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Les trois (fausses) excuses de Macron pour ne pas mettre en œuvre son programme de réduction de dépenses publiques
©LOIC VENANCE / AFP

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Les grandes lignes du budget de 2020 dévoilées en début de semaine ne laissent plus de place au doute : ce n’est pas pendant le quinquennat Macron que la France fera des économies dans ses comptes publics et dans sa gestion des effectifs.

Aude Kersulec

Aude Kersulec

Aude Kersulec est diplômée de l' ESSEC, spécialiste de la banque et des questions monétaires. Elle est chroniqueuse économique sur BFMTV Business.

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Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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C’est officiel, le gouvernement abandonne cette année son projet d’alléger les effectifs de fonctionnaires. En sortant cette nouvelle au lendemain des festivités très mouvementées du 14 juillet, l’exécutif pensait peut-être que la nouvelle passerait inaperçue.  Il avait presque raison. Les dépenses publiques ne baisseront donc pas cette année ni même l’année prochaine. Les gilets jaunes ne s’en plaindront pas. La gauche ou ce qu‘il en reste non plus. La droite ? Oui mais quelle droite ? Le budget 2020 que préparent les hommes de Bercy comme chaque année à la même époque renoue avec nos vieux démons. Jacques Chirac avait appliqué le concept. François Hollande en a abusé. Nicolas Sarkozy avait été obligé de le reprendre pour éteindre la crise de 2008. 

Emmanuel Macron, en dépit de ses ambitions de construire un monde nouveau fondé sur la compétitivité, en revient aux vieilles recettes. 

Les dépenses publiques augmenteront de 0,5% pour les deux années à venir, soit 8 milliards d’euros en tout. 2020 devrait donc connaitre un déficit de 2,1%, loin du quasi équilibre que l’on nous promettait en début de quinquennat. Loin aussi, les promesses de suppression de postes et de coupes (- 15 000 fonctionnaires au lieu de – 50 000) dans la fonction publique ou l’allongement de la durée de cotisations pour les fonctionnaires. 

Emmanuel Macron, qui avait calqué son programme économique sur celui de François Fillon mais avec une application plus séquencée et moins autoritaire, consent donc à abandonner la plupart de ses promesses de campagne, celles-là mêmes qui le faisaient passer pour un libéral pragmatique de la situation française principalement préoccupé par la restauration de la compétitivité française.

Il sera donc fidèle à ses prédécesseurs et comme pour ses prédécesseurs, ses amis politiques vont lui trouver toutes les excuses ou les raisons de ne pas déranger les habitudes. En gros, le pouvoir actuel en a déjà trois séries.
La 1ère série d’excuses revient répondre à la situation sociale et notamment à la crise des Gilets jaunes, une crise de réalisme économique et sociale où les classes populaires se sont senties oubliées des réformes en cours, qu’elles ont subi sans en percevoir les bienfaits. C’est vrai que les mesures de début de quinquennat ont bénéficié en priorité aux entreprises et aux investisseurs. Donc aux personnes qui ont du capital. Et le fameux « ruissellement » de richesses n’a pas fait de miracle. Du coup sont arrivés les Gilets jaunes, qui eux voulaient du pouvoir d’achat et qui se sont révoltés contre les taxes, en l’occurrence celles sur le carburant. Pour que le niveau de prélèvements soit moins élevé, il aurait fallu couper dans les dépenses.
Répondre à la crise des Gilets jaunes par une subvention de la consommation ou de l’épargne peut dans un premier temps contenter le consommateur et doper temporairement la croissance. Mais à long terme, ça ne résout rien puisque ça reporte le problème. Plus grave, il semble bien qu’une grande partie de ce pouvoir d’achat distribué aux salariés, notamment via la prime de fin d’année, ait été stockée en épargne de précaution.

La deuxième raison évoquée, ce sont les taux bas que les banques centrales continuent de pratiquer à des niveaux proches de 0, voire même négatifs. Résultat, l’Etat ou les organismes sociaux peuvent continuer de s’endetter. Le stock de dettes publiques s’accroit encore mais le coût de cette dette n’a jamais été aussi peu cher. Alors pourquoi se priver ? Nombre d’économistes soutiennent que la période est même opportune pour réaliser de grands investissements financés par de la dette. Mais ces mêmes experts, Olivier Blanchard, l’ancien économiste du FMI en tête, soutiennent que cela ne marche que pour les pays déjà lancés dans une opération d’épuration des dépenses publiques. C’est-à-dire que les économies réalisées par des intérêts moins élevés à rembourser ne doivent pas être utilisés pour augmenter les dépenses courantes de l’État, mais pour investir dans des projets de grande envergure, comme la transition écologique. 



Enfin, la dernière excuse pour ne pas baisser les dépenses publiques, c’est de dire qu’on va réduire le déficit budgétaire, non pas par le poste des dépenses, mais par celui de recettes. Et pour cela on crée de nouvelles taxes pour conserver un niveau élevé de recettes fiscales et équilibrer la balance. La taxe écologique sur les billets d’avion en est un énième exemple, sans compter la taxe GAFA votée la semaine dernière au Parlement ou la taxe additionnelle sur les cartes grises et la taxe soda, qui ont moins fait parler. La création d’une nouvelle taxe ne fera jamais baisser les dépenses publiques, puisqu’elle nécessite de toute façon une administration pour mettre en place les avis d’impôt et reverser les contributions. Et créer de nouveaux impôts ne simplifie pas le système et complique le rapport à l’impôt des contribuables, qui ont l’impression de payer des taxes sur tout et tout le temps.

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