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Fin du monde 2012 : pourquoi le business de l'Apocalypse marche-t-il aussi bien ?
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Quand la Terre s'est arrêtée de tourner

La fin du calendrier Maya approche et les initiatives les plus improbables continuent à apparaitre. Concours de National Geographic Channel pour gagner un abri anti-atomique, supermarchés survivalistes, flambée immobilière à Bugarach, le village supposé être épargné par le cataclysme. Qu'est-ce qui provoque cette terreur et comment est-elle exploitée ?

Patrick  Simon

Patrick Simon

Patrick Simon est docteur d'Etat en droit, journaliste et professeur dans l'enseignement supérieur. Il est l'auteur de nombreux ouvrages d'économie et de droit.

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Atlantico : Alors que la fin du calendrier Maya approche et que l’hystérie eschatologique touche de plus en plus de gens, la chaîne National Geographic lance un grand concours pour gagner un abri antiatomique pour survivre à la fin du monde. Arrivée massive de touristes, flambée immobilière à Bugarach, reportages et articles en série, théories alarmistes, annonce de mouvements de foules. L’apocalypse en deviendrait presque moins inquiétante que les conséquences de sa non arrivée. Comment expliquer qu’un aussi grand nombre d’Occidentaux accordent de l’importance au calendrier Maya sans la moindre correspondance avec les doctrines monothéistes ?

Patrick Simon : Les Mayas autant que les pyramides ou les religions orientales ont souvent fasciné les Occidentaux qui, d’une certaine façon, se dépaysent et retrouvent le sens du merveilleux, du mystère et d’une certaine façon du religieux. Le calendrier Maya, s’il donne (en émettant toutes les réserves possibles sur son interprétation) une date qui fixerait le début de la fin des temps ou le moment d’un changement de civilisation, ne détermine pas une fin du monde précise mais une période où la lecture des astres (alignement des planètes, apparition des Pléiades et disparition de Vénus de l’horizon) est synonyme d’un changement d’état pour le monde et du renouvellement d’une humanité dans le cadre d’un nouveau cycle.

Les religions monothéistes, contrairement à cette civilisation précolombienne ou aux religions orientales, ne font pas référence à la notion de cycle, interprétant le temps d’une façon linéaire. Néanmoins, les dates concordent, je l’explique dans mon ouvrage, elles concordent autant avec les évangiles qu’avec le livre de l’Apocalypse et par conséquent, l’effet millénariste jouant, elles interpellent les occidentaux. De plus, on sent bien que l’organisation  du monde dans lequel nous vivons ne satisfait pas les attentes, bien au contraire, mais nous met devant une sorte de mur derrière lequel nous n’entrevoyons qu’un avenir inquiétant.

Bien que le phénomène soit moins répandu en France qu’aux Etats-Unis, un véritable commerce du « survivalisme » s’est développé : rations alimentaires, purificateurs d’eau, manuels de survie, bunkers, armes à feu. Opérations marketing ou symptôme d’une civilisation qui a peur de tout ?

Les deux ! D’une part, notre civilisation, totalement matérialiste et orientée vers la production et la vente de produits, a inventé le marketing et l’exploite dans tous les domaines possibles (politique, artistique, économique, religieux…) et, bien sûr, dès qu’une opportunité se présente, essaie d’en tirer du profit en thème de survivance comme vous le présentez dans votre question, mais également au niveau cinématographique, en littérature ou dans les médias (comme vous le faites d’ailleurs vous-même) ou comme l’a décidé la chaîne Syfi qui se dédie à l’Apocalypse jusqu’au 21 décembre. D’autre part, cette civilisation devient frileuse et essaie de se protéger. Elle a perdu le goût du risque… et c’est vrai qu’elle a peur, mais le monde n’est-il pas dangereux ?… elle s’alarme donc pour tous les phénomènes qui lui paraissent présenter des risques, serait-ce des phénomènes de type irrationnel (mais on retrouve cette attitude dans le jeu des marchés financiers) et les multiplie par le biais des TIC qui créent une sorte d’égrégore en réseau, c’est-à-dire de pensée commune qui existe par elle-même sur un sujet donné.

Quelles conséquences peut avoir l’imminence du 21 décembre 2012 sur la consommation ? Sur les marchés, peut-on imaginer une paralysie généralisée ou au contraire des opérations ambitieuses et opportunistes ?

Cela va dépendre de la diffusion de cet état d’esprit ou de la consistance de l’égrégore créé ; mais, je ne crois pas que cela ait une grande influence sur les marchés ou sur la consommation ; de la peur ressentie à l’acte d’achat protecteur (denrées alimentaires ou autres) il y a un pas que peu de gens franchiront, préférant attendre le passage de cette date fatidique où il n’arrivera rien de dramatiquement mondial. Je penche plutôt pour des opérations économiques ambitieuses et pour un calme retrouvé le lendemain, alors même que l’Apocalypse surviendra dans les deux années qui suivent. Elle ne se traduira pas par la fin du monde, comme on peut le penser, mais par la fin d’un monde ; ni par la fin des temps, mais par la fin d’un temps, certainement cosmique, lié à un changement d’ère si l’on se réfère au lever du soleil à l’équinoxe du printemps dans le signe du verseau et non plus le signe du poisson ; ni par la fin de l’humanité lors d’une catastrophe unique (écrasement d’un astéroïde ou explosion d’un supervolcan…), mais par un enchaînement de catastrophes économiques et environnementales qui va plonger le monde dans un chaos général.

Imaginons que le jour se lève sur l’humanité le 22 décembre 2012, que se passera-t-il ? Des plaintes pour arnaque, des conséquences jurico-commerciales?

Il se lèvera ! Des plaintes ? Il faudrait qu’il y ait escroquerie, mauvaise foi… Des conséquences juridiques civiles ou commerciales ?... mais qui vous dit que ces événements ne se dérouleront pas dans un temps très proche… et étant donné la lenteur de notre justice - 1,5 années pour rendre un jugement au premier degré, 2 ans en appel et 2 de plus en Cassation : tout sera consommé… d’ailleurs mon livre « Autopsie de l’Apocalypse » répond à toutes ces questions !

Propos  recueillis par Jean-Baptiste Bonaventure

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