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Mariage pour tous : ce triple artifice idéologique qui a fait swinguer les années 2010
©PATRICK HERTZOG / AFP

Bilan des années 2010

A l'occasion de la fin de l'année 2019, Atlantico a demandé à ses contributeurs les plus fidèles de dresser un bilan de la décennie, des années 2010. Bertrand Vergely évoque le mariage pour tous.

Bertrand Vergely

Bertrand Vergely

Bertrand Vergely est philosophe et théologien.

Il est l'auteur de plusieurs livres dont La Mort interdite (J.-C. Lattès, 2001) ou Une vie pour se mettre au monde (Carnet Nord, 2010), La tentation de l'Homme-Dieu (Le Passeur Editeur, 2015).

 

 

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Pour des raisons de fond, de forme ainsi que pour ses conséquences, l’événement le plus important de la dernière décennie est sans nul doute le mariage pour tous, désormais quasiment mondialement reconnu, avec à la clef la Procréation Médicalement Assistée pour les couples de femmes désireuses d’avoir un enfant (PMA)  et la Gestation Pour Autrui pour les couples d’hommes désireux d’avoir un enfant (GPA).

S’agissant du fond, le mariage pour tous pensé comme une victoire de la tolérance et de la liberté démocratique est présenté comme un progrès par ses défenseurs. Il n’est pas un progrès mais une rupture sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Deux hommes, deux femmes ne peuvent pas avoir un enfant. Pour avoir un enfant, deux hommes doivent avoir recours à une femme louant son ventre pour la gestation de cet enfant, deux femmes doivent avoir recours au sperme d’un donneur anonyme. Avec le mariage pour tous, et ses conséquences la PMA et la GPA, l’impossible est désormais possible. Jusqu’à présent, dans l’histoire de l’humanité, jamais il n’avait été déclaré que deux femmes et deux hommes allaient pouvoir avoir un enfant. Il a toujours été reconnu que, pour faire un enfant, le couple homme-femme état indépassable. Désormais, grâce à un triple artifice contournant le couple homme-femme, ce n’est plus le cas. 

Le premier artifice est juridique. Le fait que deux hommes et deux femmes ne peuvent pas faire d’enfant est une impossibilité incontournable. Quand on veut que l’impossible devienne possible, comment faire ? Le mariage pour tous a trouvé la solution : avoir une approche purement juridique en faisant triompher le droit. Au lieu de partir de la réalité du couple homme-femme, base de la famille et du mariage, partons du droit et dans le droit du contrat. Faisons du mariage un pur contrat. Le tour est joué. Que l’on sache, pour signer un contrat, il n’est pas nécessaire que l’on soit un homme, une femme, ou un couple homme femme. Un contrat peut fort bien être signé par deux femmes et deux hommes. C’est d’ailleurs ce qui se passe. Pour le mariage pour tous, c’est ce qui s’est passé. Le mariage réduit à un simple contrat, le mariage entre deux femmes et deux hommes est devenu possible. 

Le deuxième artifice est médical. Pour faire un enfant, il faut un couple homme-femme. Impossible de faire un enfant autrement. Quand on veut que ce soit quand même possible, comment faire ? Le mariage pour tous a là encore trouvé la réponse : avoir une approche purement médicale en faisant triompher la technique. Pour faire un enfant, il faut une insémination. Qu’importe que l’on soit père ou ère. Tous les jours des enfants sont faits sans qu’il y ait des pères et des mères, simplement par insémination. Cela n’empêche pas l’humanité de vivre. Rien n’empêche de faire la même chose. Tout comme on peut réduire le mariage à un contrat, on peut réduire la procréation à une insémination. Pour le mariage pour tous, c’est ce qui s’est passé. La procréation réduite à une insémination, la PMA et la GPA sont devenues possibles. 

Enfin, le troisième artifice est idéologique. Quand on parle de mariage et de famille, tout le monde pense le couple homme femme comme étant leur base naturelle. Tout le monde utilise de ce fait la notion de nature afin de qualifier le couple homme-femme comme donnée originelle du mariage et de la famille. Quand on veut éviter les termes de nature ou bien encore de données originelles, comment faire ? Le mariage pour tous a, là encore, trouvé la réponse. Il s’avère que les notions d’homme et de femme ont été travaillées par la culture  et qu’en particulier l’homme a été associé à un idéal de virilité et la femme à un idéal de féminité. Faisons des notions d’homme et de femme les produits de la culture et de ses idéaux de virilité et de féminité, expliquons que la notion de sexe est un mythe, le prétendu sexe enraciné dans la nature étant en réalité un genre fabriqué par la culture, le tour est joué. Finie la nature. Tout est culture.  

Le mariage pour tous est non pas un progrès mais une rupture d’humanité. C’est exagéré, disent ses partisans. Nullement. Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, la naissance de celle-ci a été envisagé en dehors de toute référence au couple homme-femme par le biais d’un processus d’abstraction totale réduisant le mariage à un contrat, la procréation à une technique d’insémination et la nature à la culture. 

Cette rupture sur le fond s’accompagne d’une rupture dans la forme. On connaissait jusqu’à présent le totalitarisme religieux ainsi que le totalitarisme politique. Avec le mariage pour tous, la PMA et la GPA, on voit apparaître le totalitarisme sociétal. Le totalitarisme est ce qui se passe quand, une idéologie prenant le pouvoir, celle-ci force à bien penser, c’est-à-dire à reproduire cette idéologie. Dans le champ politique, c’est ce qui s’est passé avec le communisme. Le pouvoir communiste a obligé à bien penser. Aujourd’hui, avec l’émergence de formes de totalitarismes religieux, c’est ce qui se passe. Le pouvoir religieux force a bien penser. Avec le mariage pour tous, c’est ce qui est en train de se passer. Non content du mariage homosexuel qui a été reconnu et de la PMA qui va l’être avant que la PMA ne le soit, le mariage pour tous veut que l’on pense bien. Pour y parvenir, il a décidé d’introduire la théorie du genre partout dans la société en exigeant qu’elle soit enseignée dans les écoles dès le plus jeune âge et qu’elle s’accompagne d’une réforme du vocabulaire porteur d’une distinction sexuée. On connaissait la police religieuse et politique. Est en train de se mettre en place une police mentale et sociétale avec une importance mondiale en raison des réseaux très puissants au niveau international relayant cette police de la pensée afin qu’elle repense totalement la culture planétaire. 

Enfin, on n’a pas une idée complète de la rupture introduite par le mariage pour tous sur le fond et sur la forme, si on n’a pas une idée des conséquences que celle-ci va avoir. Le processus dans lequel ce mariage s’inscrit est celui d’une prise de pouvoir à l’état pur. Commencée à la Renaissance où ce qui intéresse la culture n’est pas, l’homme  mais le pouvoir sur l’homme, ce processus est en train de parvenir à maturité. Le pouvoir de l’homme s’accomplissant dans le pouvoir de l’homme sur l’homme pour que ce pouvoir triomphe il est indispensable que l’homme disparaisse. Concrètement, l’apparition du robot capable d’émotions est l’expression du triomphe de ce pouvoir total faisant disparaître l’homme en le réduisant à une pure fabrication. 

Au nom de l’homme, sans nous en rendre compte, nous marchons vers un totalitarisme doux.  Le nouvel aveuglement de notre temps : là est le grand changement de ces dix dernières années. 

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