Données criminelles
Statistiques du ministère de l’intérieur : Christophe Castaner ou l’imagination au pouvoir
Le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure a publié sa troisième édition du bilan statistique « Insécurité et délinquance ». Ce dernier permet de dresser un premier bilan de l'évolution de l'insécurité en France.
Xavier Raufer
Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date: La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers.
En France, la science-fiction reste un genre mineur. Certes, existe depuis 1974 un annuel prix littéraire décerné à un roman fantastique francophone - mais ce Grand Prix de l'Imaginaire peine à s'imposer. Suggérons donc un coup d'éclat à son jury, pour sa prochaine édition : couronner l'œuvre de fiction intitulée "Insécurité et délinquance en 2018, premier bilan statistique". (Service statistique ministériel de la sécurité intérieure, janvier 2019).
Bilan si risible que même les obligés médiatiques de l'Intérieur ont bronché. Même ces thuriféraires publiant au coup de sifflet la prose de Beauvau comme s'ils avaient enquêté eux-mêmes - pure arnaque morale - ont fourni le service minimum (les violences faites aux femmes), délaissant le reste de la fiction propagandiste de l'Intérieur.
Premier et gros vice de forme du "bilan", la collecte des données criminelles par les forces de l'ordre en 2018 - mais d'abord, ce rappel. Du 26 au 28 décembre 1999 ("passage à l'an 2000") un ouragan ravagea la France. Or ensuite, éclate une polémique sur la sincérité du bilan 1999 de la délinquance, la collecte judiciaire des données du terrain ayant été interrompue l'ultime semaine de l'année. Que vaut un bilan dit "annuel" - mais portant en fait sur 51 des 52 semaines de 1999, objectaient alors les experts ?
Retour à la chaotique année 2018 : émeutes chaque soir des matches du mondial de football ; émeutes encore pour Halloween - et du 15 novembre au 31 décembre, la brutale révolte des "Gilets Jaunes". En mode "tout le monde sur le pont", la police et la gendarmerie ont dû, plus de trente jours pleins de 2018, privilégier l'urgence immédiate ; dont, confirment des policiers et gendarmes de terrain, délaisser la nomenclature quotidienne des infractions. Cela, le "Bilan" de l'Intérieur, le suggère p 21, timide appel en petites lettres à la distance critique : "le recueil des plaintes et la constatation des infractions par les forces de l'ordre ont pu être affectées... L'exhaustivité des infractions sous-jacentes n'est pas garantie", etc.
D'où l'évidente question : que vaut le "bilan" d'une année durant laquelle, 30 à 35 jours pleins sur 365, le recueil des données criminelles a été partiel, voir nul ? Deux autres arnaques maintenant, portant sur les vols à main armée et sur les cambriolages.
BRAQUAGES, la poussière sous le tapis - on découvre, encore dans les petites lignes, la catégorie "extorsions avec armes", "lors desquels la victime 'braquée' remet elle-même son bien à l'auteur, sous l'influence de la menace subie" ; vols non "pris en compte dans l'indicateur de vol avec arme". Factice distinguo escamotant peut-être des centaines de braquages par an - car bien sûr, ces "extorsions avec armes" ne figurent nulle part ailleurs au "Bilan".
CAMBRIOLAGES - Le Bilan reprend les index 27 et 28 de l'Etat 4001, visant les cambriolages de "résidences principales ou secondaires". Mais ceux de locaux officiels (mairies, services sociaux, etc.) ? Et les cambriolages des bureaux d'entreprises ou associations, ou de locaux industriels ou agricoles ? etc. (estimés naguère à 45% du tout) ? Pas un mot - disparus.
Voici donc, pour rétablir les faits - des chiffres concrets sur la fort violente France de M. Macron :
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