Réforme des régimes spéciaux : de la poudre aux yeux <!-- --> | Atlantico.fr
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Le président Emmanuel Macron s'exprime aux côtés du président chilien après leur rencontre à l'Elysée à Paris, le 6 septembre 2021.
Le président Emmanuel Macron s'exprime aux côtés du président chilien après leur rencontre à l'Elysée à Paris, le 6 septembre 2021.
©Ludovic MARIN / AFP

Retraites

Emmanuel Macron aurait l'intention d'avancer sur son projet de réforme des retraites avant la fin de ce quinquennat. Le chef de l'Etat envisage de supprimer les régimes spéciaux. Cette réforme des retraites a minima pourrait-elle avoir un vrai intérêt ? Le chef de l'État a-t-il le crédit pour réformer comme il l'entend ?

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : Selon Les Echos, Emmanuel Macron envisage de supprimer la quarantaine de « régimes spéciaux » qui demeurent, et à instaurer parallèlement une pension minimale de 1000 euros. Cette réforme des retraites a minima pourrait-elle avoir un vrai intérêt ?

Philippe Crevel : C’est évidemment plus un acte de communication que fait pour agir dans le champ budgétaire et financier. Communication d’abord en interne, puisqu’il montre qu’il continue à réformer tout en faisant plaisir à son électorat traditionnel. C’est aussi un message politique extérieur, au niveau européen. Il y a un début de débat sur les déficits publics et la France est l’un des mauvais élèves. Juste avant que la France prenne la présidence tournante de l’Union européenne, c’est une manière d’essayer d’éviter d’être la cible de ses partenaires en montrant un volontarisme sur les finances publiques.

Ensuite, ce qu’on imagine que le président puisse faire, au mieux, est de dire que tous les nouveaux entrants dans les régimes spéciaux ne seraient pas concernés. Cela signifie qu’il faudrait 40 ans pour faire la réforme. C’est évident que ça ne rapportera pas grand-chose dans un premier temps. Il s’agirait plutôt d’une décision de l’ordre de la symbolique.

Est-ce simple de mettre fin aux régimes spéciaux ?

Ça parait très compliqué, surtout à quelques mois de l’élection présidentielle. La population concernée pourrait se mobiliser très rapidement et sait que le gouvernement ne peut pas se payer le luxe d’un blocage de la SNCF et de la RATP pendant trois mois en pleine reprise économique. Emmanuel Macron est actuellement favori de la présidentielle, il prend un risque de se tirer une balle dans le pied en cas de dérapage.

Il faut toutefois rappeler que la fin des régimes spéciaux de la SNCF a été actée par la loi de réforme de l’entreprise. C’est une sortie progressive qui a été votée. La méthode sera celle-ci, sauf à risquer un conflit social dur, ce qui n’est pas souhaitable à l’approche de la présidentielle.

A moins d’un an de l’élection présidentielle, le chef de l'État a-t-il le crédit pour réformer, par décret comme il l’entend ?

Le fait de passer par décret pourrait être perçu comme autoritaire et lui être reproché. Mener cette réforme serait pour lui une façon de se marquer à droite en rappelant que, comme il l’avait promis, il met fin aux régimes spéciaux. Cette mesure est plutôt populaire dans l’électorat de droite où il trouve une majorité de ses soutiens. Il couperait donc l’herbe sous le pied des candidats de la droite.

D’ailleurs, la proposition de François Bayrou de refaire un nouveau parti politique agglomérant le centre et La République en marche accentue cette idée d’une recomposition sur le centre droit, un peu à l’image de ce qu’avait fait Chirac avec l’UMP. Le risque est que les syndicats décident la grève et qu’il y ait un pourrissement de la situation sociale à l’automne. Emmanuel Macron est entré en campagne et je ne pense pas qu’il ira jusqu’au bout.

La pension minimale 1000 euros est-elle une manière de contrebalancer sa proposition ?

La promesse a été faite dès le début de la discussion concernant la réforme des retraites, dans le projet Delevoye. A mon sens, cela fait partie de sa feuille de route pour la présidentielle, c’est une mesure électorale forte. La question est de savoir comment on finance ces 1000 euros, comment on trouve les ressources ? Théoriquement, la fin des régimes spéciaux pourrait le financer. Mais comme on n’imagine pas une fin brutale des régimes spéciaux, cela ressemble plutôt à un jeu de dupes.

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