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Hausse des taux : 
la menace se précise
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ECONOMIE - EUROPE

Jean-Claude Trichet a annoncé à la surprise générale, le 3 mars dernier, une hausse des taux directeurs de la BCE. Depuis, les gouverneurs de la banque européenne se refusent à donner une date précise pour contenir la spéculation. Et pendant ce temps là, l'explosion de la bulle immobilière menace...

Georges Kaplan

Georges Kaplan

Georges Kaplan ne s'appelle de tout évidence pas vraiment Georges Kaplan. Né en 1975, il gagne honnêtement sa vie sur les marchés financiers et passe le temps en publiant des articles sur Causeur.fr et Atlantico.fr.

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Benoist Apparu, le responsable social-démocrate-conservateur des problèmes de logements des Français,a annoncé début mars lataxation des propriétaires de chambres de bonnes alors que Martine Aubry et ses amis sociaux-démocrates-progressistes nous promettent une « autre politique du logement » (avec plus de « care » à l’intérieur). Comme tout ce petit monde semble complètement désemparé par la hausse des prix de l’immobilier, je vais me risquer à une petite explication.

Si les prix parisiens sont si élevés et montent à une telle vitesse, c’est parce que la demande y est très forte et en augmentation constante alors que les logements à la vente y sont rares et que l’on n’en construit pas assez de nouveaux. Si l’offre ne suit pas, me direz-vous, c’est parce qu’il n’y a plus de place pour construire. Oui, vous rétorquerais-je, mais c’est aussi parce que la réglementation interdit de construire en hauteur (pas plus de 37 mètres). Bertrand Delanoë, qui fait parti des rares sociaux-démocrates-progressistes à être capable d’une étincelle de lucidité de temps à autres, l’a bien compris est essaye depuis quelque temps déjà d’assouplir cette règlementation mais se heurte dans cette entreprise aux sociaux-démocrates-conservateurs de l’UMP et aux écologistes qui avancent l’argument surréaliste selon lequel des tours ne seraient pas « compatibles avec le plan climat ». En attendant, bien sûr, plus les prix grimpent, plus les franciliens s’éloignent pour acheter des pavillons de banlieue aux bilans énergétiques calamiteux et passent des heures dans les bouchons qui entourent la capitale.

Voilà donc pour l’offre, passons à la demande. Elle est – de l’avis des professionnels – tirée par trois facteurs : une génération de retraités qui – encouragés par les promesses fiscales des lois Robien et Scellier – investissent massivement dans la pierre, des dispositifs d’aide à l’accession à la propriété – comme le prêt à taux zéro et le Prêt Paris Logement – qui apportent leurs lots de primo accédants et enfin et surtout, des taux d’intérêt historiquement bas qui décuplent la capacité de financement des acheteurs. Rappelons, à toutes fins utiles, que si les taux sont si bas ce n’est pas que les banques soient subitement devenues des entreprises philanthropiques mais parce que la BCE a fait en sorte qu’il en soit ainsi –on appelle ça une « politique monétaire accommodante ».

Une situation paradoxale

Résumons donc : nos politiciens ont créé une rareté artificielle sur le marché immobilier parisien, ont multiplié les dispositifs destinés à accroître la demande et maintenant ils s’étonnent de voir les prix monter. On pourrait raisonnablement penser que nos gouvernants s’arrêteraient là. Mais non : voilà qu’on entend reparler d’encadrement du prix des loyers par la loi, mesure maintes fois essayée et qui a toujours fini en catastrophe. En temps de crise, les imbécilités économiques se multiplient comme des lapins.

Voilà donc où nous en sommes : il y a bien une bulle immobilière mais cette bulle n’a rien à voir avec un prétendu dysfonctionnement du marché ; au contraire, le marché fonctionne très bien et réagit tout à fait logiquement aux impulsions politiques décrites ci-dessus (encore des « effets inattendus ») à tel point que si la BCE décide de faire remonter les taux, elle sait parfaitement qu’elle risque de provoquer un krach immobilier. Une politique monétaire trop laxiste ne risque pas seulement de créer de l’inflation mais peu aussi de créer des bulles et la petite expérience menée par la Fed entre 2004 et 2007 a démontré que dégonfler une bulle en faisant remonter les taux peut s’avérer extrêmement acrobatique. C’est là tout le dilemme : la BCE devra, tôt ou tard durcir sa politique monétaire et elle sait que, ce faisant, elle risque de provoquer une nouvelle crise immobilière... et les désagréments qui vont avec.

Vous n’aimeriez pas être à la place du successeur de Jean-Claude Trichetmais ne vous réjouissez pas trop vite, la vôtre n’est pas nécessairement beaucoup plus confortable.

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