Débat TV Trump-Biden : les deux questions que se posent les milieux d’affaires<!-- --> | Atlantico.fr
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Le premier débat entre Donald Trump et Joe Biden aura lieu cette nuit de jeudi à vendredi, heure de l'Europe, sur CNN.
Le premier débat entre Donald Trump et Joe Biden aura lieu cette nuit de jeudi à vendredi, heure de l'Europe, sur CNN.
©Mandel NGAN / AFP

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Le premier débat entre Donald Trump et Joe Biden aura lieu cette nuit de jeudi à vendredi, heure de l'Europe, sur CNN. Il est attendu par le monde entier parce que ce duel pose deux questions auxquelles personne n’a de vraies réponses.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Jamais un débat d’élections présidentielles n’aura suscité autant d’inquiétude et de précautions de la part de la chaîne de télévision qui organise et diffuse l’événement. Tout a été prévu au millimètre : pas de public, pas de décor, pas de commentaires en dehors des prises de parole, et un chronométrage digne d’une compétition olympique.

Normalement, ce débat devrait attirer plus de 70 millions de téléspectateurs américains et entre 200 et 500 millions dans le monde, notamment en Amérique du Sud et en Europe.

C’est dire que cette élection inquiète et que les deux protagonistes intriguent. Ils intriguent par leur âge : 78 ans pour Trump et 82 ans pour Biden. C’est la première fois que les élections présidentielles voient des personnalités aussi âgées s’affronter. Ils intriguent par leurs personnalités : très show off d’un côté, trop old-school de l’autre. 

Pour beaucoup d’observateurs, ce duel marque l’appauvrissement de la classe politique américaine. La politique intéresse de moins en moins les jeunes diplômés qui préfèrent aller gagner de l’argent dans le privé plutôt que d’essayer de faire carrière chez les Républicains comme chez les Démocrates. Même les vieilles traditions en vigueur dans les grandes familles américaines, qui réservaient un de leurs héritiers au service de la politique, sont en train de disparaître. Aux États-Unis comme ailleurs, la démocratie offre désormais peu d’attractivité aux élites.

Mais ce qui obsède le plus les milieux d’affaires internationaux, ce sont deux questions :

- D’une part, ils veulent savoir pourquoi Donald Trump a encore aujourd’hui tellement de succès en dépit de ses erreurs, de ses outrances et de ses mensonges.

- D’autre part, ils veulent comprendre pourquoi le parti démocrate n’a pas réussi à fabriquer un successeur plus jeune à Joe Biden, au-delà même du manque d’attractivité de la politique américaine.

Première question : pourquoi Donald Trump a-t-il encore aujourd’hui autant de succès au point de sortir une fois de plus favori dans les sondages ? L’explication des politologues a toujours mis l’accent sur le talent de Donald Trump à comprendre la société américaine et à savoir qu’il existe une part non négligeable de la classe moyenne américaine complètement déclassée par les effets de la mondialisation, et ce n’est pas faux, du moins au départ. Le populisme est né d’une situation sociale difficile pour un bon tiers des Américains, particulièrement attentifs à toutes les promesses d’améliorations irréalisables, et Donald Trump n’a pas lésiné sur les promesses démagogiques : du social, de la lutte contre l’immigration et du protectionnisme, la recette a été utilisée aussi beaucoup en Europe.

Cela étant, il y a une autre raison moins avouable. Il a promis la prospérité économique et financière, et il a délivré en grande partie. D’abord, les aides d’un État providence se sont multipliées, les crédits immobiliers (limite supprime) ont permis aux Américains de reprendre leurs vieilles habitudes de vivre à crédit (y compris les étudiants). Mais ensuite, l’Amérique tout entière a la conviction que Donald Trump est le plus formidable money maker. 

C’est son image entretenue par les émissions de télévision et sa peopolisation dans les magazines, son goût pour tout ce qui est luxueux même si ça frôle la vulgarité. Enfin, il a gagné pas mal d’argent même si Forbes ne le classe plus parmi les plus riches d’Amérique. Trump a toujours su montrer qu’il était riche. Avec cette image, le peuple a le sentiment qu’il sait comment gagner de l’argent pour lui et pour les autres. Il a les clés. Et les résultats économiques des États-Unis sont florissants. Joe Biden n’est pas revenu sur tout ce qui marchait et qui avait été boosté par Trump. La bourse est animée depuis presque 8 ans par un dynamisme historique . Le Dow Jones et le Nasdaq ont plus que doublé, presque chaque année. 

Résultat : les milieux financiers et tous les cadres qui travaillent dans cette sphère financière sont truffés de plus-values, d’actions et d’actifs financiers en général, sans parler de l’immobilier. New York, les Hamptons dégoulinent d’argent. Mais en dehors de la classe sociale très investie dans l’industrie financière, il faut savoir que tous les salariés américains ont leur espérance de retraite qui a encore plus que doublé cette année. Les retraités eux-mêmes, qui vivent sur leur retraite par capitalisation, ont vu leur revenu à nouveau doubler de valeur depuis un an. Beaucoup d’Américains se sont enrichis, beaucoup d’autres Américains sont convaincus que leurs stock-options vont les rendre riches, et les retraités vivent bien. La grande majorité des Américains pensent que c’est grâce à Trump. Ils vont se pincer le nez, mais ils avouent dans les sondages que Trump a trouvé la martingale. La vérité macroéconomique oblige à dire qu’une société financée à crédit, comme c’est le cas des États-Unis, ne peut durer que parce que le dollar est la monnaie mondiale. Il faudra un jour ou l’autre assainir le système américain. Mais ce jour-là sera un autre jour.

La deuxième question est de savoir pourquoi Joe Biden n’a pas trouvé de successeur. L’hypothèse de mettre en selle Kamala Harris, sa vice-présidente, ne semble plus en vigueur. À tel point que Kamala Harris a disparu des écrans radars de la presse politique. Elle se fait très discrète, mais on explique à la Maison-Blanche qu’elle se tient prête au cas où Joe Biden aurait un accident. Ce qui est intéressant, c’est que les hommes d’affaires très influents auprès des Démocrates font fuiter un scénario très différent qui permettrait pour eux d’éviter Kamala Harris. Ces milieux d’affaires auraient convaincu Barack Obama et Bill Clinton de se mettre en chasse d’un candidat jeune et crédible qu’ils pourraient présenter et parrainer lors de la convention démocrate de septembre. Aucun nom sérieux n’a jusqu’alors circulé à l’exception d’un héritier Kennedy, mais cette hypothèse semble être morte-née. En revanche, les mêmes hommes d’affaires alliés à Barack Obama et Bill Clinton auraient obtenu de Joe Biden son accord pour s’effacer en douceur à une condition : qu’on lui évite l’épreuve du bilan. 

À titre d’information, beaucoup de Démocrates souhaiteraient qu’on ne bouleverse pas la politique économique en vigueur. Comme quoi, en démocratie, si beaucoup expliquent voter selon leur sentiment, leurs valeurs et leur morale, les mêmes hésitent rarement à voter contre leur portefeuille. 

Mais c’est un peu comme ça en France également. Non ?

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