Instagram a-t-il tué la photographie ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Logo du réseau social de partage Instagram.
Logo du réseau social de partage Instagram.
©Capture d'écran

Clic clic!

Instagram, un filtre, quelques clics et vous pouvez sublimer n'importe quelle photographie, même de très mauvaise qualité.

Gérard Uféras

Gérard Uféras

Gérard Uféras est né et vît à Paris. A partir de 1984, il entame une collaboration régulière avec le journal Libération, pour lequel il réalise de très nombreux reportages et portraits et qui organise sa première exposition. Il participe à la création de l’agence Vu en 1986 et publie régulièrement dans la presse française et internationale. Parallèlement au photo-journalisme et à son travail de portraitiste, il réalise des campagnes de publicité, travaille dans la communication institutionnelle et réalise des séries de mode. Il a notamment été lauréat du prix "Villa Medicis hors les murs". 

Pour découvrir son travail : www.gerarduferas.com

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Atlantico : Avec l’engouement autour de ces réseaux de partage de photos et de vidéos, les gens savent-ils encore prendre des photos ?

Gérard Uféras : Plus les choses sont faciles, moins les gens ont envie d’aller vers la difficulté et comme il est plus simple de prendre une photo avec un téléphone qu’avec un vrai appareil, l’engouement pour ces applications s’explique facilement. D’un clic, les gens peuvent recadrer une photo et lui donner un aspect vintage. Ils se contentent d’un effet qui les séduit très vite.

Pour certains, ces réseaux sociaux de partage de photos sont un outil de paresse intellectuelle car c’est l’appareil qui rend jolie la photo et non plus l’œil du photographe. Qu’en est-il ? Ce succès est-il vraiment dû à la facilité d’utilisation de ces réseaux ?

Oui et non. Sans photographe derrière, une photo même sur Instagram n’est pas une belle photo. Un très bon photographe peut faire des belles photos avec Instagram car c’est un simple outil qui offre des possibilités tellement larges qu’on a l’impression de faire des belles photos mais c’est un leurre. On ne fait pas une bonne photo simplement parce qu’on rajoute un filtre. On peut aussi faire de très jolies photos avec un téléphone, ce n’est pas l’appareil qui fait de belles photos mais le regard du photographe. Instagram et Hipstamatic sont des outils de séduction faciles mais le filtre est comme un artifice et on peut mettre des artifices sur n’importe quoi. On est aujourd’hui dans une sur consommation d’images, on ne remarque plus que la photographie peut être une chose extrêmement profonde.

Instagram incite-il à perdre le réflexe d’aller chercher son bon vieil appareil photo et à la place utiliser son smartphone ?

Oui. Mais les gens qui utilisent Instagram en connaitront certainement les limites. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui utilisent ce réseau social mais bientôt les photos paraîtront ordinaires et ne surprendront plus personne.

Comment expliquer cette mode des filtres vintage ? Peut-on attribuer le succès de l’application uniquement à ses filtres ?

On est nostalgique de tout. Instagram donne à quelque chose d’instantané la valeur de quelque chose qui a duré dans le temps mais c’est un trompe l’œil. Instagram permet à tout le monde d’être un « grand photographe » et de prendre des photos qui ont traversé le temps mais c’est un leurre. Il n’y a aucune réflexion sur l’histoire de la photographie ni sur la technique.

Cette révolution numérique est-elle liée à l’extrême rapidité de communication et de diffusion de l’image ?

Certainement puisque tout se fait en quelques clics. Ce qui se passe surtout c’est que les gens veulent donner du sens à leur vie sans en donner du poids. C’est l’angoisse de l’homme moderne qui ne comprend pas grand-chose au monde et qui cherche surtout à combler un vide et je pense vraiment que les gens finiront par s’essouffler et se lasser.

Propos recueillis par Karen Holcman

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