La France des intégristes : ces cinq raisons qui justifient aux yeux de certains imams la polygamie<!-- --> | Atlantico.fr
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L'auteur René Guitton enquête sur certains intégristes du judaïsme, du christianisme et de l’islam.
L'auteur René Guitton enquête sur certains intégristes du judaïsme, du christianisme et de l’islam.
©Reuters

Bonnes feuilles

L'auteur René Guitton enquête sur certains intégristes du judaïsme, du christianisme et de l’islam pour démontrer leur négation des valeurs fondatrices de la France et leur refus du vivre ensemble. Extrait de "La France des intégristes" (2/2).

Pour ce qui est de la considération de la femme, et de l’épouse, l’intégrisme islamique impose bien des règles à sens unique, édictées, ou prétendument édictées par le Coran.

Sur la chaîne saoudienne Iqra TV, le cheikh Muhammad Al Munajid, qui y tient des prêches réguliers, indique la seule bonne relation concevable entre mari et femme : « Selon l’islam, une épouse doit se soumettre aux désirs de son mari. Le Prophète a dit : “Si un homme appelle sa femme pour satisfaire ses désirs, elle doit immédiatement venir à lui, même si elle est aux fourneaux.” »

L’imam salafiste Abdelkader Bouziane, installé en région lyonnaise avant son expulsion, s’est ouvert de ses conceptions dans une interview qu’il a accordée en avril 2004 au magazine Lyon Mag 1. Non seulement l’imam approuvait la recommandation du Coran punissant de lapidation la femme adultère, mais il estimait également qu’un mari qui voudrait rosser son épouse reconnue coupable d’infidélité aurait parfaitement le droit de se dégourdir ainsi, à condition toutefois de respecter des règles précises :

« Battre sa femme est autorisé par le Coran, mais dans certaines conditions, notamment si la femme trompe son mari […] Attention, l’homme n’a pas le droit de frapper n’importe où. Il ne doit pas frapper au visage mais viser le bas, les jambes ou le ventre. Et il peut frapper fort pour faire peur à sa femme, afin qu’elle ne recommence plus. »  Autre imam salafiste, Abdel-Hâdi Doudi se montre plus réservé en ce qui concerne la lapidation pour cause d’adultère, du moins en France. Quand je l’interroge sur le sujet, il me répond : « Non, c’est au tribunal islamique à en juger. »

Mon imam phocéen distingue habilement le territoire de l’islam du territoire de l’incroyance : il en connaît certaines lois avec lesquelles il a déjà eu maille à partir. Il estime que le territoire de l’incroyance n’est pas encore assez évolué pour admettre pareil châtiment !

Quant à l’égalité homme femme, les deux êtres sont complémentaires à ses yeux, et à ceux de l’islam, comme le jour est complémentaire de la nuit. Avec chacun son rôle : « Est-ce que ce serait logique que l’homme reste à la maison, prépare le biberon, la cuisine et que la femme aille travailler, et prenne la place de l’homme ? » me lance-t-il, appuyant sa démonstration d’un grand éclat de rire.

Soucieux de paix sociale, il voit même dans le maintien de la femme au foyer le plus sûr moyen d’enrayer la progression de la délinquance à Marseille, cité connue, il le déplore, pour ses règlements de compte sanglants :« La délinquance aujourd’hui est la conséquence de la femme trop libre. Si elle restait à la maison, il y aurait moins de délinquance. »

Victor Hugo, jadis, écrivait : « Ouvrez une école et vous fermerez une prison ». Je subodore qu’Abdel-Hâdi Doudi pourrait être fortement tenté de parodier l’auteur des Misérables en affirmant : « Ouvrez un harem et vous fermerez une prison. » Car, avec un bon rire gras, il me fait l’éloge très islamo-gaulois de la polygamie, encore interdite en France : « Peut-être qu’un jour les États d’Occident auront compris, et feront une loi pour autoriser la polygamie. »

Mais l’homme, d’une infinie sagesse, ajoute : « Si l’islam l’autorise, cela entraîne des devoirs de la part du mari. Il doit subvenir aux besoins de tous ses foyers. » En revanche, impensable d’autoriser l’inverse, la polyandrie, la possibilité pour une femme d’avoir plusieurs époux ! L’imam a ce cri du coeur : « Impossible ! Parce que si elle est mariée avec quatre hommes par exemple, et qu’elle tombe enceinte, qui va être le père ? L’homme, lui, il sait qui est son fils. » Il dit bien « son fils », et non « son enfant » !

