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Mondial de l'automobile : finies les voitures de luxe, bonjour les véhicules respectueux de l'environnement ?
©Reuters

Atlantico Green

Le salon de l'automobile de Paris qui s'est ouvert jeudi 29 septembre est l'occasion de constater de profonds changements dans le secteur. Finies les voitures de luxe, de nombreux constructeurs parient désormais sur le marché des voitures éco-responsables.

Mathieu Flonneau

Mathieu Flonneau

Mathieu Flonneau est historien et universitaire à Paris I Panthéon-Sorbonne (SIRICE, CRHI), spécialiste d’histoire urbaine, des mobilités et de l’automobilisme. Récemment, il a co-dirigé et publié en 2016 Choc de mobilités. Histoire croisée au présent des routes intelligentes et véhicules communicants aux éditions Descartes&Cie, Vive la Route ! Vive la République ! Essai impertinent aux éditions de L’Aube, et L’automobile au temps des Trente Glorieuses. En majesté, l’automobilisme pour tous aux éditions Loubatières.

 

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Atlantico : Le salon de l'automobile de Paris qui s'est ouvert jeudi 29 septembre est l'occasion de constater de profonds changements dans le secteur. Finies les voitures de luxe, de nombreux constructeurs parient désormais sur le marché des voitures écoresponsables. Quels sont les moteurs de cette nouvelle tendance, s'agit-il plus d'un mouvement provenant de la demande des consommateurs, ou d'un choix plutôt orienté par les pouvoirs publics ? A quand remontre cette nouvelle tendance sur le marché ? Quels en sont les principaux enjeux ?

Mathieu Flonneau : Une part de ce vous avancez est démentie par la persistance toujours significative d’un marché de l’automobile de grand luxe bel et bien présent au Mondial de l’automobile 2016. Celui-ci continue d’alimenter le rêve automobile et l’engouement populaire.

Il reste que ce que vous évoquez est exact : la convergence autour des notions dominantes d'écoresponsabilité est patente. Notoirement depuis le début des années 2000, sous la pression des enjeux environnementaux et des réalités du monde fini, l’automobilisme ne peut plus se concevoir comme étant en apesanteur par rapport aux grandes préoccupations sociétales. Ce que j’appelle le nouveau contrat social de l’automobile impose désormais, par-delà d’éventuelles sanctions des pouvoirs publics adoptées à un niveau international, de composer avec les nouvelles réalités des mobilités. Celles-ci ont bousculé d’abord le modèle automobile traditionnel, de la conception à l’usage (aux usages, serait même plus précis), et désormais elles nourrissent de grands espoirs : ceux de la résilience d’un modèle de mobilité. Tout compte fait, l'automobilité n’est en rien périmée grâce à sa souplesse que des infrastructures, rajeunies et repensées en termes de convivialité et de partage de l'espace public, peuvent même dans certaines zones de pertinence conforter.  

La présence de plus en plus forte de voitures écoresponsables dans ce salon témoigne-t-elle, de la part des constructeurs, d'une volonté de créer un marché croissant de ce type de voitures ?

Les constructeurs automobiles sont clairement dans la résilience affichée, parfois même dans la repentance. Certains scandales liés aux tricheries avérées quant aux réelles émissions des moteurs diesel expliquent le zèle des convertis. Le phénomène est spectaculaire. Toutefois la « révolution électrique », comme on l’appelait déjà au Mondial de 2008, ce qui laisse déjà un peu de recul réaliste sur cette solution, n’est pas dénuée d’ambiguïtés : du « puits à la roue » et aussi dans ses phases de recyclage, l’électricité n’a rien d’idéal mais elle peut indiscutablement aider pour répondre à des usages précis.

Il n’en demeure pas moins que l’on a passé l’étape des seules pétitions de principe et des mots d’ordre marketing. Le progrès en sincérité est spectaculaire. Il est vrai que les procès, dans l'opinion et en justice, ont aidé à cela.

Peut-on penser que la marché de l'automobile écoresponsable pourrait menacer le modèle d'automobile classique ?

Clairement, nous n’en sommes pas encore là mais la tendance existe. Toutefois, ce n’est certainement pas en détruisant les bases de l’automobilisme classique que va se construire la révolution à venir. On peut même être sceptique sur la tentation de certains à se réjouir de la soi-disant fin du volant, claironnée ici ou là. Le besoin d’histoire et de réalisme dans les rythmes et les échéances envisagés, est ici patent et quelques mésaventures arrivées à certains géants appartenant à la galaxie de Silicon Valley peuvent de surcroît rendre humbles.   

Le modèle annoncé d’un futur automobile qui serait donc différent, et autonome également, ne remet-il pas en cause les fondements du rêve automobile ?

La réponse n’est pas simple, car elle engage sur l’avenir qui n’est pas le domaine de prédilection de l’historien mais je ne peux tout de même me risquer à apporter une pierre d’observateur à l’édifice des conjectures. Comme Commissaire invité de l’exposition qui se tient dans le hall 8 de ce Mondial de Paris, je partage avec vous ce premier retour d’expérience. Avec « Moteur ! L’automobile fait son cinéma », le Mondial s’adosse à la grande tradition culturelle de l’automobilisme. Le patrimoine et l’humanisme ont leur part dans la destinée désormais séculaire de cette magnifique invention qui ne cesse de se perfectionner et de s’enrichir. Le succès populaire de ce hall, qui invite à s’écarter des seules logiques commerciales logiquement présentes ailleurs sur le salon, en prenant de la hauteur aussi – c’est le plus haut espace de la Porte de Versailles : il se mérite ! – témoigne de la persistance des valeurs essentielles liées à l’objet sensationnel qu’est l’automobile. Cette authentique machine à sensations dit quelque chose de notre rapport intime à la liberté. Qu’elle parle en plus, et de plus en plus, à notre responsabilité ne lui enlève rien, bien au contraire.

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