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Salon de l’agriculture : bilan d’une semaine très révélatrice sur l’état de l’échiquier politique français
©GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

Constat

Traditionnellement, le Salon de l’agriculture est visité par les principaux leaders politiques français, de toutes les tendances. La façon dont les uns et les autres sont accueillis, les discours qu’ils tiennent, sont autant d’indicateurs de la santé politique de notre pays...

Antoine Jeandey

Antoine Jeandey

Antoine Jeandey est journaliste et auteur de « Tu m’as laissée en vie, suicide paysan veuve à 24 ans ».

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 WikiAgri

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WikiAgri est un pôle multimédia agricole composé d’un magazine trimestriel et d’un site internet avec sa newsletter d’information. Il a pour philosophie de partager, avec les agriculteurs, les informations et les réflexions sur l’agriculture. Les articles partagés sur Atlantico sont accessibles au grand public, d'autres informations plus spécialisées figurent sur wikiagri.fr

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La (très) visible perte d’audience de Marine Le Pen

J’ai observé personnellement depuis plusieurs années que la visite de Marine Le Pen entraine un véritable engouement. S’il existe aussi parfois des contradicteurs, globalement, depuis au moins cinq ans, elle fait mieux chaque année que l’année précédente, à l’applaudimètre des allées du salon de l’agriculture... Hé bien, pour 2018, patatra ! Elle qui a pris un maximum de voix dans les zones rurales, souvent délaissées par les politiques « traditionnels », semble beaucoup moins suivie désormais. Son cortège est apparu presque maigrelet, et elle fut bien moins sollicitée que lors des éditions précédentes. C’est important, car plusieurs enquêtes avaient montré que le vote agricole avait glissé, au fil des années, de la droite traditionnelle vers le Front national, avant de choisir Emmanuel Macron au tout dernier scrutin. La perspective d’un avenir meilleur pour l’agriculture française avec l’avènement de Marine Le Pen semble bien moins d’actualité dans les esprits paysans désormais.

La France et l’Europe, mais où va-t-on ?

Le prochain scrutin, même s’il n’aura lieu qu’en 2019, concernera les élections européennes. Elles sont particulièrement importantes pour le monde agricole puisque la Pac, politique agricole commune, reste encore aujourd’hui l’unique politique effectivement commune à tous les Etats-membres. Certes, on sait que la défense, la sécurité ou encore la recherche doivent faire l’objet de nouvelles lignes budgétaires, mais l’agriculture européenne va conserver son système de soutiens à l’agriculture, au moins ces prochaines années. Qu’a-t-on observé sur le sujet au salon ? D’abord, Emmanuel Macron a eu un discours peu compréhensible, d’une part dans sa vocation à vouloir justifier l’accord de libre-échange entre l’Europe et le Mercosur particulièrement défavorable à notre secteur bovin, et qui surtout autoriserait des importations de viandes ne présentant pas les mêmes garanties sanitaires que chez nous, avec de la nourriture où l’on regarde bien moins si les cultures sont Ogm ou s’il a fallu des pesticides pour les faire pousser. D’autre part, en voulant à tout prix arrêter le glyphosate en France deux ans avant le reste de l’Europe, créant une distorsion de concurrence interne. Visitant le même jour que le Président le salon, François Asselineau, le chantre du Frexit (sortie de la France de l’Europe) a eu beau jeu de déployer des arguments qu’en d’autres temps on aurait considéré simplistes, mais qui furent écoutés dans ce contexte...

Autre aspect, la constitution des listes pour les européennes. On attend particulièrement de savoir à qui seront données les places éligibles au sein de LR, puisque ce parti, qu’il gagne ou non en France, fait partie du groupe PPE au Parlement européen et est majoritaire en Europe. Ce sont donc ses élus qui, majoritairement, font les lois européennes. Lors des précédentes élections européennes, l’Ump (à l’époque) n’avait pas vraiment brillé en constituant des listes avec d’autres critères que les connaissances en agriculture ou les convictions (et si possible compétences) européennes. Finalement, Michel Dantin, dont la présence semblait pourtant incontournable de ces points de vue, avait été « rattrappé par les cheveux » au dernier moment, accompagné uniquement d’Angélique Delahaye. Sur l’ensemble des élus (74 députés européens aujourd’hui, dont 20 de la droite républicaine ou du centre), se retrouver juste à deux capables de suivre les débats sur l’agriculture européenne, c’est un peu limite... Hé bien, à la lumière des infos que j’ai pu glaner quant aux intentions de constitutions des listes, ce pourrait être encore pire pour les élections de 2019...

Xavier Bertrand, pas si en retrait que ça

Puisque nous parlons de la droite, coup de projecteur sur les ses leaders visiteurs du salon. Valérie Pécresse est passée le lundi soir, s’arrêtant principalement sur les stands de sa région, l’Ile de France. Elle y a prononcé un discours vantant sa politique agricole régionale, avec notamment un budget en hausse de 40 % pour ce secteur. Laurent Wauquiez, au-delà des quelques petites phrases dont la presse a fait ses choux gras, a paru détendu dans sa parka rouge, la même les mardi et mercredi. Pour autant, il en fut au salon comme ailleurs : il avait ses partisans, et les autres... Mais celui qui a semblé peut-être le mieux tirer son épingle du jeu fut Xavier Bertrand. Disponible, tant sur sa région qu’en visite globale (lui aussi est resté les mardi et mercredi), il avait visiblement bien étudié la problématique agricole avant son passage. Sur la constitution des prix, il a demandé à ce que ceux qui sont entre le producteur et le consommateur fassent un effort dans leurs marges pour préserver un revenu agricole décent sans pour autant en faire payer le prix au consommateur. Il a même imaginé un processus d’aide aux agriculteurs pour qu’ils améliorent la constitution de leurs filières pour mieux peser dans les négociations avec les autres acteurs, aides soumises à un résultat en la matière. À ce niveau, son propos a paru plutôt national que régional. Il s’est d’ailleurs affiché avec Renaud Muselier, président de la région Provence Alpes Côte-d’Azur, sur son stand des Hauts-de-France, montrant un axe nord-sud finalement très politique...

Jean Lassalle poursuit sa route, jusqu’à l’Europe

Semblant jouer parfois son propre rôle tout dans l’amplitude du geste et de la voix, Jean Lassalle, seul homme politique à placer la défense de la ruralité au premier rang de ses préoccupations et à ce titre plutôt vu d’un bon oeil par les agriculteurs, a aussi avancé sérieusement d’un point de vue strictement politique. C’est ainsi qu’il va lancer son parti fraichement constitué, Résistons !, dans la bataille des élections européennes. Il souhaite que la France rayonne en Europe « comme au temps de De Gaulle », et surtout il veut redonner à l’Europe « le goût de l’être humain », comprenez lui faire quitter ses aspects technocratiques au profit de politiques prenant davantage en compte les êtres humains.

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