Face au risque Mélenchon, les chefs d’entreprise imaginent deux scénarios aussi coûteux l’un que l’autre<!-- --> | Atlantico.fr
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L’hypothèse d’une majorité pilotée par Jean-Luc Mélenchon commence à inquiéter les chefs d'entreprise.
L’hypothèse d’une majorité pilotée par Jean-Luc Mélenchon commence à inquiéter les chefs d'entreprise.
©GERARD JULIEN / AFP

Atlantico Business

L’hypothèse d’une majorité pilotée par Jean-Luc Mélenchon commence à effrayer tous ceux qui connaissent un peu le fonctionnement de l’économie. Les chefs d’entreprise ne veulent pas participer au débat, sauf que la plupart font déjà des scénarios.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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La montée en puissance de Jean-Luc Mélenchon commence à effrayer, non pas les milieux d’affaires internationaux (pas encore), mais plus particulièrement les chefs d’entreprise français. Beaucoup se souviennent de 1981 avec l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir, soutenu par l’union de la gauche entre le parti socialiste et le parti communiste. Il a fallu digérer deux années de galère et attendre le revirement forcé de la gouvernance, l’adhésion forte à l’Europe et le rapprochement avec l'Allemagne pour sauver le système économique français.

François Mitterrand est revenu dans les clous de la social-démocratie et les entreprises françaises se sont relevées mais les séquelles ont été longues à disparaitre. Les 35 heures ne sont pas digérées, les déficits se sont accrus et le chômage structurel n’est toujours pas résorbé. Quant à la gestion de services publics de la santé et de l’éducation, on ne peut pas dire qu’elle a été exemplaire d’efficacité. On paie toujours aujourd’hui le laxisme social. En voulant préserver le modèle français, on l’a finalement mis en danger. Les retraites, l’éducation et le système de santé. Des pans entiers de l’organisation de la maison France sont encore en risque de faillite.

Avec en mémoire les souvenirs de cette politique et les séquelles qui n’ont pas disparu, la possible arrivée au pouvoir de Jean-Luc Mélenchon a réveillé quelques frayeurs dans les milieux d’entreprise.

Les chefs d’entreprises, et notamment au Medef, se gardent bien de participer au débat politique. Ils glissent quelques chapitres de discussions intéressantes lors des universités d’été, Geoffroy Roux de Bézieux adore, semble -t –il, les débats de société, mais pas question de mettre un doigt dans les débat de politique intérieure lors des élections.  Ils participent sur la pointe des pieds à la mise en œuvre de la politique économique parce que ça les concerne, mais dès que ça devient polémique, ils se replient discrètement.

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Pas question d’intervenir dans la trousse à outils contre l’inflation. Elle est trop électoraliste. On fait confiance à Bercy en sachant que les choses sérieuses s’installeront après les élections. On verra donc tout cela après les législatives.

Seulement voilà : si Jean-Luc Mélenchon réussit son coup de poker menteur en gagnant une majorité au Parlement, on tombera dans un autre univers. Très différent même de celui qui avait été installé en 1981. François Mitterrand n’était pas hors système. Jean-Luc Mélenchon, lui, est hors système. Il embarque la moitié du corps électoral dans un train qui va passer en dehors du système politique et du système économique.

Ces propositions le placent en dehors du cadre de l’économie de marché qui sont au cœur du fonctionnement de la plupart des pays de la planète. Parallèlement, l’application de ses mesures économiques l'oblige à sortir du cadre de la démocratie. Ça n’est donc pas des réformes qu’il propose, mais la révolution dont il prépare l’organisation par le soulèvement populaire.

Face à une situation aussi scabreuse et incertaine, les chefs d’entreprise ne sont pas très bavards mais ils commencent à écrire deux scénarios possibles, dont les effets seront aussi catastrophiques l’un que l’autre.

1er scenario, Jean-Luc Mélenchon applique son programme parce qu’il y croit et que sa majorité assez hétéroclite n’a pas d’autres solutions que de le suivre, même si on a du mal à imaginer les socialistes et les écologistes adhérer à toutes les mesures de réformes qu’il préconise. Sur le terrain économique, Jean-Luc Mélenchon renforce le pouvoir de l’État, puisque l 'État finit par tout diriger, tout contrôler. Les revenus, les dépenses et les prix. C’est intenable dans la situation internationale actuelle. Nos partenaires, nos clients et nos fournisseurs ne marcheront pas. Les quelques cas de pays qui fonctionnent en autarcie ne sont guère séduisants. Il faut se tourner vers le Venezuela, Cuba, la Corée du nord, et aujourd'hui la Russie.

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Sur le terrain politique, il faut accroitre le pouvoir régalien et se résoudre à l’autoritarisme. Les chefs d’entreprises n’imaginent pas vivre dans l’isolement ainsi et ne voient pas comment la population le supporterait.  Ce premier scénario annonce la catastrophe économique, sociale et politique.

2e scénario, Jean-Luc Mélenchon a fait un programme délibérément démagogique et populiste de gauche mais il n’y croit pas. Il chercherait seulement à s’ouvrir un marché politique très large. Il a accueilli les orphelins du parti socialiste et les écologistes en mal de circonscription. Selon ce scénario, Jean-Luc Mélenchon ne croit pas à son programme qui n’a de valeur que pour gagner les élections, mais dont il sait qu’il ne sera pas appliqué parce qu’il croit en lui-même qu’il n’aura pas la majorité pour gouverner. Sa part de marché sera telle qu’il disposera d’un pouvoir de nuisance qui lui permettra d’exister pendant tout le quinquennat.

S’il arrivait au pouvoir comme Premier ministre, il aurait aussi à composer avec ses alliés sinon il serait vite bousculé en interne.

Bref, on peut dans ce cas-là imaginer un scénario comme celui de Mitterrand qui a payé son élection au prix cher en 1981 et 1982. Puis qui est revenu dans la norme des sociétés modernes gérées selon les principes de la social-démocratie keynésienne. Bref, de l’économie de marché d’un côté, pour créer de la richesse et une forte redistribution pour corriger les inégalités que le marché ne parvient pas à digérer.

On peut certes imaginer que Mélenchon soit porteur d’un tel cynisme, mais l’aventure est de toute façon très dangereuse. La France d’aujourd’hui est très différente de la France de 1981.

Par ailleurs, si Mélenchon ne croit pas à ce qu’il a promis, il sera lâché par beaucoup de ses troupes et très rapidement.

Ce deuxième scénario d’un Mélenchon qui ne réaliserait pas ce qu’il a prévu, annonce une période de trouble politique à haut risque.   

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