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Renault au Maroc, et alors ? 
C'est sur le haut de gamme 
que doit se concentrer la France !
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Made in France

Plutôt que de perdre son temps à évoquer le patriotisme économique défaillant de la marque au losange, pourquoi ne pas se concentrer, comme l'Allemagne, sur les atouts français en matière de production ?

Emmanuel Combe

Emmanuel Combe

Emmanuel Combe est vice-président de l'Autorité de la concurrence et professeur affilié à ESCP-Europe. Il est également professeur des universités.

Spécialiste des questions de concurrence et de stratégie d’entreprise, il a publié de nombreux articles et ouvrages, notamment sur le modèle low cost (Le low cost, éditions La Découverte 2011). Il tient à jour un site Internet sur la concurrence.

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Dans le débat sur les délocalisations, il est de bon ton, à gauche comme à droite, de fustiger depuis quelques jours l’ouverture à Tanger d’une usine Renault : comment peut-on accepter qu’une entreprise fasse preuve de si peu de « patriotisme économique » et aille produire à l’étranger ce qu’elle pourrait fabrique sur le sol français ?

"Que l'on fabrique à Tanger des voitures à bas prix en surexploitant les travailleurs par rapport aux travailleurs français pour ensuite amener les voitures en Europe, voilà qui est aberrant » a ainsi déclaré Jean Luc Mélenchon, faisant écho aux indignations de .... Christian Estrosi.

Voilà une bonne occasion de rappeler à nos politiques de tous bords quelques principes de base de l’économie.

Si la Logan était produite en France, son coût de production serait à l’évidence largement supérieur à celui en Roumanie et à Tanger, compte tenu des écarts de salaires et de charges. Avec un coût de production plus élevé en France, Renault n’aurait d’autre choix que d’augmenter son prix de vente … en France. D’où une question très simple : les consommateurs, qui sont libres de choisir ce que bon leur semble, continueront-ils d’acheter des Logan si leur prix venait à augmenter de manière significative ? On peut en douter, dans la mesure où une Logan n’est pas une voiture de luxe mais une voiture dont le principal argument de vente est  justement … le prix bas (en plus de la fiabilité). La Logan produit en France n’aurait tout simplement pas de marché, faute de demande.

La vraie question économique n’est donc pas de savoir si la Logan doit être produite ou non en France car ce choix n’existe pas en réalité. Difficile dans ces conditions de considérer que la décision de s’implanter à Tanger détruit de l’emploi en France puisque la Logan n’a jamais été produite chez nous et ne le pourra jamais. On peut par contre imaginer sans peine que la Logan nécessite des ressources en ingénieurs, en recherche-développement qui, elles, sont localisées … en France. Le choix de Renault de produire à l’étranger, loin de détruire des emplois qui n’ont jamais existé chez nous, profite même plutôt à l’emploi en France …. des travailleurs qualifiés. Quel paradoxe !

Mais alors, doit-on considérer qu’il n’y a plus de place pour la production de voitures sur le sol français ? Non, dès lors que le prix de la voiture n’est plus son principal argument de vente : si vous fabriquez des voitures haut de gamme, le prix devient un argument moins important que l’image de marque,  le design, la créativité, la qualité des produits et du service. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un œil sur nos amis allemands, qui ont fait le choix de la montée en gamme de toute leur production, à l’image de Volkswagen, au point de vanter aujourd’hui dans les publicités le “made in Germany” et la “deutsche Qualität”..

La vraie question que devrait se poser nos politiques c’est de savoir pourquoi nous, Français, sommes si peu positionnés sur le segment du haut de gamme. Sans doute parce que nous n’avons pas assez misé depuis une décennie sur la compétitivité par la qualité des produits et sur la qualification des hommes. La qualité ne se décrète pas ; elle se construit par des politiques de formation de la main d’oeuvre à tous les niveaux. Il est donc inutile d’aller chercher à Tanger ou ailleurs les boucs émissaires de nos propres insuffisances. Le problème est en nous. Sa solution également.

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