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Les 1001 pièges qui attendent les Républicains au-delà du calendrier des primaires
©Reuters

A la bonne heure

Alors que le parti Les Républicains se prépare d’ores et déjà pour la primaire qui désignera son candidat pour l’élection présidentielle de 2017, la date de cette primaire est toujours en suspens, même si novembre 2016 semble tenir la corde. Dans tous les cas, le parti leader de l’opposition n’a clairement pas intérêt à avancer le scrutin. Explications.

Bruno Jeudy

Bruno Jeudy

Bruno Jeudy est rédacteur en chef Politique et Économie chez Paris Match. Spécialiste de la droite, il est notamment le co-auteur du livre Le Coup monté, avec Carole Barjon.

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Atlantico : La primaire des Républicains pour l’élection présidentielle de 2017 aura a priori lieu en novembre 2016, même si certains évoquent l’idée de l’avancer dès cet été. Selon vous, quels dangers, quels pièges sont attachés à cette date ?

Bruno Jeudy : Je crois qu’il ne faut chercher aucun piège dans l’organisation de la primaire de la droite et du centre en novembre 2016. En 2011, les socialistes avaient organisé leur primaire à l’automne et n’avaient rencontré aucun problème. L’organisation de la primaire nécessite du temps en raison des conditions matérielles lourdes : la mise en place de 10 000 bureaux, la recherche de bénévoles… La logistique est très lourde, sans compter qu’il faut aussi organiser une communication tout autour de ces primaires pour mobiliser les électeurs de la droite et du centre, notamment ceux qui ne sont pas adhérents au parti LR et qui voudraient voter. Le débat sur l’avancée au printemps de la primaire relève plus de la tactique politique. Certains candidats, convaincus qu’ils sont favoris pour l’instant, auraient intérêt à l’avancer plutôt qu’attendre la fin de l’année. Dans tous les cas, avancer cette primaire, c’est prendre le risque de la bâcler, voire même de la faire capoter puisque la logistique oblige à avoir du temps pour bien organiser cette primaire:  être sûr d’avoir 10 000 bureaux, faire un minimum de communication sur qui peut voter, les conditions de vote, etc.

Au-delà de l’aspect logistique, se pose aussi la question des investitures pour les législatives de 2017. Nicolas Sarkozy souhaiterait les organiser cet été, soit avant la primaire.

C’est évidemment l’une des prérogatives du président du parti. Il essaye de tirer avantage de sa position institutionnelle pour essayer d’avancer la date des investitures en expliquant qu’il faut donner aux candidats désignés le temps de se lancer. En même temps, c’est évidemment pour tendre le bras aux futurs candidats aux législatives afin qu’ils apportent leur soutien à Nicolas Sarkozy comme candidat à la primaire. Ce n’est plus du fil blanc, c’est du gros câble. Mais cela ne marchera pas ! Cela ne marchera probablement pas parce que les autres candidats, que ce soit Alain Juppé, Bruno Le Maire, François Fillon et les autres s’y opposeront. Cela provoquera une nouvelle polémique inutile à l’intérieur du parti. Ce qui compte aujourd’hui c’est la primaire, pas les investitures aux législatives.

Novembre 2016, c’est cinq mois avant la présidentielle. N’est-ce pas un délai trop long ? La dynamique du candidat élu ne risque-t-elle pas de s’estomper ?

Je ne le pense pas. François Hollande ne s’est pas plaint d’avoir été élu en novembre 2011, cela l’a plutôt même mis sur orbite en lui donnant de l’élan qu’il n’a pas perdu. Cela lui a même peut-être permis d’obtenir la victoire puisqu’on a vu qu’elle a été obtenue sur le fil, et que cet élan avait commencé à faiblir durant le mois d’avril. En revanche, si l’on suit ce raisonnement, avancer la primaire, c’est risquer de voir perdre cet élan trop vite et donc de ne pas en bénéficier durant la campagne présidentielle qui, je le rappelle, bat son plein essentiellement entre février et avril, pas avant.

