réponse adaptée aux problèmes actuels de la France aussi bien sur le plan des libertés individuelles que sur celui de la prospérité économique générale.
 
https://leblogdenathaliemp.com/

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Qu’on se le dise : les élections programmées les 12 et 19 juin prochains ne sont pas des élections législatives post-présidentielles ordinaires. Elles s’apparentent plus à des élections générales comme il en existe au Royaume-Uni ou en Allemagne, c’est-à-dire visant à former une assemblée législative d’où sortira le chef du futur exécutif du pays. Du moins est-ce ainsi que Jean-Luc Mélenchon a choisi de les considérer en se déclarant lui-même candidat au poste de Premier ministre si la coalition NUPES (Nouvelle Union populaire écologique et sociale) formée avec le PCF, le PS et les Verts autour de la France insoumise qu’il dirige, obtenait une majorité de sièges à l’Assemblée nationale.

Une fois n’est pas coutume, je partage avec M. Mélenchon l’opinion que le régime fortement présidentiel instauré par la Constitution de la Vè République n’est pas aussi démocratique qu’on pourrait le souhaiter, surtout depuis que la durée du mandat présidentiel a été ramenée à 5 ans pour coller au renouvellement législatif. Dans ces conditions, les élections législatives françaises ne sont plus qu’une confirmation de pure forme de la présidentielle, avec pour conséquences que les électeurs s’en désintéressent, que le niveau des candidats investis se nivelle par le bas et que les élus de la majorité présidentielle n’ont d’autre mission que de dire oui à tout ce que propose l’Élysée. On a vu meilleure séparation des pouvoirs.

Mais nos convergences s’arrêtent là.

Il est vrai que le leader insoumis ne ménage pas sa peine, ou plutôt ses mirobolantes promesses, pour secouer nos législatives. Par exemple, le salaire minimum qui devait être monté à 1 400 euros mensuels nets dans son programme présidentiel est soudain passé à 1 500 euros dans la plateforme de la Nouvelle Union populaire. De plus, tout, absolument tout, y est badigeonné d’une épaisse couche de planification écologique aussi rétrograde que bondissante puisque qu’il est question de sortir le nucléaire de la taxonomie verte de l’Union européenne et de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 65 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990 contre les 55 % (déjà coquets) envisagés par le Green Deal européen. Ajoutez le droit de vote dès 16 ans, et c’est l’extase chez les jeunes !

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Et de fait, après avoir réussi à se hausser de 11 % selon les sondages de février à 22 % des voix lors du premier tour de la présidentielle du 10 avril, Jean-Luc Mélenchon n’est plus très loin de devenir une très sérieuse épine dans le pied d’Emmanuel Macron. À quelque dix jours du premier tour des législatives, ce dernier verrait le mouvement Ensemble ! qui le soutient obtenir le plus grand nombre de sièges, mais talonné de près par la NUPES, il n’est pas assuré d’atteindre la majorité absolue.

De quoi débrider sérieusement Jean-Luc Mélenchon.

Accusé lui aussi de vouloir « cramer la caisse », il ne détourne pas le regard, il ne cherche pas à dire comme les équipes Macron : Mais pas du tout, regardez, croissance au plus haut, chômage au plus bas, inflation passagère. Dette ? Quelle dette ? Au contraire, il assume : Oui, avec lui à Matignon, certaines caisses seront vidées et d’autres seront au contraire renflouées, a-t-il promis lundi dernier (30 mai 2022) dans son discours de lancement du Parlement de la NUPES :

« Et (on) nous dit que nous allons vider la caisse. Eh bien oui, en effet, certaines caisses vont être vidées. Mais pas celles de l’État ni des braves gens. Ce sera celles de ceux qui ont le plus et en effet, ils vont devoir donner beaucoup plus. Et voilà, c’est notre tour. Et pour le contentement commun, il nous faut des sommes que nous allons aller prendre là où elles sont disponibles. »

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Et si la fiscalité confiscatoire qu’il envisage pour financer ses multiples grands travaux, ses nationalisations et sa grandiose planification écologique et sociale ne suffit pas, pas de panique, il restera toujours la dette publique. Pourquoi se faire des nœuds au cerveau à ce sujet ? Pourquoi s’inquiéter d’un faux problème ? Il suffira de demander à la Banque centrale européenne de convertir la part de dette des États qu’elle détient dans son bilan en dette perpétuelle à taux zéro. Autrement dit, l’annuler. Si on le fait une fois, pourquoi ne pourrait-on pas le refaire un peu plus tard, quand la première fois sera oubliée ? Problem solved.

