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Un million d'abonnés à BeIN sports : les raisons d'un succès
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Telle est ma télé

Un peu plus de cinq mois après le lancement de BeIN Sport, le 1er juin dernier, la chaîne qatarie a annoncé mercredi avoir franchi le cap du million d'abonnés à ses différents canaux.

Francis Balle

Francis Balle

Francis Balle est professeur de Science politique à Pantheon-Assas. Il est l’auteur de Médias et sociétés 18 ème édition, ed Lextenso et de Le choc des inculture , ed L’Archipel.

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Atlantico : Nasser Al Khelaïfi, président des chaines BeIN Sport 1 et BeIN Sport 2, a déclaré que le million d’abonnés payants avait été atteint. Comment expliquer le succès de ces chaines face au développement des chaines gratuites et des bouquets numériques ? Le sport est-il le dernier contenu pour lequel les Français sont prêts à investir ?

Francis Balle : Avant tout, se pose la question de la véracité de ces déclarations qui pourraient être une opération de communication visant à augmenter la visibilité de BeIN Sport. Cela dit, il est tout à fait vrai que ces chaines connaissent un excellent accueil de la part du public et qu'elles comptent déjà des centaines de milliers d’abonnés. La phénomène est relativement simple à comprendre, il repose sur le fait que le football, et plus généralement le sport, est devenu un contenu à part entière et non plus un thème qui peut être « une partie de la grille de programmation » comme c’était le cas dans le modèle bi-thématique qui a fait le succès de Canal + dans les années 80. En effet, la fragmentation générale et croissante des audiences télévisuelles conduit à une exigence importante des consommateurs qui exige un contenu le plus proche possible à leurs attentes. Il n’est plus question de payer une chaine, surtout en ces temps de crise économique, dont seule la moitié des programmes est jugée intéressante.

Le sport n’est pas le dernier des contenus pour lequel les Français acceptent de payer mais il est un des derniers. Il y a également le cinéma bien qu'il ne s'agisse pas de la même audience. Sur le plan du cinéma la France est aujourd’hui encore prise dans le carcan de la "chronologie des médias" c’est à dire l’ordre dans lequel les différents exploitants potentiels peuvent utiliser une œuvre cinématographique. Bien que cela ait initialement pour but louable la protection des salles de cinéma, cette chronologie sera forcément bousculer par le numérique et les fournisseurs de programmes comme Netflix et d’autres sites du même genre.

Lancement de D8 et D17, perte de la NBA et du football européen au profit de BeIN Sport, la chaine cryptée historique va-t-elle vers le gratuit total ?

Il semble que les dirigeants de Canal + aient eu l’intelligence de voir que ce fameux modèle bi-thématique Sport/Cinéma est dépassé. La chaine joue donc la carte de la variété des formules. D’une part, il y a toujours une politique de l’exclusivité des contenus qui à terme seront accessibles à tous. Cela permet de continuer à attirer de nouveaux abonnés à la recherche de programmes nouveaux et exclusifs notamment les séries et le cinéma. D’autre part, le groupe propose des chaines gratuites avec des contenus alternant des nouveautés et d’anciens contenus exclusifs. Il faut tout de même noter la communication de masse contre-productive qui a été faite autour de D8. On a jamais intérêt à faire un tel tapage car on s’expose à la déception du public, ce qui s’est passé dans le cas présent. Il n’y a qu’Apple qui peut se vendre comme révolutionnaire car la consommation d’équipements répond à d’autres logiques (impulsion, reconnaissance sociale) que celles de la télévision qui « gratuite », directe et non impliquante.

Le succès de ces chaines dédiées au sport et l’apparition de nombreuses chaines thématiques annoncent-ils un glissement vers une télévision spécialiste ?

Non, la télévision ne deviendra jamais totalement spécialiste. Bien que la fragmentation des audiences fasse baisser la part relative des chaines généralistes, leur part absolue reste très importante. Il ne faut jamais sous-estimer la paresse des téléspectateurs. Il est toujours agréable de se laisser guider en choisissant le menu imposé par le restaurant, la carte est faite pour les exigeants qui ont le temps et les moyens de payer. De plus, la grande force des généralistes est le fait de savoir créer des rendez-vous qui touche une audience large. Que ce soit le 20h, les séries américaines ou les téléfilms à épisode, les rendez-vous quotidiens et hebdomadaires sont les fournisseurs de téléspectateurs de ces chaines. D’autre part, la façon de consommer la télévision a également changé sur une partie de la population. Les programmes ont été transféré sur les ordinateurs portables mais ils restent bien souvent les mêmes. Dans beaucoup de familles en France et à l'étranger, le téléviseur/meuble/monument du salon est principalement devenu une baby-sitter qui permet de canaliser l’attention des enfants.

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