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Situation explosive en banlieue : un maire volontariste peut-il (re)créer de la mixité sociale ?
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Maire courage

Dans un entretien accordé au Figaro, la présidente de la région Ile-de-France Valéry Pécresse a tiré la sonnette d'alarme sur la situation actuelle des banlieues qu'elle qualifie d'"explosive". Elle décrit notamment l'incapacité de l'Etat à combattre le phénomène de ghettoïsation des quartiers.

Xavier Lemoine

Xavier Lemoine

Membre du Mouvement pour la France, puis de l'UMP, Xavier Lemoine, vice-président du PCD, est maire de Montfermeil depuis juin 2002, réélu avec 61,34% des voix au premier tour en mars 2014.Il a été vice-président du Conseil national des Villes, et est actuellement vice-président aux finances du territoire Grand Paris Grand Est, et conseiller métropolitain délégué. 

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Atlantico : Les politiques récentes visant à ramener une forme de diversité dans ces quartiers ont-elles été efficaces ? Faut-il les incriminer ?

Xavier Lemoine : On touche à plusieurs problèmes : premièrement, il y a une opacité totale quant au mécanisme d'attribution des logements sociaux. Le contingent du Préfet vient solutionner des situations d'urgences avec des familles en grandes précarités sociale et culturelle. Puis le 1 % patronal bénéficie principalement à des populations étrangères. C'est donc un peu dur d'obtenir de la mixité. Les quelques familles susceptibles de participer à cette fameuse mixité s'en vont en courant en voyant la situation qui sera la leur, et celles de leurs enfants dans les écoles.

Deuxièmement, au "logement social" juridiquement défini comme tel, se rajoute notamment en Seine-Saint-Denis, un "logement social de fait" qui prospère dans les centres villes anciens dégradés et désormais dans les grandes zones pavillonnaires, majoritairement construites avant le choc pétrolier. C'est souvent la seule issues qui reste à des familles plus ou moins en délicatesse avec la loi. L'article de Mme Pécresse est tout à fait recevable du haut d'un hélicoptère qui survolerait l'Ile de France, pas du point de vue du département de la Seine-Saint-Denis au regard des logiques démographiques et culturelles qui sont à l'œuvre, et pour encore longtemps ! Cet élément déterminant manque à l'analyse !

Ne faut-il pas prendre en compte la volonté des gens qui n'ont pas nécessairement envie de vivre ensemble aujourd'hui ?

Il y a eu des villes dans lesquelles un certains nombres de grands bailleurs sociaux ont estimés devoir loger prioritairement tel type de famille pour préserver d'autres parties de leur patrimoine. Mais tout ne s'explique pas comme cela. Des populations ont été accueillies dans des ensembles où la mixité sociale était totale ! Mais par les comportements qu'ils ont eus, et par l'incapacité de l'État à stopper ces pratiques, ils ont fait fuir tout le monde ! N'oublions pas que ces grands ensembles sur lesquels on se lamente aujourd'hui ont pu, par le passé, être parfaitement attractifs.

Que peut faire un maire aujourd'hui ? Peut-il comme le prétend Valérie Pécresse, en poursuivant une politique volontariste, rétablir de la mixité sociale ?

Pour construire de nouveaux quartiers, faut-il encore avoir de la place. Quand vous reconstruisez la ville sur la ville, et qu'aucune autre ville ne veut accueillir les populations qu'il faudrait éventuellement loger différemment, vous êtes dans une impossibilité pratique. Et c'est le cas de la Seine St Denis. Il faut prendre la question sous un autre angle et je ne partage pas sa sévérité sur l'ANRU. Ainsi, tant que l'on n'a pas redonné, par la qualité de l'urbanisme, de l'architecture et de l'espace public, dignité et fierté aux populations qui habitent ces quartiers, aucune politique sécuritaire, sociale, ou éducative, ne pourra produire d'effets. Donc l'ANRU [ndlr. Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine], pour peu que l'on s'y prenne bien est incontournable pour redonner dignité et fierté à nos populations. L'ANRU est peut-être insuffisante toute seule mais pour autant est un préalable à tout le reste. Après il convient effectivement de retrouver de la sécurité, et de pouvoir développer des politiques sociales et éducatives, mais il faut bien comprendre que ce qui se joue dans nos quartiers est avant tout d'ordre culturel. Et si nos politiques publiques ne sont pas revues à l'aune de ces enjeux culturels, on continuera à mettre beaucoup de volonté, d'argent et de moyens, pour des résultats décevants et des situations très instables, voire explosives. 

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