Ce refus de la polyandrie, Mahdy Ibn Salah de Stains me l’exprime aussi avec force. D’autant plus qu’à ses yeux la femme se doit de respecter l’interdiction de l’adultère, faute de quoi elle prend le risque de la mort par suite de lynchage. Le prédicateur est très attaché à cette condamnation, même s’il l’exprime avec une infinie subtilité, et après avoir longuement réfléchi et ciselé sa réponse : « Je ne renie pas la loi qui condamne la femme adultère à la lapidation. »

S’il consent, du bout des lèvres, à admettre que la femme est l’égale de l’homme, c’est pour ajouter immédiatement que cette égalité ne l’empêche pas d’être placée sous la protection de son mari. C’est une question, si l’on ose dire, de position, transcrite ici fidèlement : dans la relation homme femme il y a une dimension horizontale et une dimension verticale.

La femme est soumise à l’homme, horizontalité, et l’homme est soumis à Dieu, verticalité. Mais c’est en abordant la question de la polygamie que Mahdy Ibn Salah va me surprendre. Il m’en fait un vigoureux éloge, appuyé d’une démonstration indiscutable : un éventail de subtiles nuances qu’il me détaille minutieusement, et sur lesquelles je me garderai de tout commentaire ici, laissant au lecteur le soin d’en apprécier le postulat.

Il convient de distinguer cinq raisons qui, selon son interprétation de l’islam, autorisent la polygamie.

— La polygamie de nécessité : découvrant la stérilité de son épouse, surtout quand elle avance en âge, le mari se trouve contraint de prendre une autre femme pour assurer sa descendance, l’homme étant sur terre pour se reproduire, et ce toute sa vie. Dieu récompensera alors ses mérites et sa piété, en lui donnant des enfants.

— La polygamie de stratégie : un homme marié peut avoir intérêt, pour le bien même de son premier foyer, à une alliance économique ou culturelle avec une autre épouse. C’est la forme, musulmane et polygame, du vieux mariage de raison pratiqué jadis en Europe, qu’on peut ennoblir en le teintant d’une dose de pluralisme culturel : un Maghrébin peut souhaiter épouser une Pakistanaise pour découvrir, entre autres, un visage de sa religion différent de celui qu’il a connu jusque-là. Il enrichira ainsi sa culture de l’islam et ce sera un bienfait pour la communauté du Prophète.

— La polygamie de faiblesse : l’homme ayant une libido plus forte que la femme, et un besoin d’amour plus complet que celui donné par son épouse, il peut contracter un autre mariage.La polygamie de virilité : elle est offerte aux hommes soucieux de prouver leur virilité, leur puissance en société, notamment dans le monde des affaires où on sera tenté de lui faire confiance, car comme le dit la « tradition » : le meilleur des hommes est celui qui a le plus de femmes. Une variante du vieil adage : on ne prête qu’aux riches.

— La polygamie de virilité : elle est offerte aux hommes soucieux de prouver leur virilité, leur puissance en société, notamment dans le monde des affaires où on sera tenté de lui faire confiance, car comme le dit la « tradition » : le meilleur des hommes est celui qui a le plus de femmes. Une variante du vieil adage : on ne prête qu’aux riches.

— La polygamie de chair : la passion sexuelle de l’homme est ici divinisée, et donc autorisée, afin d’assouvir ses besoins de pratiquer le sexe pour le sexe.

Les obsédés sexuels et érotomanes frénétiques se voient ainsi reconnaître, par ce prédicateur salafiste qui invoque latradition islamique, la justification de ces « cinq piliers » de la polygamie. Le tout m’a été expliqué sur un ton docte, on ne peut plus sérieux, comme s’il s’agissait d’évidences qui m’étaient restées jusque-là méconnues, mais dont j’aurais tout intérêt à réaliser l’utilité et la pertinence. Surtout qu’en ultime argument, Mahdy Ibn Salah ajoute : « La polygamie est salutaire, elle est dictée par le respect envers l’épouse initiale : car la polygamie est faite pour éviter l’adultère ! »

 Extrait de "La France des intégristes : Extrémistes juifs, chrétiens, musulmans, le refus de la République"(Editions Flammarion), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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