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Bilan Insee 2017 :  ce rapport schizophrénique des Français à la démographie
©Reuters

Baisse des naissances

Malgré une volonté clairement établie dans les enquêtes d'opinion de voir l'immigration extra-européenne diminuer, les Français ne sont pas prêts à faire des efforts en matière de démographie.

Atlantico :  Les dernières données démographiques publiées par l'INSEE révèlent, une nouvelle fois, un affaissement de l'indicateur de fécondité, à 1.88 enfants par femme en 2017. Dans une étude publiée par l'IFOP au début de ce mois de janvier 2018 sur les théories du complot et leur acceptation, il apparaissait que 48% des Français approuvaient l'idée que l'immigration "est un projet politique de remplacement d’une civilisation par une autre organisé délibérément par nos élites politiques, intellectuelles et médiatiques et auquel il convient de mettre fin en renvoyant ces populations d’où elles viennent". Dans quelle mesure une telle croyance pourrait-elle, au contraire de la baisse constatée, provoquer une hausse de la natalité en France ? 

Laurent Chalard : Comme d’autres grandes théories complotistes qui circulent, le « grand remplacement » connaît un « succès » certain au sein de la population française car il repose sur une interprétation, qui, si elle s’avère erronée (il n’y a pas de « projet politique » !) et exagérée (la France ne se résume pas à La Courneuve !), concerne des évolutions démographiques, qui, elles, sont bien réelles, c’est-à-dire la diversification du peuplement de la France. Cette dernière évolution est consécutive d’une immigration quasi-continue depuis la Seconde Guerre Mondiale et d’un faible dynamisme démographique des populations « autochtones », peu fécondes depuis 1975, ce qui peut modifier localement totalement le profil ethnique de la population (le département de Seine-Saint-Denis en constitue un exemple-type). Or, cette évolution inquiète une large partie de nos concitoyens, qui redoutent de devenir minoritaires à terme dans leur propre pays. 

Dans ce cadre, on pourrait penser que la « réaction » logique des populations se sentant démographiquement menacées serait de faire plus d’enfants, pour pouvoir absorber plus facilement le flux des nouveaux arrivants. En effet, la « peur de disparaître » est, en théorie, susceptible de déclencher un choc psychologique auprès des personnes concernées, conduisant à l’adaptation de leurs comportements de fécondité à leur objectif, maintenir un certain volume démographique.

Dès lors, que peut nous apprendre la baisse constatée du nombre de naissances en France, en l’occurrence 767 000 enfants nés ? Quelle "psychologie" de la France peut induire cette baisse continue ? 

L’évolution des naissances à la baisse depuis 2010 montre que derrière les complaintes répétées d’une partie des Français face à la diversification du peuplement de l’hexagone, il n’y a aucune adaptation de leurs comportements de fécondité en conséquence. En gros, les Français ont tendance à vouloir « le beurre » et « l’argent du beurre », c’est-à-dire qu’ils aimeraient que la part des personnes issues de l’immigration extra-européenne en France se stabilise, voire diminue, mais ne sont pas prêts à changer de comportement de fécondité pour aboutir à cet objectif. En effet, rappelons que le moteur principal de l’immigration est économique, résorber les besoins de main d’œuvre, en particulier concernant les emplois que les Grançais ne veulent plus faire depuis bien longtemps (pensons aux mineurs !). Si les Français avaient maintenu un niveau de fécondité proche du seuil de remplacement des générations depuis 1975, la part des populations d’origine extra-européenne serait bien moindre qu’aujourd’hui et les quartiers « ethnicisés » beaucoup plus rares. Nos concitoyens, comme pour d’autres sujets, n’apparaissent donc pas très cohérents avec eux-mêmes !

Comment appréhender l'idée du "grand remplacement" au travers de ces chiffres ? 

La poursuite de la baisse de la fécondité peut paraître, au premier abord, constituer un argument  venant renforcer l’idée de « grand remplacement », tout du moins sous l’angle démographique, l’angle politique apparaissant ridicule. Cependant, si le prolongement des dynamiques démographiques actuelles de la France laisse à penser que la part des minorités ethniques d’origine extra-européenne va continuer de s’accroître dans les prochaines décennies, elles demeureront minoritaires (il n’y a pas « une » minorité ethnique en France, mais « des » minorités), d’autant qu’il ne faut pas non plus sous-estimer l’impact des enfants issus de couples mixtes, qui, dans leur grande majorité, se considéreront comme Français, même si leur apparence physique pourra révéler des origines variées.

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