L’absentéisme bat des records et confirme un désamour grandissant des Français pour le travail<!-- --> | Atlantico.fr
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Des salariés dans le quartier de La Défense.
Des salariés dans le quartier de La Défense.
©MIGUEL MEDINA / AFP

Atlantico Business

Les salariés français se sont absentés de leur travail plus de 24 jours l’année dernière, un record, c’est assez cohérent avec leur opposition au recul de l’âge de la retraite et à leur souhait de passer à la semaine de 4 jours. Inquiétant parce que ça remet en cause la valeur travail.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Il va falloir sérieusement s’interroger sur la valeur travail en France. Parce qu’après s’être opposés à 75% à la réforme des retraites, on découvre que les français ont désormais un  gout spectaculaire pour l’absentéisme. On est plus dans le vœu pieux de travailler moins , ou dans la revendication bruyante sur la retraite , on est dans la réalité vécue quotidiennement.

Pres d’un salarié sur deux s’est absenté l’année dernière pour des raisons de santé , d’accident , de stress , de transport , d’organisation familiale ou  tout simplement de ras le bol.

L’étude réalisée par Ayming/Ag2r/ la mondiale correspond à ce que Axa avait déjà repéré . L’augmentation de l’absentéisme très rapide est un effet collatéral du covid.

En un an, le taux d’absentéisme au travail serait passé de 37% des salariés à plus de 47%. Ce phénomène touche désormais plus de 3 millions de personnes.

L’absentéisme dure en moyenne 24 jours par an. C’est-à-dire en gros l’équivalent de la durée des congés d’été . Si on ajoute à cela l’effet des 35 heures par semaine , les congés d’hivers (ou divers)  et variés, les cas de force majeure pour cause de grève des transports ou d’école (faut bien garder les enfants),  certains réussissent l'exploit de ne plus  travailler qu’un jour sur deux en moyenne sur un an.  

Cette tendance  avait démarré sérieusement au début des années 2000.

Elle touche à peu près tous les actifs de la classe moyenne dans le privé et presque plus encore dans le public. L’absentéisme est pratiqué pratiquement par toutes les classes d’âge , peut-être plus par les femmes que par les hommes. Plus par les seniors et les moins de 30 ans.

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Mais il ne faut pas s’étonner dans ses conditions que les opposants au recul de l'âge de la retraite aient été aussi nombreux et déterminés . Pas s’étonner que beaucoup revendiquent une semaine de 4 jours . Peut-être ne pas s’étonner que près d’un million de salariés ne sont pas revenus au travail après le confinement et qu’ils ont complètement abandonné cette forme d’activité de production et disparu dans la nature car, a priori, ils n’ont repris un autre travail.

Alors les raisons de cet absentéisme sont a priori connues . D’abord on s’absente principalement et officiellement pour des raisons de santé parce que les arrêts maladies de courte durée sont pratiques et assez faciles à obtenir. On peut toujours soupçonner les médecins d’être trop laxistes pour des raisons financières , sauf que les enquêtes montrent que les arrêts correspondent aussi tres souvent à des états de stress difficiles à gérer , des burnout plus ou moins graves et tout simplement des états de fatigue sans toujours des symptômes très visibles.

Bref , on peut toujours spéculer sur les vraies raisons d’une absence, notamment le lundi ou le vendredi , la réalité de cet absentéisme marque un malaise évident par rapport au travail.

Et la responsabilité de ce malaise est partagée. 

Le gouvernement et l’administration n’ont pas compris  les changements de rapport au travail et  se contentent de répondre au malaise via les services sociaux . On soigne le malaise alors qu on devrait s’attacher à rechercher et corriger les causes de ce malaise. Le digital est  en cause , il perturbe les habitudes du travail , il autorise le télé travail mais facilite aussi le non- travail.

Les syndicats ont évidemment  aussi leur responsabilité sur l’organisation et la qualité de vie au travail mais encore faudrait-il qu’ils puissent exercer leur contre-pouvoir . L’expérience de la réforme des retraites prouvent qu’on ne leur a guère demandé leur avis. Ce problème est au cœur du combat de la CFDT et notamment de Laurent Berger.

Mais la responsabilité est aussi et d’abord du ressort des entreprises qui découvrent cette pénurie de main d’ouvre  et ce besoin des salariés de travailler autrement . Ce besoin va de pair avec la responsabilité sociale et environnementale. Tout le monde s’y intéresse. Les entreprises qui sont entrées dans cette logique montrent que leur rentabilité n’en a pas souffert . Les exemples sont nombreux.

Quant aux fonds d’investissement ils commencent à se rendre compte que l’optimisation financière à court terme ne peut pas être leur seul objectif. Nombreux sont les fonds qui décident de ne s’engager que dans des entreprises qui respectent cette responsabilité.

Paradoxalement , les acteurs qui seront les plus difficiles à convaincre dans cet effort seront les consommateurs. Ils comprennent et défendent la nécessité d’améliorer la qualité au travail , et pour cause, ils travaillent eux-mêmes, ils comprennent et militent pour protéger l’environnement et lutter contre le réchauffement climatique. Ils comprennent beaucoup plus difficilement que tous ces efforts ont un prix qu’il faut bien payer…

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