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La fiscalité punitive contre les actionnaires a eu des effets catastrophiques
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Revue d'analyses financières

Le nombre d’actionnaires individuels en France a été divisé par deux en quinze ans.

Jean-Jacques Netter

Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est vice-président de l’Institut des Libertés, un think tank fondé avec Charles Gave en janvier 2012.

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Le nombre d’actionnaires individuels en France a été divisé par deux en quinze ans. Les chiffres sont clairs. La part de leurs placements financiers investis en actions est passée pendant cette période de 22 % à 13 %. Leur poids dans le CAC 40 est passé de 13,8 % en 2007 à environ 8,0 % aujourd’hui.

Les ménages ne détiennent plus que 11 % (3,3M d’actionnaires) de la capitalisation boursière française contre 30 %  (7,4M d’actionnaires) il y a trente ans. Les français ne placent plus directement que 4,2 % de leur patrimoine en actions. Malheureusement, loin d'assurer le financement des entreprises, par actions ou obligations, cette épargne est monopolisée par des placements immobiliers (environ 60% de l'épargne nationale) ou des actifs sans risque comme les Bons du Trésor français (Environ un tiers des fonds placés en assurance vie).

Pourtant, les français sont les plus gros épargnants d’Europe mais seulement 30 % de leurs économies sont investies dans une entreprise. Le reste sert à financer les déficits publics via l’assurance vie et le logement social via le Livret A…

Les actionnaires des sociétés françaises ne sont pas que des profiteurs sans scrupules

Les gouvernements Hollande n’ont cessé d’alourdir les prélèvements fiscaux et sociaux qui se cumulent pour les actionnaires dans un niveau de complexité hors normes. C’est la conséquence de la déclaration de François Hollande au Bourget « Mon ennemi c’est la finance »

Les prélèvements sociaux sur les dividendes ont été portés de 1,1 % en 1991 à 15,5 % aujourd’hui. Pour un contribuable imposé au niveau de 35 % à l’impôt sur le revenu la somme des prélèvements sociaux et fiscaux sur les dividendes atteint 59,1 %. Une entreprise qui réalise un profit de 100€ ne peut proposer, selon l’Ansa (Association Nationale des Sociétés par Actions),  à son actionnaire qu’un dividende net de 23,60€ contre 51,40€ en Allemagne, 53,30€ au Royaume Uni et 53,70€ en Italie.  

Pour un contribuable imposé au  taux marginal d’imposition de 45%, si la société dont il est actionnaire réalise 100 Euros de bénéfice, il ne perçoit en France que 36 € de dividendes net contre 53,70€ en Italie, 51,40€ en Allemagne et 49,40€ au royaume Uni (pour des dividendes compris entre 31 786 et 150 000£

Notre pays dissuade l’investissement en actions, limite le financement des entreprises et compromet à terme le maintien des centres de décision et de l’emploi en France.

La taxe de 3 % sur les distributions de dividendes ou les rachats d’actions ponctionne toutes les entreprises réalisant plus de 50M€ de CA et employant 250 salariés. Cette mesure non annoncée dans le programme du candidat socialiste représente une charge annuelle supplémentaire de 1Md€. Cela revient à dire que l’argent versé aux actionnaires propriétaires d’une entreprise est de l’argent superflu et donc doit être taxé à 3 % !

L’imposition de l’ensemble des revenus financiers a été alignée sur celle des salaires par François Hollande en 2012. Ce n’est pas seulement un non-sens économique, mais un énorme mensonge. Les prélèvements totaux sur les salaires atteignent 33,3 % des sommes perçues pour un contribuable imposé au taux marginal de 30 %. Pour la même personne les dividendes sont taxés à hauteur de 59,1 %. En ajoutant l’ISF dans les tranches d’imposition supérieurs, les sommes prises par l’Etat sur les dividendes dépassent même le montant perçu.

