Si Doctolib rachetait le système de santé français, ça marcherait mieux et ça coûterait moins cher au contribuable...<!-- --> | Atlantico.fr
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Une photographie d'illustration prise à Paris le 13 juillet 2021 montre l'application Doctolib sur un smartphone.
Une photographie d'illustration prise à Paris le 13 juillet 2021 montre l'application Doctolib sur un smartphone.
©Olivier MORIN / AFP

Atlantico Business

Doctolib est devenue hier la 1ère des licornes françaises, celle qui vaut le plus cher, près de 6 milliards d’euros, aussi cher que Air-France KLM, Alstom ou M6, la moitié de Vivendi, mais avec aussi beaucoup moins de dettes. Doctolib pourrait tout se permettre, y compris de réformer la sécurité sociale française.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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En moins de dix ans, la France a été capable de créer un champion du monde dans le secteur de la santé. Au départ, Doctolib n’est qu’un concept de secrétariat au service de médecin. Banal. Mais de cette banalité, il est devenu l’acteur incontournable de la gestion de la médecine privée. Non seulement Doctolib gère les cabinets médicaux, optimise le temps des soignants et des patients par une application digitale de prise de rendez-vous. C’est la partie visible. Tout le monde connaît.

Mais Doctolib est entré dans le cœur du cabinet du médecin en effectuant pour lui, les tâches administratives qui concernent sa relation avec l‘assurance maladie, les complémentaires santé, sa comptabilité, ses déclarations sociales et fiscales. Plus de 25% des soignants, médecins libéraux ont souscrit à des logiciels payants fournis par Doctolib. C’est sa seule source de revenus. Des revenus qui dépendent du nombre d’abonnés et de l’offre de service.

Dernière innovation en date, les archives médicales du médecin et donc, un véritable carnet de santé du patient. Doctolib est ainsi en mesure d’enregistrer les diagnostics et les prescriptions du patient et permet ainsi au médecin de gagner du temps et de l’efficacité.

Les plannings, les agendas, les courriers, les ordonnances sont gérées et disponibles. A partir du nom, de la date de naissance de son patient ou de sa carte vitale, le médecin peut tout savoir en un clic de souris.

Doctolib date de 2013. Mais contrairement à d’autres startups qui ont grandi trop vite, Doctolib est restée française. Son fondateur, Stanislas Niox-Château, a renoncé à toutes les offres de rachat qui lui ont été faites de la part des fonds étrangers qui chassent les pépites sur la planète. Doctolib a privilégié le soutien de BPI France et d’Eurazeo, qui contrebalancent deux fonds américains venus dès le départ et restés présents : Accel Partners et General Atlantic. Le pouvoir restera aux couleurs françaises, ce qui permet alors encore aujourd’hui, aux dirigeants toutes les audaces : 

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D’abord, attaquer les marchés européens qui ont des systèmes de santé hybrides, avec une composante privée importante. Doctolib s’installe donc en Allemagne, en Italie.

Ensuite, élargir la clientèle au-delà des médecins en proposant d’intégrer toute la chaine de valeur qui participe à l’offre de soins : les infirmières et les aides-soignantes, les kinés, les dentistes, et autres spécialités.Mais au-delà, Doctolib prépare pour l’été prochain d’offrir aux soignants un WhatsApp privé et sécurisé qui leur permettra d’échanger des informations sur leurs patients communs. La carte vitale aurait dû intégrer toutes ces informations, mais l'assurance maladie n’a jamais pu le faire. Pourquoi ? Nul ne le sait, mais c’est sans doute pour de fausses raisons. La pertinence du diagnostic dépend beaucoup de l'information qu'il possède sur le malade.

Enfin l’ambition de séduire le secteur public. Les hôpitaux sont devenus la priorité du développement. Doctolib a déjà équipé l‘Aphp (Paris) et l’hôpital de Marseille pour les prises de rendez-vous. Mais la crise du Covid à bien montré que Doctolib pouvait aller plus loin. Au plus haut sommet de l’Etat, on sait bien que c’est Doctolib qui a sauvé la campagne de vaccination contre le Covid en apportant un service d’organisation des vaccinations. Et c’est pendant cette période-là que Doctolib a développé des services de téléconsultation ou de télésurveillance. 

Les gisements de croissance sont démesurés parce que les besoins sont énormes. Ils ne sont pas forcément budgétivores parce que la digitalisation est facteur d’économie et la qualité des interventions rapides est un outil de prévention.

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Or, l’organisation optimale des soins, la gestion des lits d’hôpitaux, le développement des hôpitaux de jours sont des points qui font cruellement défaut dans le système de santé français. Et cela, malgré ou parce que la part des personnels administratifs dans les effectifs du système de santé est excessive.

Doctolib a les moyens de répondre à ces disfonctionnements parce que le digital dans la e-santé n’en est qu’à ses balbutiements.

Sans être dans le secret de ceux qui, chez Doctolib, travaillent sur l’avenir, il parait évident qu’ils ne puissent pas ne pas préparer la réforme du système public de santé. C’est l’avis de beaucoup de complémentaires santé qui cherchent, elles aussi, l’efficacité et le résultat. Parce que, quoi qu’il arrive, le prochain président ne pourra pas éviter une remise à plat. Doctolib en a les moyens financiers, les expertises, les hommes et les outils. De l’avis de beaucoup de personnel hospitalier, ça marcherait mieux et ça coûterait moins cher aux contribuables ou aux assurés sociaux.

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