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Syrie : le début de la fin
pour Bachar el-Assad ?
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Terminé ?

Le cœur du pouvoir est touché en Syrie. Trois hauts responsables, dont le ministre de la Défense et le beau-frère du président Bachar el-Assad, ont été tués dans un attentat revendiqué par l'Armée syrienne libre.

Fabrice Balanche

Fabrice Balanche

Fabrice Balanche est Visiting Fellow au Washington Institute et ancien directeur du Groupe de recherches et d’études sur la Méditerranée et le Moyen-Orient à la Maison de l’Orient.

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Atlantico : Ce mercredi en Syrie, un attentat a frappé de plein fouet le pouvoir sécuritaire de Damas. Au delà de nombreux blessés, Assef Chawkat, le beau-frère de Bachar el-Assad, le ministre de la Défense Daoud Rajha et le chef de la Sécurité nationale Hicham Ikhtiar ont trouvé la mort. Peut-on voir ici la fin de l’ère de Bachar el-Assad ?

Fabrice Balanche : D’après la version officielle, il s’agirait d’un attentat suicide commis dans un immeuble sécurisé dans le quartier de al-Aouda. Pourtant, c’est étrange. J’ai parlé hier avec des personnes du même quartier qui m’assurent n’avoir rien entendu.

Pourtant, dans le Figaro, le journaliste Georges Malbrunot affirme qu’un garde du corps aurait probablement déposé une bombe et qu’il ne s’agit pas d’un attentat suicide. Si cette piste se confirme, cela prendrait la forme d’une attaque de type djiahdiste.

Je trouve étrange de voir que al-Qaïda ait réussi à infiltrer les services de sécurité, notamment les gardes du corps de ces dirigeants. En revanche, à mon avis, il est fort probable qu’une personne ait été retournée par des services secrets étrangers (CIA, Mossad…).

Pour répondre à votre question, je pense que nous sommes à un tournant, le cœur du pouvoir est touché. La mort de Assef Chawkat, le beau frère de Bachar el-Assad, est un signe fort. Les hauts-dirigeants ne se sentent plus en sécurité et il va être difficile pour le pouvoir de remplacer des hommes de la trempe de Hicham Ikhtiar qui était le chef de la sécurité nationale. En décapitant ces têtes le pouvoir se recroqueville sur la communauté alaouite. En ajoutant à l’attentat la défection du numéro 2 de la garde présidentielle, Manaf Tlass, qui représente à lui seul toute la frustration de cette classe de généraux sunnites qui n’a pas eu de promotion, tous les postes importants sont réservés aux alaouites.

D’après vous, quelles conséquences peut avoir cet attentat sur Bachar el-Assad. Peut-on s’attendre à une répression sanglante et aveugle de la part du « boucher de Damas » ?

Effectivement, je pense que le mois de Ramadân va être sanglant. On peut s’attendre à une montée de la violence. Des attaques nouvelles vont arriver mais je ne crois pas qu’elles seront aveugles, les fiefs rebelles sont localisés. Déjà, il y a de fortes chances que les fidèles de Assef Chawkat se vengent sur quelques villages sunnites à la périphérie du pays alaouite. Selon moi, cela peut engendrer un nouveau  massacre comme celui de « Houla » par exemple. J’avais une théorie selon laquelle il avait eu lieu juste après une tentative d’assassinat contre Assef Chawkat et des membres de l’appareil militaire. Cette tentative ratée avait engendré le massacre de civils. Je pense que le quartier de Damas va être réduit en miette. Il y a des mouvements à l’heure actuelle autour du quartier du al-Midan. L’armée a cernée le quartier de manière à faire sortir les rebelles et les gens ont extrêmement peur.  

Comment va se positionner la Russie ?

La Russie s’est déjà positionnée. Elle a condamné cet attentat terroriste sanglant, elle ne veut pas apporter son soutien à l’opposition syrienne. La Russie va accroître son soutien militaire au régime, elle ne veut pas qu'il s’écroule. Le prochain mois risque d’être décisif et sanglant. L’opposition va être galvanisée par cet attentat et va harceler l’armée syrienne.

L’OTAN va t’elle en profiter ?

Je ne pense pas. L’OTAN ne veut pas intervenir en Syrie. Le contexte actuel conforte d’ailleurs son idée d’une non-intervention. La situation militaire, diplomatique est bloquée. Dans un climat d’élection américaine, l’OTAN ne va pas intervenir.

Par ailleurs, à l’intervention s’ajoute la pacification du terrain. L'organisation ne veut pas mettre les pieds dans ce nid de guêpe, elle peut être aussi la cible d’attentats suicides. Les pays du Golf et les occidentaux souhaitent décapiter la tête du pouvoir. Pourtant, je me demande comment vont se positionner l’Europe, les Etats Unis quand les massacres contre les populations alaouites et chrétiennes vont commencer ?


 Qui peut remplacer Bachar el-Assad aujourd’hui ?

Si on tue Bachar et son frère Maher al-Assad le régime s’écroule. A l’extérieur, il n’y a que peu d’alternatives. On a fait croire à Manaf Tlass qu’il pouvait reprendre le pays, mais je n’y crois pas. C’est un rôle de marionnette qu’on lui donne. Il ne sera pas accepté par l’opposition. Il y a aussi l’ancien ambassadeur de Syrie en Irak qui a fait défection, Naouaf Fares, qui a sans doute été acheté par la Qatar. Cette personne peut être mise à la tête du pouvoir. Il peut rassurer l’appareil militaire et surtout il n’a pas de sang sur les mains. 


Propos recueillis par Franck Michel et Charles Rassaert

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