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Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE), s'apprête à donner sa signature qui sera imprimée sur les billets en euros à Francfort-sur-le-Main, le 27 novembre 2019.
Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE), s'apprête à donner sa signature qui sera imprimée sur les billets en euros à Francfort-sur-le-Main, le 27 novembre 2019.
©Daniel ROLAND / AFP

Atlantico Business

Tout rebond de l’activité en Europe semble désormais exclu au deuxième trimestre de cette année pour cause de guerre en Ukraine, d’un arrêt des fournitures de gaz et de pétrole russe et d’un vaste plan de solidarité entre les pays membres.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La Commission européenne devrait publier avant la fin de la semaine un plan de charge pour faire face à la situation économique plombée par la guerre en Ukraine et éviter toute rupture d’approvisionnement en énergie.

Les marchés financiers se sont tous mis au diapason de la baisse dans l’attente d’une situation qui devrait être très difficile. Les marchés d’actions se sont, sauf exception, tous mis aux abris. Au niveau macroéconomique, pendant que l’Amérique essaie de juguler l’inflation par une hausse de taux d’intérêt, on considère en Europe que la BCE peut attendre un peu avant de remonter les conditions d’endettement. A Francfort, on va donner du temps au temps. La situation européenne est très différente de la situation américaine.

Les Américains vivent la guerre en théorie. Les Européens la vivent en proches voisins. C’est très différent.

1er point : les prévisions de croissance économique pour les pays européens sont très nettement ralenties pour deux raisons évidentes : la guerre et l’inflation. Chaque mois qui passe coule un peu plus les pouvoirs d’achat.

Les situations sont un peu différentes selon les pays. En France, la croissance de l’après Covid est retombée à zéro. L’Italie s’est déjà repliée au 1er trimestre et ça va continuer. L’Espagne et l’Allemagne ont réussi à sauver une petite hausse mais ça se présente assez mal pour l’avenir.

Les prix à la consommation ont, en avril en zone euro, augmenté de 7,5% en rythme annuel, mais cette inflation est encore essentiellement tirée par la hausse des carburants (+44% sur un an). Les biens alimentaires et des produits industriels ont aussi augmenté de presque 5% en rythme annuel. Cette inflation est donc importée ou directement impactée par les difficultés d’importation. Elle n’a pas encore contaminé les salaires.

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Alors, pour les entreprises, c’est une bonne chose parce que leurs marges sont protégées et par conséquent, leur capacité de croissance aussi. Mais, et c’est le revers de la médaille, ces hausses de prix, sans impact sur les salaires, vont grignoter la consommation. Laquelle va hypothéquer la production etc. etc.

Donc la hausse des prix provoque d’abord une panne de consommation, puis au bout de quelques mois, elle se cristallise sur les revendications de salaires. L’inflation ne s’est pas reportée sur les salaires. En revanche, elle pèse sur les finances publiques puisqu’il faut recharger l’économie sociale et par conséquent, alourdit les déficits des finances publiques et sociales. Tant que les taux d’intérêt ne bougent pas (merci la BCE), les déficits sont finançables. Si les taux commencent à frémir, il faudra bien lâcher sur les salaires.

2e point : les pays européens doivent aussi assumer le contrecoup de la guerre en Ukraine. La question des réfugiés est posée, mais la contribution en aides alimentaires, en munitions et équipements va commencer à peser très lourd, d’autant que l'Union européenne se prépare à un nouveau train de sanctions à l'encontre des Russes. L’objectif est toujours de les asphyxier afin de mettre Vladimir Poutine en difficulté vis à vis de son opinion publique. Outre la mise sous sanction de nouvelles banques en les débranchant du système Swift, l’Union européenne s’est finalement mise d’accord pour s’affranchir des fournitures de pétrole et de gaz. L’arrêt total des importations de pétrole russe en Europe sera effectif au début de l’été prochain. Et l’arrêt des fournitures de gaz à la fin de l’année 2022. Tous les pays sont sur la même longueur d’onde, y compris l’Allemagne qui était le plus gros client. Le plus difficile n’est pas d’enfermer les robinets mais de trouver des ressources alternatives. Les négociations vont bon train avec l‘Algérie, le Qatar et les Etats-Unis ; les projets de base pour accueillir des bateaux pleins de gaz liquéfié afin de le redistribuer seront officiellement annoncés la semaine prochaine.   

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3e point : un renforcement des solidarités intra européennes. Pour que le mécanisme de sanction soit effectif, il faut que les pays les plus affectés soient dédommagés. La Pologne et la Bulgarie, les deux premiers pays à avoir été blacklistés par les Russes à propos du gaz, ont reçu très vite des approvisionnements venant de France, de Grèce et d’Allemagne.

L’abandon des approvisionnements en provenance de Russie va obliger l’Union européenne à inventer une politique énergétique nouvelle qui va passer par :

- une politique d’achat en commun nette groupée afin d’obtenir des prix attractifs ;

- une coordination des mécanismes de réserve qu’il faut finaliser pour passer l’hiver prochain, ça passe évidemment par une gestion coordonnée des stocks de sécurité ;

-enfin, de meilleures interconnections énergétiques entre tous les pays. 

4e point : Ces nouvelles configurations vont obliger les Européens à s’entendre. Le plus soumis à des changements profonds va être l’Allemagne. D’où ses réticences, l’Allemagne d’Angela Merkel avait misé l'essentiel de sa compétitivité sur les achats (pas chers) de gaz russe. La nouvelle chancellerie a obtenu gain de cause auprès de ses partenaires au sein de la majorité. L’Allemagne doit se construire une force de défense militaire, ce qu‘elle n’avait jamais fait depuis la dernière guerre mondiale. L’Allemagne doit abandonner le tout-au-gaz, ce qui va forcément couter plus cher à son industrie.

Enfin, l’Allemagne va devoir se replier sur l’Europe, au détriment de l’Asie et de l’est du globe où elle puisait jusqu’à maintenant sa puissance et sa gloire en écoulant son industrie.

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