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Arménie
Sommet de la francophonie à Erevan : le dilemme perdant-perdant pour Emmanuel Macron
Il se dit que quand la roue de la fortune tourne, tout ce qu’entreprend un homme tourne à son désavantage. Il semble que ce soit depuis cet été le cas du président Macron.
Roland Hureaux
Roland Hureaux a été universitaire, diplomate, membre de plusieurs cabinets ministériels (dont celui de Philippe Séguin), élu local, et plus récemment à la Cour des comptes.
Il est l'auteur de La grande démolition : La France cassée par les réformes ainsi que de L'actualité du Gaullisme, Les hauteurs béantes de l'Europe, Les nouveaux féodaux, Gnose et gnostiques des origines à nos jours.
Il a voulu se donner une nouvelle image en allant visiter les sinistrés de Saint-Martin, il en fait trop et des clichés dévalorisants pour lui tournent en boucle dans toute la France.
Encore plus caractéristique est son intervention dans l’élection du secrétaire général de l’Association des pays francophones qui doit se tenir à Erevan (Arménie) les 11 et 12 octobre.
La secrétaire générale sortante , canadienne d’origine haïtienne, Michaelle Jean est candidate à sa propre succession.
Contre elle , le ministre des affaires étrangères du Rwanda, Louise Mushikiwabo soutenue par le dictateur Paul Kagame.
Personne n’a compris pourquoi le president Macron soutient la seconde. Il y avait tant de raisons pour que cette femme ne soit pas la candidate de la France !
Sur le plan bilatéral, les relations entre la France et le Rwanda sont détestables depuis la prise de pouvoir par Kagame en 1974. Il est à l’honneur de notre pays d’avoir, seul mais sans s’engager malheureusement à fond, tenté de faire barrage à cet homme sanguinaire appuyé par toute la galaxie du mainstream mondial , soi-disant libérale, à dominante anglo-saxonne. Kagame vainqueur a supprimé le français au bénéfice de l’anglais dans l’administration et dans l’enseignement. Il a adhéré au Commonwealth. Il couvre d’accusations ignobles l’ armée française dont l’opération d’interposition dite Turquoise, durant l’été 1974, faite à la demande de l’ONU, quoique trop tardive pour changer le cours des choses, fut irréprochable.
Sur le plan moral, ce soutien est beaucoup plus grave. Pendant des années a prévalu l’idée que Kagame était entré sans le pays au moment où la majorité hutu accomplissait un génocide de la minorité tutsi et qu’il avait arrêté le génocide et sauvé ceux qui restaient. Pour la doxa internationale, rien d’autre. Or il apparait aujourd’hui de plus en plus que , non content d’avoir provoqué la guerre, puis , en abattant l’avion présidentiel où se trouvait son prédécesseur Habyarimana, déclenché le premier génocide, Kagame en a encore accomplie un autre, au cours des années suivantes, peut-être dix fois plus grave, à l’encontre les réfugiés de la majorité hutu en fuite au Congo et des Congolais. Cela au travers d’atrocités inimaginables : viols, mutilation de femmes, tortures à mort etc.
Cette thèse , longtemps refusée par les médias dominants , se substitue peu à peu à la première dans le monde anglo-saxon et a reçu une caution forte avec l’attribution qui vient d’être annoncée, du Prix Nobel de la Paix au Dr Denis Mukwege lequel, pendant des années a soigné dans l’Est du Congo des milliers victimes de ces sévices et clairement dénoncé les responsabilités de Kagame.
Dès lors les perspectives ne sont pas très glorieuses pour le président français.
Ou bien la majorité des pays francophones réunis à Erevan refusent de le suivre et ce sera pour lui un désaveu cinglant.
Ou bien il réussit à imposer au forceps la candidate rwandaise et comme tout ce que nous venons d’évoquer commence à se savoir , que Kagame est en voie de perdre ses soutiens internationaux – c’est peut-être le sens du nouveau Prix Nobel, l’appui apporté à Mme Mushikiwabo apparaitra pour ce qu’il est : la complicité avec le crime le plus énorme de la fin du XXe siècle.
Il resterait à Macron à retirer son appui à la candidate rwandaise en arrivant à Erevan. Mais il s’est tellement engagé pour elle , la diplomatie française a été si active en sa faveur ces derniers jours , Macron ayant même rencontré Kagame à l’ONU, que cela passera aussi pour un échec.
Alors que rien ne l’obligeait à se mêler de près de cette affaire, Macron s’est ainsi enlisé dans un dilemme perdant-perdant. Il ne lui manquait plus que ça.
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