C’est une grave erreur économique qui frappe les ETI (Entreprises de Taille Intermédiaire) comme les grandes entreprises. Or la France manque d’ETI comparativement aux autres pays, notamment à l’Allemagne dont on souligne depuis longtemps l’efficacité de leur « Mittelstand ». Ce sera pour la France un effet de seuil supplémentaire qui découragera un peu plus les entrepreneurs de grandir. Le gouvernement explique en permanence qu’il s’intéresse aux PME, mais il s’attaque en fait à celles qui ont réussi et voudraient passer à la taille supérieure.                                                            

D’autre part, ces PME comptent beaucoup d’entreprises familiales, dont la pérennité fait en France particulièrement défaut. Très souvent ces entreprises ne dépassent pas une génération, leur fondateur préférant les vendre au moment de prendre sa retraite, et quelquefois s’exiler pour cause d’ISF.

Les grandes sociétés sont contrôlées par des actionnaires étrangers

La Banque de France dans son étude annuelle sur la détention des actions cotées des entreprises françaises, aussi bien des multinationales du CAC40 que des PME, confirme le poids toujours plus important des actionnaires étrangers dans le capital de nos entreprises, portant notamment à 23 sur 40 (19 résidentes en France, 4 non résidentes, dont Airbus et Arcelor Mittal) le nombre de groupes dont le capital est contrôlé par des actionnaires étrangers. En réalité, sans les groupes dans lesquels l'Etat français est fortement actionnaire, on arrive à 23 groupes sur 36, soit près des deux-tiers!

Les investisseurs étrangers détiennent donc de l’ordre de 42 % des actions des entreprises cotées tricolores. Une proportion parmi les plus élevées au monde qui pallie de facto l’absence de fonds de pension tricolores. On préfère donc les fonds de pension étrangers aux caisses de retraites françaises…

Le nombre d’ETI est très insuffisant

La France ne compte aujourd’hui que 4600 ETI qui sont les entreprises de taille intermédiaire de plus de 300 salariés. Il y en avait deux fois plus au début des années 80. La France est donc en train de décrocher par rapport à nos voisins. Il en existe 12 000 en Allemagne, 10 000 au Royaume Uni et 8000 en Italie.

Sur les 4600 ETI en activité, 236 sont cotées  en bourse selon l’Observatoire du Financement des Entreprises. Pour une ETI la cotation coûte environ 600 000€ à l’entreprise. Il faut rédiger des rapports de 350 pages précis comme une enquête de police qui ne sont lus par personne sauf par les concurrents. Tout cela participe malheureusement d’une « bérézina des PME et ETI ».

L’exil fiscal ne cesse de progresser

La France est le pays au monde qui compte le plus de départs de millionnaires avec 10 000 exilés recensés en 2015.  L’année 2013 avait vu 46 900 contribuables partir à l’étranger dont 714 redevables de l’ISF qui se sont installés  Suisse (19 %), au Royaume Uni (16 %), en Belgique (13 %), aux Etats Unis (6%). Ils disposent d’un patrimoine plus élevé que la moyenne des redevables à l’ISF. En 2013, 319 sur 714,  avaient  un patrimoine supérieur à 3M€. Leur patrimoine taxable net, s’élevait en moyenne à  8,4M€. Il n’y a eu que 74 retours en 2013. Le montant de plus values déclarées à la sortie étant de 5,7M€.

L’exil fiscal concerne 100 000 français sur les 2M vivant à l’étranger, cela représente un manque à gagner de recettes fiscales de 10Md€ par an et un stock de capital de 50Md€, quel gâchis….

Rien ne pourra durablement changer tant que la France restera le seul pays au monde où l’enseignement de l’économie, du lycée à l’université fait polémique. Les manuels présentent une vue largement orientée de l’économie et de l’entreprise où la lutte des classes est omniprésente. Elle est présentée plus comme un lieu d’exploitation du travail qu’un instrument de création de richesse, tandis que les patrons et les actionnaires sont présentés comme des profiteurs sans scrupule. Comment s’étonner que la plupart des bacheliers deviennent beaucoup plus souvent fonctionnaires ou chômeurs plutôt qu’entrepreneurs….  

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