Suivi du bien-être en France : les Français dans l’ascenseur émotionnel<!-- --> | Atlantico.fr
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Des Français dans les rues de Bordeaux lors des restrictions face à la pandémie de Covid-19.
Des Français dans les rues de Bordeaux lors des restrictions face à la pandémie de Covid-19.
©MEHDI FEDOUACH / AFP

Société française

C’est l’un des enseignements du rapport 2021 réalisé par l’Observatoire du bien-être du CEPREMAP (CEntre Pour la Recherche EconoMique et ses Applications).

Mathieu Perona

Mathieu Perona

Mathieu Perona est Directeur exécutif de l’Observatoire du Bien-être du CEPREMAP (Centre pour la recherche économique et ses applications).

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Atlantico : Vous publiez votre rapport sur le bien-être en France 2021. Un rapport de fait fortement marqué par le Covid. Quelles sont vos grandes conclusions ?

Mathieu Perona : Ce qu’on observe, c’est que sur toute la période de la pandémie 2020-2021, il y a eu des hauts et des bas très importants du bien-être subjectif, avec un bien-être émotionnel particulièrement chahuté. Cela montre la capacité de rebond du bien-être émotionnel des Français, ce qui n’a pas été le cas dans tous les pays. Concernant le bien-être évaluatif, notamment la satisfaction par rapport à sa vie, on a aussi constaté un haut et un bas. Un soulagement, probablement dû à une réévaluation de ce qui comptait dans notre vie après le premier déconfinement, puis une chute jusqu’à début 2021 et un rétablissement durant l’année. Ce sont deux formes de résilience différentes.

La tendance est donc à l’amélioration du bien-être ?

Le bien-être évaluatif (évaluation de la vie, comparaison avec les autres, etc.) revient à la normale. Au niveau du bien-être émotionnel, on reste à des niveaux inquiétants, le nombre de gens qui se déclarent heureux est assez bas et le nombre de ceux qui se déclarent déprimés assez haut. On a géré certaines choses mais pas l’impact psychologique de la pandémie et les mesures nécessaires pour lutter contre la situation. Les données de Santé publique France sur la santé mentale des jeunes demeurent particulièrement inquiétantes.

Les jeunes sont donc particulièrement touchés ?

Ils ne le sont plus de manière instantanée, mais ils ont des cicatrices. Ils sont rentrés dans la période autonome de leur vie pendant cette pandémie, ce qui n’est pas du tout anodin. Et rouvrir les bars et cinémas ne va pas tout résoudre.

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Vous vous êtes aussi interrogé sur les non-vaccinés, qu’avez-vous appris ?

Il faut rappeler qu’au final, malgré une forte réticence initiale, nous avons un taux de vaccination élevé. Les enquêtes nous disent que les personnes défavorisées étaient plus nombreuses à être non vaccinées. Les personnes défavorisées sont en moyenne moins satisfaites de leur vie. Mais leur refus de se faire vacciner s’ancre dans une défiance globale aux institutions.

Vous soulignez aussi une vision de l’avenir optimiste à titre individuel et pessimiste collectivement, comment l’expliquer ?

Il faut préciser, et on suppose que c’est une tendance ponctuelle, que les anticipations individuelles ont fortement plongé en mars. C’est probablement dû aux inquiétudes liées au pouvoir d’achat. Cela dit, la vision de l’avenir individuel reste plus positive que la vision de l’avenir pour les générations futures. Et des éléments comme le dernier rapport du GIEC ne sont pas pour rassurer.

Quels sont les motifs d’inquiétude les plus fréquents ?

Nous n’avons pas ces données. Nous pouvons nous référer à l’enquête électorale du CEVIPOF mais elle a tendance à mettre en avant des éléments conjoncturels qui ne portent pas sur le futur à long terme. Ce qu’on observe nous, dans le baromètre de l’IRSN, c’est l’émergence de la menace climatique comme l’un des risques majeurs (risque nucléaire, terrorisme, santé, économie, climat, etc.). En 2010, c’était chômage et pauvreté qui étaient au plus haut. En 2015, l’inquiétude liée au terrorisme augmente fortement. Et en 2020, l’inquiétude liée au climat devient plus importante que celle liée à l’économie. Les problématiques de santé ont évidemment bondi avec le Covid.

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Quels sont à l’inverse les sources de bien-être ?

Pendant longtemps, l’économie jouait beaucoup. La confiance dans l’économie était haute. La relation a complètement changé lors du premier confinement. La confiance dans l’économie était faible mais la satisfaction dans la vie était élevée. L’expérience de la pandémie a mis en évidence les autres composantes de la vie qui participaient à la satisfaction. Nous voulons à l’avenir creuser l’effet du télétravail sur le bien-être. Il peut être bénéfique pour le bien-être, mais produit initialement un sentiment de manque d'efficacité. Il faut donc accompagner le passage au travail à distance.

Comparativement aux autres pays, comment se comporte le bien-être des Français ?

Lors de la pandémie, on a pu observer une différence notable avec le Royaume-Uni. Là où la France a fait l’ascenseur émotionnel, le Royaume Uni est descendu très très bas et est revenu très lentement à son niveau d’avant pandémie, juste avant la guerre en Ukraine. C’est probablement en raison de la gestion de la crise mais aussi peut être dans la manière dont les conséquences du Brexit se sont cumulées à la pandémie.

Vous avez aussi fait un focus sur l’école, pourquoi ? Qu’est-ce que vous observez ?

Les études sur le bonheur subjectif montrent qu’être heureux, cela s’apprend. Donc c’est important de s’interroger sur le bien-être à l’école, d’autant que ce n’est pas nécessairement un endroit qu’on associe au bien-être. Nous avons documenté un écart sociologique et de genre dans les performances scolaires. Dès le CM2, il y a des différences marquées. Il y a une perte de confiance très forte des élèves défavorisés dans leurs capacités, en particulier en mathématiques. Mais l’expérience scolaire en général, et leur vie à l’établissement avec leurs camarades, est relativement la même. 

Pour retrouver l’étude « Le Bien-être en France : Rapport 2021 » réalisée par l’Observatoire du bien-être du CEPREMAP, cliquez ICI

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