Ou au contraire, est-ce un délai trop court pour pouvoir élaborer un vrai programme, ce qu’attendent les électeurs ?

Je crois que le programme du parti LR pour la présidentielle de 2017 sera le programme de celui qui sortira vainqueur de la primaire. On voit la difficulté aujourd’hui des Républicains pour s’entendre autour des conventions qu’organise le patron du parti. On voit bien que les questions seront tranchées à l’occasion de la primaire. Chaque candidat aura son programme, et c’est ce programme qui servira de large base au programme du représentant de LR à la présidentielle de 2017.  

On peut imaginer que le Gouvernement fera tout pour occuper l’espace médiatique aux alentours de la primaire. La rentrée parlementaire est souvent propice aux grandes réformes… On peut aussi penser à la commémoration du centenaire de la bataille de Verdun, l’un des grands moments du XXe siècle de la France.

La question mérite d’être posée. On se souvient qu’en novembre 2011, la droite au pouvoir avait laissé les socialistes faire leur primaire. Elle avait même plutôt manié l’ironie, convaincue que cette primaire ne fonctionnerait pas et aggraverait la guerre entre les éléphants socialistes. Finalement, cela s’est plutôt très bien passé et le candidat socialiste avait été mis sur orbite. Donc, on peut effectivement penser que les socialistes sauront tirer les leçons de l’expérience inverse de 2011, et qu’ils occuperont le terrain de leur côté pendant que la droite débattra et choisira son champion. Est-ce que cela gênera pour autant la primaire ? Je ne crois pas. Je pense qu’il y aura un tel engouement populaire autour de cette primaire que tout le débat politique sera atomisé par cette élection du champion de la droite et du centre. Sous réserve évidemment qu’un évènement extérieur du type attentat ne vienne perturber la compétition interne. Mais je crois que l’attente est tellement forte de la part des électeurs de la droite et du centre que je ne pense pas que des contre-feux à gauche viendront perturber quoi que ce soit dans le déroulement de ces primaires.

En termes de financement, est-ce que les différents candidats auront le temps de mener à bien leurs levées de fonds selon vous ? Nicolas Sarkozy ne serait-il pas avantagé en tant que président du parti ?

Je crois que les principaux candidats ont déjà bien avancé dans leur collecte de fonds et que cela ne leur posera pas de problème pour faire campagne. Ensuite, Nicolas Sarkozy ne sera évidemment pas gêné par des questions de financement, même si aujourd’hui il n’est pas encore officiellement candidat. Il trouvera les fonds pour sa campagne. Toutefois, je pense qu’il fait absolument fausse route de vouloir perturber le calendrier de la primaire. Il aurait tort de se lancer dans une stratégie de mauvais joueur. La primaire est actée, lui-même est d’accord. Alors évidemment, on voit qu’il laisse ses lieutenants critiquer et perturber son organisation, de l’avancer, de mégoter sur le nombre de bureaux de vote… Mais tout cela me paraît vain. Je ne vois pas ce qui va enrayer la marche de la primaire et du centre, qui est lancée. En tout cas, son succès total est absolument nécessaire si la droite veut revenir au pouvoir en 2017. Si elle venait à être bâclée ou même entravée, ce serait alors l’assurance de la défaite pour la droite en 2017.

En résumé, la droite n’a pas vraiment intérêt à avancer la date de la primaire...

Bien sûr, l’été c’est trop court ! Il y a déjà eu beaucoup de temps perdu dans l’organisation de cette primaire. Un comité d’organisation en a défini les règles. Désormais, une commission travaille sur la préparation de l’évènement. Il faut un certain nombre de mois pour pouvoir la mettre en place. Cela prend du temps, on a vu que les socialistes avaient eu besoin de beaucoup de temps pour réussir la leur. Donc, il n’y a pas d’autre solution pour la droite que de suivre ce calendrier. Elle n’a pas de temps à perdre. L’avancer en été, cela voudrait dire qu’il faudrait déjà être dans l’organisation matérielle de cette primaire. Or, rien n’a réellement commencé aujourd’hui.

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