Valls et Montebourg stars de la Rochelle : pourquoi les "anormaux" du gouvernement sont plébiscités par les militants<!-- --> | Atlantico.fr
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Dans le style et dans les prises de position, Montebourg et Valls incarnent-ils mieux le changement ?
Dans le style et dans les prises de position, Montebourg et Valls incarnent-ils  mieux le changement ?
©Reuters

Superstars

Le week-end dernier se tenait l'Université d'été du PS à la Rochelle. Les militants on pu aller à la rencontre des leaders du parti, notamment Manuel Valls et Arnaud Montebourg, qui ont fait particulièrement parler d'eux cet été...

Jean-Luc Mano

Jean-Luc Mano

Jean-Luc Mano est journaliste et conseiller en communication chez Only Conseil, dont il est le co-fondateur et le directeur associé.

Il anime un blog sur l'actualité des médias et a publié notamment Les Perles des politiques.

 

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Atlantico : Arnaud Montebourg a été particulièrement choyé par les militants socialistes lors de l'Université d'été de ce week-end à la Rochelle. Photos, autographes... il est apparu comme la star sur les quais. Est-ce dû à son charisme ou à sa politique ?

Jean-Luc Mano : Sans doute un peu des deux. Mais il y a surtout le fait que le changement, c'est lui. Dans le style et dans les prises de position, il incarne le  mieux le changement, ou du moins une forme de radicalité dans le discours. Les militants du Parti socialiste, qui sont sans doute dans l'expectative sur ce que va faire François Hollande et trouvent que les choses ne vont pas assez vite du point de vue des promesses de campagne, mettent plus d'espoir chez Montebourg qu'ailleurs. Au niveau de sa politique, de son discours face au patronat ou aux puissances de l'argent... Il est celui qui manifeste le plus les promesses de campagne.

Au niveau du style, on a un Premier ministre assez atone et des membres du gouvernement qui, à l'exception de Manuel Valls, font relativement peu parler d'eux. On ne peut pas vraiment dire qu'il y ait des percées dans l'opinion publique. Sur les orientations fondamentales, sur le style, Manuel Valls et Arnaud Montebourg imprègnent donc quelque chose de nouveau.

Le ministre de l'Intérieur, justement, a été ovationné après un discours de fermeté sur la sécurité, une réaction somme toute étonnante venant du Parti socialiste. Que peut-on conclure, en termes politiques pour le PS, de cet attrait des militants pour deux figures aux orientations si différentes : Manuel Valls et Arnaud Montebourg ?

Je crois que dans une période de crise aiguë et de perte de repère généralisée, les militants ont besoin de lignes, ont besoin de savoir où ils vont. Ils ont le sentiment que le gouvernement s'est installé dans un phénomène de gestion des affaires. Or, les militants ne voulaient pas d'un gouvernement de gestion, même aménagée ; il y avait dans l'élection de Hollande une attente de radicalité sur le changement avec Nicolas Sarkozy. Or, ce changement aujourd'hui a lieu en réalité seulement sur la forme.

C'est paradoxal : il y a un président qui fait de sa normalité son mode de comportement, un Premier ministre – dont on nous avait dit qu'il ne serait plus un collaborateur – qui est critiqué sur le fait qu'il n'est pas très actif et les personnes qui triomphent au PS sont les « anormaux ». Arnaud Montebourg, qui tient un discours de radicalité, qui parle de redressement politique, qui n'hésite pas à prendre position en faveur du nucléaire, et Manuel Valls qui tient des propos contraires à la tendance générale de la campagne.

Cette anormalité est-elle suffisante pour leur permettre d'être accepté par les militants, malgré leurs propos peu compatibles avec la ligne du Parti, en particulier chez Manuel Valls ?

Il n'y a pas que ça. Il y a aussi le fait que lentement, mais sûrement, les militants socialistes ont fait leur mue sur les questions de sécurité et que, si on en avait gommé les excès de vocabulaire, ils n'étaient pas loin de partager la ligne Sarkozy.

On le voit bien avec la suppression de la circulaire Guéant sur les étrangers étrangers, que tout le monde applaudit au PS, et à juste titre car elle était absurde économiquement et heurtait les principes d'accueil français. En revanche, sur la question des Roms, la même politique est poursuivie, car elle fait consensus dans le pays (ndlr : un sondage Atlantico montre que 80% des Français sont favorables à l'expulsion des Roms). Les militants PS ne cultivent pas les positions minoritaires. D'ailleurs, ils sont en général bien plus raisonnables que les cadres.

On arrive à la fin d'une séquence où l'antisarkozysme pouvait être un mode de gouvernement. Ca a été un mode de campagne efficace, mais il ne permet pas de gouverner. On entre dans une nouvelle période intéressante : le choc entre la normalité du président et l'anormalité de la situation, d'une gravité sans précédent.

Valls et Montebourg peuvent-ils tirer parti de leur popularité actuelle ?

Le positionnement de Manuel Valls – de manière schématique, à la droite du PS – est, je pense, porteur. Le curseur interne du PS est moins à gauche que par le passé chez les militants, il va donc engranger des soutiens.

Pour Montebourg, c'est plus compliqué, car il s'est engagé en faisant des promesses et il sera jugé sur sa capacité à les tenir. On voit donc qu'il commence à évoluer dans son discours. Dans ses premier propos sur Fralib, il disait notamment qu'il fallait absolument une loi de cession des marques  pour les entreprises qui licencient en étant bénéficiaires. Cette position, qui était très radicale, n'était pas dans son discours d'il y a deux jours.

Par rapport aux promesses de campagne, il est sans doute plus facile de montrer sa propre ligne sur la question de la sécurité que sur le reste, où les ministres seront toujours renvoyés à leurs promesses, alors qu'il va forcément y avoir du renoncement. Ceux qui, comme Valls, étaient moins engagés dans la série des promesses, vont sans doute être dans une meilleure position.

Propos recueillis par Morgan Bourven

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