Si le programme de la NUPES se présente sous la forme d’une interminable liste de 650 mesures où les nationalisations, les réquisitions, les 32 heures hebdomadaires et la garantie de l’emploi pour tous voisinent avec la gratuité des protections périodiques, la fin de la sélection à l’entrée de l’université et la sortie du nucléaire, point n’est besoin de tout lire (bien que la lecture en soit fort instructive) pour comprendre vers quel modèle de société Jean-Luc Mélenchon compte nous emmener.

Ses propos reproduits ci-dessus, quoique ne dépassant pas quelques lignes et quoique dénués de tout aspect programmatique concret, n’en sont pas moins très révélateurs de la lutte des classes anticapitaliste qui continue à animer la gauche chapeautée par la France insoumise, plus de quarante ans après l’échec de l’application par Mitterrand du programme commun de la gauche, plus de trente ans après la chute de l’URSS et à une époque où les politiques similaires des Castro et Díaz-Canel à Cuba et des Chávez et Maduro au Venezuela ont fait la preuve de leur incapacité totale à garantir prospérité et liberté à quiconque, excepté aux favoris du pouvoir.

Pour Mélenchon, il y a clairement les « braves gens », autrement dit les gentils, ceux qui ne feraient pas de mal à une mouche (ni à une abeille, naturellement, d’où l’interdiction promise des néonicotinoïdes), ceux qui savent ce que développement humain et solidarité veulent dire ; et les autres, autrement dit les méchants, les riches, les capitalistes. Tous les efforts de la NUPES vont donc consister à piocher le plus possible dans la poche des méchants via la fiscalité, les réglementations et les nationalisations, afin de redonner aux « braves gens » la dignité humaine foulée aux pieds depuis trop longtemps par les premiers.

On sait pourtant que cela ne fonctionnera pas mais s’achèvera au contraire sur une catastrophe économique et financière que seule la mise en place d’un joli clientélisme électoral doublé du contrôle étatique de l’information et du discours connu sur les opérations de déstabilisation menées par les forces réactionnaires permettra de masquer pendant un temps.

Cela ne fonctionnera pas, car tout ce qui sera pris au secteur marchand au-delà de ce qui est déjà pris (et nous sommes déjà à la première place mondiale) ne sera pas réinvesti par les entrepreneurs dans de nouveaux projets productifs. Ce sera laissé à la discrétion de l’État dont on ne connaît que trop les faibles capacités de bonne gestion et d’innovation, vérolé qu’il est par son autoritarisme mono-idéologique d’une part et par son système où du fait de la garantie de l’emploi, personne n’est incité à faire plus qu’appliquer à la fois sans zèle et sans discussion des consignes venues d’en haut.

Il se peut qu’au début ce soit l’euphorie : hausse des salaires, baisse du temps de travail, diminution du chômage grâce au recrutement massif de fonctionnaires, et pour couronner le tout, mise en place de politiques vertes hyper volontaristes. On chantera et on dansera place de la République. Mais très vite, tout va basculer dans la crise. L’emploi marchand diminuera ; alors on le compensera par de l’emploi public qu’il faudra financer en taxant encore plus, etc. Cercle vicieux garanti.

Le scénario est connu, et pourtant, il se trouve des gens suffisamment cyniques et/ou ignorants pour continuer à nous le présenter comme le nec plus ultra de l’humanisme politique. C’est terriblement triste.

Cet article a été publié initialement sur le site de Nathalie MP : cliquez ICI

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