Ces nouveaux matériaux bizarres qui permettront aux smartphones de se plier<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
High-tech
Ces nouveaux matériaux bizarres qui permettront aux smartphones de se plier
©Josh Edelson / AFP

Minute Tech

Alors que les smartphones avec écrans pliables pourraient bien s'imposer, les géants sur ce marché cherchent des nouveaux matériaux permettant d'éviter les problèmes rencontrés par Samsung.

Gilles  Dounès

Gilles Dounès

Gilles Dounès a été directeur de la Rédaction du site MacPlus.net  jusqu’en mars 2015. Il intervient à présent régulièrement sur iWeek,  l'émission consacrée à l’écosystème Apple sur OUATCHtv  la chaîne TV dédiée à la High-Tech et aux Loisirs.

Il est le co-auteur avec Marc Geoffroy d’iPod Backstage, les coulisses d’un succès mondial, paru en 2005 aux Editions Dunod.

Voir la bio »

Atlantico : Quelle technologie a utilisé Samsung pour concevoir l'écran pliable de son Galaxy Fold ? Les problèmes étaient-ils prévisibles ?

Gilles Dounès : Samsung a utilisé une technologie baptisée Y-Octa (Youm On-Cell Touch AMOLED), grâce à laquelle les capteurs de phase qui détectent les gestes sur l'écran sont situés non plus sur une couche supplémentaire de la dalle OLED ou LCD, mais bel et bien à l'intérieur même de l'écran. Ce n'est pas tant d'ailleurs cette technologie qui semble en cause, puisqu'elle a été utilisée sur le Galaxy S9 ainsi que sur la plus petite version du Galaxy S . Selon un média sud-coréen, Apple aurait fait appel à Samsung et à cette même technologie pour les écrans des iPhones qui seront présentés en septembre prochain, sans pour autant qu'il soit question de les plier. Il n'y aurait rien d'étonnant à cela : le coréen annonce en effet des coûts de production inférieurs de 30 % par rapport à la génération précédente.
Outre la fragilité de la couche supérieure de la version de la dalle$, c'est à la fois la qualité de fabrication et vraisemblablement la technologie utilisée pour alimenter les diodes électroluminescentes en énergie qui semblent à blâmer. Samsung, dont le modèle économique consiste à mettre sur le marché des composants et des produits plus rapidement que ses concurrents, a-t-il été pris à son propre jeu ? Les smartphones pliables sont en effet « dans l'air du temps » depuis plus d'un an maintenant, et le coréen se sait talonné par des concurrents chinois dont ils sent de plus en plus l'haleine sur sa nuque, mais également par son siamois LG. Il est étonnant que le Chaebol ait ainsi risqué une nouvelle fois sa réputation avec l'utilisation hasardeuse d'une technologie déjà ancienne, sur une toute nouvelle classe de produits très exigeantes alors que des alternatives toutes nouvelles sont sur le point d'émerger.

L'une des pistes les plus sérieuses pour concevoir des écrans pliables est celle des métamatériaux. En quoi consistent-ils ? Les fabricants de smartphones s'intéressent-ils déjà à cette technologie ?

Il s'agit de manipuler la structure moléculaire de certains matériaux lors de leur fabrication grâce à des flux de lasers croisés, de manière à leur faire adopter un comportement particulier. Par exemple, transmettre différemment la lumière, ou certaines longueurs d'onde de celle-ci, à travers des cristaux de verre transformé en métamatériau. Ou encore, dans le cas qui nous intéresse, modifier la résistance à la torsion de molécules d'argent, de manière à ce que le réseau de fils infinitésimal qui alimente les diodes électroluminescentes résiste aux ouvertures et fermetures répétées d'un double écran. C'est la piste suivie par le Canadien Metamaterial Technologies pour son alternative aux solutions actuelles, baptisée NanoWeb.
Et effectivement, il y a gros à parier que non seulement les fabricants de smartphones mais également l'ensemble des acteurs de l'industrie surveille de près la maturation de ce type de technologie. Les métamatériaux se prêtent en effet à tout un tas d'applications plus prometteuses les unes que les autres, et qui vont bien au-delà des seuls smartphones pliables. 

L'écran pliable restera-t-il un gadget ou peut-on s'attendre à une généralisation du phénomène ?

L'écran pliable se veut ni plus ni moins que la retranscription moderne des tablettes de cire romaines, a fortiori si on leur adjoint un stylet ! Mais il y a d'autres facteurs de forme auxquels ce type de composants pourrait servir de substrat : l'une des premières applications qui avaient été évoquées était même un écran enroulable, à la manière des papyrus égyptiens !
Plus sérieusement, et même s'il est possible que les écrans pliables fassent le job de la transition, l'Apple Watch GSM a fait la démonstration que le smartphone n'était plus indispensable pour communiquer ou envoyer des données par les réseaux. Ces métamatériaux pourraient dès lors représenter la marche indispensable pour la transition vers une nouvelle classe de produits à part entière, de la même manière que l'écran tactile capacitif projeté a permis l'avènement de l'iPhone et derrière lui le smartphone tel que nous le connaissons depuis maintenant 12 ans.
Cette « électronique-à-porter-sur-soi » (« wearables » en anglais) porte en effet potentiellement en elle la segmentation des différentes fonctions du smartphone, grâce à ces métamatériaux tout comme l'écran tactile de l'iPhone puis de l'iPad avait pris à son compte la plupart des fonctions dévolues à l'ordinateur, en même temps que des usages potentiels nouveaux. Par exemple, des lunettes à réalité augmentée sur lesquels Tim Cook le patron d’Apple semble miser beaucoup. Par leur finesse et la courbure qu'ils autorisent, leur application à la fabrication de verres intelligents, capables de fournir à la fois une correction dynamique et des informations de réalité augmentée avec une interface de type Siri aurait de quoi renvoyer le bon vieux Smartphone à l'âge de pierre !
Rappelons le, martelons le, ce n'est pas le composant seul qui fait la réalité de l'innovation industrielle, quel que soit son potentiel, mais son intégration au même titre que l'interface utilisateur, la partie logicielle ou le service sur lesquels il est adossé, au sein de l'objet qui va potentiellement changer les existences. C'est ce qu'Apple maîtrise comme personne encore, parce que c'est sur cette intuition que la société a été fondée en 1976 autour de l'Apple I, et qui aura sans doute manqué à Samsung. Les mois prochains vont dire ce que leurs impétrants vont pouvoir proposer.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !