Énergies renouvelables : l’éolien et le solaire deviennent un jackpot pour l’Etat. Mais à quel prix pour le pays ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Une photo aérienne, prise le 16 avril 2022 à Cuxac Cabardes, dans le Sud-Ouest de la France, montre des éoliennes.
Une photo aérienne, prise le 16 avril 2022 à Cuxac Cabardes, dans le Sud-Ouest de la France, montre des éoliennes.
©Lionel BONAVENTURE / AFP

Manne financière

Selon la CRE (Commission de régulation de l’énergie), les énergies renouvelables et notamment les parcs éoliens implantés en France pourraient rapporter 8,6 milliards d'euros au budget de l'Etat en 2022 et en 2023. Une bonne nouvelle en trompe-l’œil ?

Jean-Pierre Favennec

Jean-Pierre Favennec

Jean-Pierre Favennec est un spécialiste de l’énergie et en particulier du pétrole et professeur à l’Ecole du Pétrole et des Moteurs, où il a dirigé le Centre Economie et Gestion. 

Il a publié plusieurs ouvrages et de nombreux articles sur des sujets touchant à l’économie et à la géopolitique de l’énergie et en particulier Exploitation et Gestion du Raffinage (français et anglais), Recherche et Production du Pétrole et du Gaz (français et anglais en 2011), l’Energie à Quel Prix ? (2006) et Géopolitique de l’Energie (français 2009, anglais 2011).

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Atlantico : Sous l’effet de la hausse des prix du marché, selon la CRE (Commission de régulation de l’énergie), les énergies renouvelables pourraient rapporter 8,6 milliards d'euros au budget de l'Etat en 2022 et en 2023. Ce bénéfice est-il à nuancer ? L’État gagne-t-il réellement de l’argent ? 

Jean-Pierre Favennec : Dès 2021 les prix de l’énergie ont considérablement augmenté du fait de la forte reprise économique postérieure au COVID. Les énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz naturel) représentant encore plus de 80 % de la demande mondiale d’énergie, l’appel à ces énergies fossiles a fortement cru. Mais le changement climatique et l’urgence de la transition énergétique conduisent les opérateurs à réduire les investissements en particulier dans les hydrocarbures. D’où une forte tension entre l’offre et la demande et une augmentation des prix.

Dès le début de 2022 le prix du pétrole avait retrouvé un niveau très élevé et le prix du gaz naturel avait été multiplié par un facteur cinq en un an.

L’invasion de l’Ukraine a accentué les tensions. La Russie est un important producteur de pétrole qui exportait de fortes quantités de pétrole brut et de produits pétroliers vers l’Europe. En outre la Russie fournissait 40 % de la consommation européenne de gaz naturel. La réduction des fournitures russes à l’Europe a accru le prix du gaz. Une part de l’électricité en Europe étant produite à partir du gaz, le coût marginal de l’électricité a fortement augmenté et est passé de 50 dollars par mégawatheure il y a deux ans à 200 ou 300 dollars selon les moments depuis février 2022.

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L’Europe est depuis de nombreuses années à la pointe de la lutte contre le changement climatique et pour cela privilégie le développement des énergies renouvelables, en particulier éolien et solaire. Ainsi l’Allemagne a multiplié les éoliennes en Mer du Nord et les panneaux solaires dans le sud du pays. La plupart des pays de l’Union Européenne ont suivi cet exemple à un rythme variable.

Le développement des énergies renouvelables a nécessité à l’origine, il y a une dizaine d’années, des subventions considérables. L’ »Energie Wende » (la transition énergétique en allemand) a nécessité à l’origine des centaines de milliards d’Euros par an en Allemagne.

La situation a désormais changé. Le coût de l’éolien et surtout du solaire a considérablement diminué en 10 ans. Au même moment, comme nous venons de le voir, le prix de l’électricité a considérablement augmenté. Désormais la production d’électricité à partir de renouvelables est très rentable.

Les énergies renouvelables sont-elles rentables sans aide de l’État ?

Bien entendu, tout dépend du niveau du prix de l’électricité. Ce prix a considérablement augmenté (il a été multiplié par un facteur supérieur à cinq) au cours des derniers mois. Parallèlement le coût des énergies renouvelables a très fortement baissé. L’Etat garantit aux producteurs d’énergies renouvelables un prix de reprise. Si le prix de marché, auquel les producteurs d’électricité d’origine renouvelable (éolien ou solaire) revendent leur électricité est supérieur au prix de reprise qui leur a été garanti au lancement du projet par l’Etat, le surplus du prix de marché par rapport au prix garanti est reversé à l’Etat. D’où des perspectives de recettes importantes pour l’Etat

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Est-il possible qu’avec ces énergies le consommateur et l’Etat trouvent leurs comptes lorsque les prix de l’énergie sont modérés ?

Les fortes variations du prix du gaz et de l’électricité au cours des dernières semaines rendent difficiles les prévisions. Alors qu’il y a deux ans les prix très modérés du gaz et de l’électricité rendaient encore nécessaires des subventions au secteur des renouvelables, la situation est désormais inversée. Le prix de l’électricité reste orienté à la hausse et il est peu probable qu’il diminue fortement dans un avenir proche.

 À terme, les investissements faits sur ces secteurs pourraient-ils être réellement rentabilisés sans un tel prix de l’énergie ? 

La forte baisse des coûts d’investissements surtout dans le solaire mais également dans l’éolien ont, avant la crise ukrainienne, facilité le développement des renouvelables. La volonté européenne de fortement développer la production d’électricité éolienne et solaire est indéniable. Réduction des coûts des renouvelables, augmentation du prix de l’électricité, volonté de lutter contre le réchauffement climatique ne peuvent qu’accélérer le développement des « énergies propres ».

Mais elles ne représentent qu’une part encore limitée de la demande totale d’énergie et elles sont intermittentes ce qui nécessite le recours à d’autres sources de production lorsqu’il n’y a ni vent, ni soleil. 

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