Abracadabra : comment le gouvernement creuse le déficit de la France sans en avoir l’air en 4 leçons<!-- --> | Atlantico.fr
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Abracadabra : comment
le gouvernement creuse le déficit
de la France sans en avoir l’air
en 4 leçons
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Tous tondus !

François Hollande le sait, il ne pourra pas échapper un jour ou l'autre à une politique de rigueur. En attendant, quelques petits conseils pour faire passer la pilule tout en douceur...

Aurélien Véron

Aurélien Véron

Aurélien Véron est président du Parti Libéral Démocrate et auteur du livre Le grand contournement. Il plaide pour passer de l'Etat providence, qu'il juge ruineux et infantilisant, à une société de confiance bâtie sur l'autonomie des citoyens et la liberté. Un projet qui pourrait se concrétiser par un Etat moins dispendieux et recentré sur ses missions régaliennes ; une "flat tax", et l'ouverture des assurances sociales à la concurrence ; le recours systématique aux référendums ; une autonomie totale des écoles ; l'instauration d'un marché encadré du cannabis.

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François Hollande est comme Nicolas Sarkozy. Il voit le navire couler, mais il se tâte dans le choix de la colle à rustine dans l’espoir de colmater les brèches dans la coque. Le coût de la protection sociale atteint presque 1/3 de notre PIB, avec des dérapages annuels considérables aggravés par le vieillissement de la population.

Avec un âge de départ à la retraite prématuré, des freins considérables à l’activité qui suppriment la croissance et créent un chômage élevé, le coût de ce modèle ultra dépensier s’éloigne de plus en plus des recettes. Plutôt que de repenser intelligemment notre protection sociale, la gauche préfère comme la droite approfondir sa technique de tonte indolore des cotisants contribuables.

Leçon numéro 1 : brouiller l’écoute du contribuable

Il faut plonger le contribuable dans la confusion afin que l’information fiscale ne lui parvienne plus clairement. L’impôt sur le revenu n’est pas aimé, et il rapporte peu. Sa mauvaise image interdit de l’augmenter sans opérer un choc fiscal électoralement préjudiciable.

Il existe toutefois pour l’État des solutions malines qui s’intitulent prélèvements « sociaux »
. Sur les revenus du travail et de l’épargne. Sur l’épargne, par exemple, en 1996, 1997, 1998, 2004 et 2009 sont inventés la CRDS à 0,5 %, temporaire, la CSG (contribution sociale généralisée) à 3,4 %, également temporaire, le « prélèvement social » à 2 %, la contribution de solidarité autonome à 0,3% et le prélèvement pour le RSA à 1,1 %.

Leçon numéro 2 : multiplier les petites hausses pour tromper l’ennemi

La CSG passe de 3,4 % à 7,8 % en 1998, 8,2 % en 2005 et sans doute 10,2 % en 2012. C’est temporaire on vous dit. Le « prélèvement social » passera de 2 % à 3,4 % en 2011 et à 5,4 % en 2012, c’est pour financer les retraites insiste-t-on. Que des petits chiffres avec des noms que personne ne retient. Au final, la note grimpera tout de même à 17,5 % de prélèvement lorsque les promesses de François Hollande seront réalisées.

Ça, c’est hors impôt sur le revenu et hors ISF, c’est prélevé discrètement à la source avec plein de lignes pour noyer le poisson. Et spolier l’épargnant, essentiellement issu des classes moyennes et supérieures, celui qui a sacrifié une partie de sa consommation pour épargner et financer l’économie. Les quelques milliers de super riches servant d’argument de vente à l’électorat populaire, y échappent eux largement, beaucoup vivent ailleurs à l’image de nos grands sportifs et artistes célèbres qui se partagent entre Londres, Bruxelles, la Suisse et les États-Unis, ou qu’ils bénéficient de conventions fiscales dérogatoires.

Leçon numéro 3 : faire bouillir l’eau à petit feu pour attendrir le gibier sans douleur

En 2010, les prélèvements obligatoires pesaient 822 milliards d'euros. En 2011, 872 milliards, et 921 milliards en 2012, soit 100 milliards de plus en deux ans. Pas mal, non ?

Et pourtant, personne ne bronche. Pour arriver à cette léthargie collective, il faut multiplier les petites hausses qui donnent chacune l’impression que ce n’est pas grand chose. Pas grand chose plus pas grand chose, et on a monté la charge de 100 milliards (et une pression fiscale qui passe de 42,5 à 44,5 % du PIB). C’est pas du grand art, ça ? Si le gouvernement était aussi bon à réduire son train de vie qu’à réduire celui des contribuables, la question du déficit serait réglée depuis belle lurette. Mais ça, il n’en est pas question.

Leçon numéro 4 : attirer l’attention sur le doigt du sage qui montre la lune

En ouvrant le débat sur la préférence pour une hausse de la CSG plutôt que de la TVA, François Hollande centre l’attention de l’électorat sur ces acrobaties fiscales obscures, pour mieux le détourner du véritable enjeu, la réforme structurelle de notre modèle social, inadapté et obèse. La gauche n’a pas plus envie que la droite de mettre le sujet sur la table. Dans un monde ouvert où l’information circule vite, aucun citoyen correctement informé ne tolérerait le maintien en l’état de notre protection sociale, une passoire ruineuse qui protège mal les cotisants au profit de rentiers (malins ou chanceux) du système. Le mieux est donc de ne pas ouvrir ce chapitre fondamental.

L’ennui, c’est que l’exercice relève de la quadrature du cercle. En 2011, les recettes des régimes obligatoires de sécurité sociale atteignent 426 milliards d'euros, ce qui ne freine pas l’explosion (annoncée depuis longtemps) des déficits « sociaux », un peu moins contrôlables chaque année (près de 20 milliards attendus cette année en incluant le Fonds de solidarité vieillesse ou FSV). A côté, la CSG ne rapporte environ « que » 85 milliards d’euros, et la TVA 131 milliards. Autant dire que pour diminuer sensiblement les charges sociales à modèle social inchangé, il va falloir augmenter considérablement TVA et CSG. Et inventer une palanquée de petits frères fiscaux. Le coût du travail baissera peut-être un peu, mais au détriment de notre pouvoir d’achat et de l’épargne surtaxés.

Inutile de nous demander à quelle sauce nous allons être mangés. Nous aurons probablement droit à la fois à une hausse de la CSG, et un autre jour à une hausse de la TVA. Fromage ET dessert. Avec plein de bonus, comme le 1 % logement que Jérôme Cahuzac souhaite ponctionner d’un bon tiers au profit d’administrations publiques trop grasses, et surtout trop fainéantes pour se moderniser et mieux servir le pays avec moins de ressources. La vraie réforme n’est pas pour demain. En revanche, l’exode des talents et des capitaux n’est pas prêt de s’interrompre. On devine les répercussions de ces choix sur la croissance et l’emploi en France…

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