Mais pourquoi Thierry Lepaon veut-il tant de mal à la CGT ? <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
L'énergie que le secrétaire général de la CGT déploie pour se maintenir à son poste le plus longtemps possible a de quoi déconcerter.
L'énergie que le secrétaire général de la CGT déploie pour se maintenir à son poste le plus longtemps possible a de quoi déconcerter.
©Reuters

Je reste !

L'énergie que le secrétaire général de la CGT déploie pour se maintenir à son poste le plus longtemps possible a de quoi déconcerter. Ainsi, il a obtenu de garder la main sur le choix de la direction qui doit lui succéder.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

Voir la bio »

Dans les quelques énigmes de notre époque, l’acharnement que Thierry Lepaon met à garder son poste de secrétaire général de la CGT, en dépit des contestations dont il fait l’objet, figure en bonne place. A part un immense ressentiment contre l’organisation qui le rejette, rien ne peut justifier cette obstination qui affaiblit à ce point le premier syndicat français. A l’issue du comité confédéral national qui se réunit, il devrait sauver sa tête à la commission exécutive, faire approuver une nouvelle direction dont les modernistes les plus prometteurs sont exclus. Un véritable suicide collectif.

Un problème de légitimité

Une partie de l’argumentation de Thierry Lepaon pour justifier son maintien en poste repose sur l’existence d’un complot interne organisé par ses opposants. Ce réflexe obsidional bien connu ne répond pas aux questions que les militants de la CGT posent à leur secrétaire général depuis son arrivée: quelle est la ligne du syndicat? quelles sont ses propositions? quelle stratégie d’influence déploie-t-il pour peser dans le débat public?

Thierry Lepaon s’est non seulement révélé incapable de construire une ligne politique dépassant les quelques slogans simplistes dont il émaille son discours, mais il a multiplié les bourdes qui l’ont décrédibilisé. Par exemple, il a pris des positions anti-palestiniennes sans aucun mandat de ses adhérents.

Très rapidement, sa légitimité de secrétaire général s’est dégradée au point que, lors du violent conflit de mai 2014 à la SNCF, la fédération des Cheminots l’a désavoué publiquement. Thierry Lepaon avait tenté de négocier une issue avec le gouvernement que ses militants ont finalement refusé de suivre.

Un risque social collectif qui s’accroît

L’exemple du conflit à la SNCF permet de comprendre l’inquiétude du pouvoir vis-à-vis de la gouvernance actuelle de la CGT. En cas de conflit social majeur, il ne faudra pas compter sur Thierry Lepaon pour reprendre la situation en main et pour amener à une sortie raisonnable de conflit.

Dans la perspective d’un durcissement prochain des relations sociales en France, lié aux mesures d’austérité que l’Allemagne exige, mais aussi dû à une aggravation de la Grande Dépression, le fait que les composantes de la CGT soient en roue libre ne peut qu’inquiéter. Un état d’alerte maximale sur la conflictualité sociale doit être déclaré.

Une stratégie de martyr djihadiste

Thierry Lepaon a très bien compris la peur qu’inspire aujourd’hui un réveil de la CGT et c’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a choisi d’installer, pour lui succéder, les plus durs et les plus staliniens de la confédération. C’est sa façon à lui de miner le terrain social: soit le gouvernement continuera à composer avec lui, soit il lâchera la bride à Philippe Martinez, dont la rigidité est bien connue.

Pour le pays, cette configuration est extrêmement dangereuse. Au moment où l’imagination devrait le pouvoir, c’est l’absence de vision et le passéisme le plus absurde qui triomphe.

Au fond, la nouvelle équipe qui devrait être proposée aujourd’hui au comité confédéral national ressemble à une ceinture blindée de bâtons de dynamite: en cas d’explosion, l’onde de choc sera terrible, et Thierry Lepton se balade désormais avec le doigt sur le détonateur.

La CGT sur la route de sa marginalisation

Cette pauvreté stratégique tranche avec l’appétit de débat que l’on constate dans les rangs de la confédération. La base de la CGT veut le changement, et il faudra voir si elle parvient à se faire entendre au CCN. Statutairement, Thierry Lepton doit regrouper une majorité des deux tiers pour installer l’équipe qu’il a choisie pour lui succéder.

Sur ce point, il se heurte à deux risques.

D’abord il pourrait être à nouveau désavoué par les adhérents, ce qui ouvrirait une crise de succession.

Ensuite, si ses propositions passent, il risque d’être à terme lâché par Philippe Martinez, lorsque celui-ci n’aura plus besoin de lui pour diriger. Et ce jour-là, la France aura franchi une étape de plus dans l’escalade.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !